Il est un principe selon lequel la « haftara » qui est lue chaque Chabbat est liée, dans son contenu, avec la paracha hebdomadaire dont elle suit la lecture. Ceci est vrai même dans les cas où la Haftara évoque principalement les évènements qui se sont historiquement déroulés dans cette période de l’année. Ainsi, la haftara de ce Chabbat, « Na’hamou na’hamou ‘ami – Consolez, consolez Mon peuple » (Isaïe 40, 1) qui vient apporter la consolation après la période de la destruction du Temple, est-elle également liée à la paracha de cette semaine, celle de « Vaét’hanane ».

Ce lien apparaît a priori de façon évidente : la haftara évoque la double consolation – pour la destruction du premier et du second Temple – que constituera l’édification du troisième Temple, un édifice éternel dans une délivrance éternelle. La paracha, quant à elle, rapporte la demande de Moïse à D-ieu de rentrer en Terre Sainte. Or, si cette prière avait été exaucée, le peuple d’Israël serait alors entré sur sa terre avec Moïse et cela aurait immédiatement constitué une délivrance complète et éternelle et le Temple qui aurait alors été bâti aurait été éternel lui aussi.

Il convient cependant de nuancer cette similitude. En effet, dans la paracha de Vaét’hanane, il est également mentionné que la requête de Moïse ne fut pas accordée et que c’est finalement Josué qui fit entrer le peuple en Terre Sainte. À cause de cela, cette entrée ne fut pas totalement aboutie, ce qui permit par la suite que le Temple fut détruit. Or, dans la haftara, il est fait mention de la consolation redoublée à travers la construction d’un Temple éternel lors d’une délivrance éternelle qui supprimera définitivement l’exil ! Ainsi, bien que la paracha souligne la nécessité de la consolation, elle n’apparaît cependant pas liée au contenu de la haftara.

La répétition évoque la multiplication sans proportion

Pour résoudre cette difficulté, il convient de s’attarder sur la dimension messianique de cette haftara :
« Consolez, consolez Mon peuple » n’est pas seulement évocateur de la délivrance par la mention de la consolation, mais aussi par sa formulation redoublée. En effet, le Midrache (Yalkout Chimoni Lekh Lekha § 64 et autres) cite cinq lettres des Écritures qui sont doublées en relation avec la délivrance messianique, telle que l’injonction divine à l’adresse d’Avraham « Lekh lekha – Va pour toi », liée à sa délivrance d’Ur en Chaldée pour aller vers la terre promise, ou encore « Pakod pakadti etkhem – Je me suis souvenu de vous », les paroles divines annonciatrices de la délivrance que Moïse rapporta aux Enfants d’Israël en Égypte en entamant sa mission. Le verset « Kiflaïm létouchiah – multiple d’après la sagesse de la Torah » (Job 11, 6) fait également allusion à la délivrance, car « touchiah » est à rapprocher de « yéchou’ah – la délivrance ».

Le rapport entre la délivrance et le doublement vient du fait que ce dernier ne représente pas seulement la multiplication par deux, mais évoque l’accroissement à l’infini (car aucune limite n’est précisée quant au nombre de doublements à effectuer). Or, l’infini est une caractéristique de l’ère messianique, car celle-ci tout comme le troisième Temple seront éternels, c’est-à-dire infinis dans le temps.

En outre, la répétition de « Na’hamou na’hamou ‘ami – Consolez, consolez Mon peuple » est encore plus évocatrice de la délivrance que « Lekh lekha », « Pakod pakadti » ou autres, car, contrairement aux autres cas, il s’agit de la répétition du même mot, qui garde le même sens dans ses deux occurrences.

En effet, lorsque la répétition n’est pas parfaitement identique, les deux termes désignent différentes modalités de délivrance, chacune possédant ses qualités exclusives. Cela exprime alors une perfection atteinte par la somme de différentes qualités et ne constitue donc pas l’expression d’une véritable infinité. En revanche, la répétition de « Na’hamou na’hamou » évoque l’infini absolu (qui contient en lui toutes les modalités éventuelles de la délivrance). Ceci est d’autant plus clair sachant que cette expression est prononcée par D-ieu Lui-même, qui est le véritable Infini.

Toutes les qualités

On peut cependant poser la question suivante : dans la mesure où la consolation divine se concrétisera à travers la reconstruction du Temple (et non par des paroles apaisantes, par exemple), en quoi le fait que celle-ci suive la destruction deux fois répétée du Temple joue-t-il ? Il semble en effet, a priori, que le troisième Temple ne fera que remplacer le deuxième. Dès lors, en quoi s’agit-il d’une « double » consolation ?

La réponse à cela tient dans le fait que les deux premiers Temples représentèrent des niveaux différents : le premier Temple se distingua par un très haut dévoilement divin. Seul celui-ci, d’ailleurs, contint l’Arche Sainte renfermant les Tables de la Loi, définie comme le « lieu de repos de la Présence Divine ». Le second Temple, à l’opposé, fut caractérisé par une plus grande pénétration de la sainteté à l’intérieur du monde : il dura plus longtemps (420 ans au lieu de 410 ans pour le premier) et ses dimensions furent plus grandes.

Le troisième Temple, quant à lui, possédera les qualités respectives du premier et du second Temples. Il ne s’agira cependant pas de qualités distinctes et opposées, car ce Temple sera caractérisé par l’infini absolu et conjuguera donc naturellement toutes les qualités possibles. On y trouvera dès lors le plus haut dévoilement divin, la plus grande pénétration des dimensions matérielles et la conjonction des deux en une seule qualité. C’est pourquoi ce Temple sera non seulement « troisième », mais aussi « triple » dans sa qualité.

Telle est donc la « double consolation » exprimée par le début de notre haftara : « Na’hamou na’hamou ‘ami – Consolez, consolez Mon peuple».

La paracha de la Délivrance

Il apparaît que cette qualité est également présente dans notre paracha, Vaet’hanane. En effet, celle-ci est caractérisée par la répétition des Dix Commandements (qui ont déjà été écrits dans la paracha de Yitro).

Cette double apparition des Dix Commandements dans le texte de la Torah s’explique par le fait que leur première mention souligne l’ampleur de la révélation divine qui eut lieu au Sinaï, alors que leur seconde occurrence met plus en avant l’acceptation et l’intégration de ces principes par les Enfants d’Israël.

Cependant, comme nous l’avons dit plus haut, la répétition symbolise également l’accroissement à l’infini. La répétition du Don de la Torah fait donc aussi référence à la révélation des degrés infinis de la Torah qui aura lieu dans les temps messianiques. Celle-ci conjuguera les deux qualités évoquées, la révélation d’En-Haut et l’intégration en bas, auxquelles s’ajoutera leur conjonction en un seul mouvement, s’agissