Le Rabbi Rachab, dans le discours commençant par le verset תתן אמת ליעקב délivre plusieurs enseignements essentiels sur le chant. Il décrit deux sortes de chants. Le premier est lié au service divin du ‘Bénoni’, alors que le second est lié au service divin du ‘Tsaddik’. Les différences qui existent entre les deux sont les mêmes que les différences qui existent entre le niveau de ‘Yaakov’ et le niveau ‘d’Israël’.

Le service divin de Yaakov est le travail qu’il doit mener pour dévoiler en lui-même la lumière d’Havayeh. C’est le combat que l’on mène au moment de la Téfilah et qui consiste à ôter les voiles de l’âme animale laquelle nous empêche et le perturbe par de mauvaises pensées) afin de dévoiler la lumière de l’âme divine. C’est précisément en éveillant l’amour et la crainte de D.ieu que l’on parvient à vaincre l’âme animale.

Le fait que l’âme animale est tel un voile qui obscurcit la lumière de l’âme divine est conséquent au fait que la lumière d’Havayeh est cachée par le Nom Elokim. Depuis le peche de larbre de la Connaissance du bien et du mal la dissimulation de la lumière divine au moyen du Tsimtsoum (Elokim) a donné la possibilité à l’homme de choisir entre le bien et le mal, car si la lumière d’Havayeh brillait dans ce monde de façon manifeste sans que le monde ne reçoive sa vitalité de Klipat noga (comme c’était le cas avant le péché de l’arbre) l’âme animale naurait plus aucun pouvoir car elle ne recevrait aucune vitalité. Ainsi, le service divin de Yaakov n’est pas éclairé par le dévoilement de la lumière d’Havayeh mais à l’opposé, le service divin d’Israël représente le dévoilement de la lumière d’Havayeh et il ne consiste donc pas à raffiner ni à réparer ; même pour ce qui concerne les prières c’est un service divin qui est accompli sans efforts et sans peines. Dans le cas d’Israël le Divin brille chez lui de façon manifeste.

Le niveau d’Israël est celui du Tsaddik et en ce qui le concerne la ‘Hassidout n’emploie pas l’expression ‘d’ame animale’ car le nom ‘animal’ exprime l’impulsion et le désir de l’homme pour des choses et des plaisirs matériels et grossiers, et du fait que le Tsaddik n’a pas de Yetser ha-ra et qu’il n’a aucune attirance pour tout ce qui n’est pas lié à la Sainteté, la ‘Hassidout emploie l’expression ‘d’âme vitale’ au lieu ‘d’âme animale’. Chez le Tsaddik l’âme vitale ne cache pas et ne voile pas la lumière de l’âme divine. Ainsi, chez le Bénoni le moment de la prière est celui d’un combat contre lame animale alors que chez Israël la prière des jours de la semaine est du niveau de la prière de Chabbat pendant laquelle l’âme ressent le plaisir d’être liée à D.ieu car l’Essence de l’âme Juive est enracinée dans l’Essence divine et elle ressent le Divin. C’est pourquoi la ‘Hassidout établit la différence entre le niveau d’Israël qui sert D.ieu avec son âme et Yaakov qui sert D.ieu avec son corps.

L’impulsion naturelle de l’âme divine vers sa source fait est liée à l’amour qu’un Juif ressent pour son Créateur. La ‘Hassidout emploie le terme de ‘Hitpaalout’ pour qualifier ‘l’Essence du plaisir’ que l’âme ressent du fait de son attachement à D.ieu, du fait ‘qu’elle est véritablement une parcelle de divinité d’en-haut’, liée, attachée, à D.ieu par un lien essentiel. Le Rabbi Rachab décrit le niveau de Ahava-bé-taanouguim comme un plaisir ressenti par l’âme qui est si fort que l’âme se libère du corps pour retrouver sa source divine.

Le Rabbi Rachab souligne ici que l’impulsion de l’âme vers sa source et le plaisir qu’elle ressent sont dévoilés chez le Tsaddik alors que chez le Bénoni ce n’est pas le cas. L’exemple que donne le Rabbi Rachab est celui du Chant. Chez le Bénoni le Chant réveille l’amour et la crainte de D.ieu mais chez le Tsaddik l’amour et la crainte sont constamment dévoilées dans son cœur et dans ce cas le Chant ne provoque pas la ‘Hitpaalout’ mais au contraire de la ‘Hitpaalout’ vient le Chant. Cela signifie que le Tsaddik n’a pas besoin du Chant pour éveiller la crainte et l’amour de D.ieu car au contraire le Chant vient de la crainte supérieure et du très grand amour qu’il ressent à tous les moments pour D.ieu. C’est la raison pour laquelle le Rabbi Rachab écrit que chez le Tsaddik ‘le Chant vient de lui-même’, sans qu’il n’ait besoin de faire des efforts comme pour le Benoni qui doit d’abord dévoiler l’amour et la crainte de D.ieu. Chez le Tsaddik, le Chant vient de lui-même comme ‘une flamme qui monte par elle-même’.

‘Une flamme qui monte par elle-même’

‘Quand tu allumeras les lumières vers la face de la Ménorah’, ce verset qui est au début de notre Paracha possède de nombreuses explications. Rachi explique dans son commentaire que ‘quand tu allumeras signifie en fait quand tu feras monter’.

Dans le Dvar Mal’hout, le Rabbi fonde son enseignement à partir de cet enseignement de Rachi et du fait que L’Eternel désirait qu’Aaron allume la Ménorah ‘en tenant le feu près de la mèche jusqu’à ce que la flamme monte par elle-même’.

Le corps d’un Juif est précieux aux yeux de l’Eternel et Il désire que nous accomplissions Sa Volonté au moyen des forces de notre âme, et au moyen de notre corps. Cependant, le Rabbi souligne que ‘le corps par lui-même n’est pas lié au service divin et la preuve de cela est que nous devons l’habituer à ce travail, afin que l’habitude devienne une seconde nature’.

En effet, par sa nature, l’âme animale incite l’homme à assouvir constamment des désirs matériels et grossiers, aussi, la mission de chaque Juif consiste à habituer le corps et l’âme animale à la pratique des Mitsvoth et à l’étude de la Torah. En d’autres termes habituer le corps signifie qu’on le rend docile aux Commandements en domptant peu à peu l’âme animale. Comme on dompte un animal pour lui imposer notre volonté, nous devons forcer notre âme animale à aimer D.ieu. Ce faisant nous réalisons l’injonction divine d’aimer notre D.ieu ‘de tout notre cœur’, c’est à dire ‘avec nos deux penchants’.

Habituer notre mauvais penchant en habituant notre corps à accomplir des Mitsvoth, au point que ‘l’habitude devient une seconde nature’. Dans ce cas la nature du corps et de l’âme animale se transforment peu à peu, et avec beaucoup de travail nous pouvons même parvenir à ‘transformer l’obscurité en lumière’, à l’exemple des Tsaddikim qui raffinent et purifient l’âme animale afin que celle-ci s’unisse à l’âme divine d’un lien parfait.

D’une certaine manière, l’union de la force de l’âme animale avec la force de l’âme divine est comparable à deux flammes qui s’unissent et ne forment plus qu’une seule flamme. Aussi, à la lecture des versets de notre Paracha : ‘Quand tu allumeras les lumières vers la face de la Ménorah…En tenant le feu près de la mèche jusqu’à ce que la flamme monte par elle-même’, nous pouvons expliquer qu’il y a ici une allusion au fait que lorsque l’on habitue le corps à accomplir les Commandements divins : ‘en tenant le feu près de la mèche’, alors la force de l’âme animale s’unit avec la force de l’âme divine et dans ce cas : ‘la flamme monte par elle-même’.

A la lumière de ce qu’il vient d’être dit nous comprenons la déclaration du Rabbi selon laquelle ‘Un Juif dévoile la force de l’Essence divine qui est dans le corps en le purifiant.’

Le travail qui consiste à dompter l’âme animale est une étape vers le niveau supérieur du dévoilement de l’Essence divine dans le corps. Purifier le corps débarrasse le corps de ses limites. A l’exemple de l’Arche qui bien qu’elle possède des mesures précises ‘ne prenait pas de place dans le Saint des Saints’ parce qu’elle contient les Tables de l’Alliance écrites du doigt de D.ieu, lorsque le corps est débarrassé de ses impuretés il devient un réceptacle de l’Essence divine et dans ce cas, comme l’Arche, ‘il ne prend pas de place’, c’est à dire qu’il s’élève au-delà de toutes les limites matérielles de ce monde.

Comme le Rabbi nous l’enseigne dans le Dvar Mal’hout, lorsqu’un Juif parvient à habituer le corps à accomplir les Commandements divins alors ‘l’accomplissement des Mitsvoth n’est plus une chose ajoutée’, mais font partie intégrante de son être et de son existence. Ce Juif fait alors Un avec D.ieu, en purifiant son corps il est parvenu en même temps à dévoiler que ‘même le corps matériel d’un Juif est lié au Saint béni soit-Il’.

La profondeur de tous ces enseignements ne se limite pas à l’âme Juive. En effet, le monde matériel est lui-aussi tel ‘une mèche qui a besoin d’huile’.
Le Rabbi nous enseigne que notre mission consiste aussi à introduire la sainteté dans la matière de ce monde. De fait, la majorité des Commandements divins est accomplie au moyen de la matière, et depuis le don de la Torah, chaque Juif détient la capacité de sanctifier ce monde profane.
A partir de la matière profane, la peau d’une vache, et de l’encre que l’on obtient en broyant des végétaux, un Sofer écrit des Parachiot sur du parchemin et crée ainsi un objet de sainteté, une Mézouzah, une paire de Téfilines, un Séfer Torah. L’un des points essentiels du Dvar Mal’hout, est que lorsqu’il a introduit la sainteté dans cet objet matériel, cet objet devient comme cette flamme qui monte d’elle-même, car une fois que le Sofer a introduit la sainteté dans cette Mézouzah, ou dans ces Parachiot, ou dans ce Séfer Torah, la sainteté ne quitte plus son endroit. L’image du Sofer en train d’écrire est donc comparable à celle d’Aaron ‘tenant le feu près de la mèche’, puis lorsqu’il a fini d’écrire alors cette Mézouzah, cette paire de Téfilines, ou ce Sefer Torah, deviennent comme ces ‘flammes qui montent par elles-mêmes’. Ils deviennent indépendants, du fait qu’ils sont désormais des objets emplis d’une sainteté qui ne les quittera plus, à l’exemple de cet élève qui peut se ‘tenir seul debout sur ses pied’, et diffuser à son tour la lumière qu’il a reçu de son Maître, ainsi qu’il a été dit précédemment.

A travers cet enseignement, selon lequel le monde matériel doit être ‘une flamme qui monte d’elle-même’, le Rabbi souligne que c’est précisément en élevant le niveau le plus bas, que l’on parvient à élever tous les autres niveaux, y compris le plus haut niveau, et que l’on finit par provoquer finalement le dévoilement de l’Essence divine, avec la venue de notre Juste Machia’h, très bientôt et de nos jours, avec l’aide de D.ieu.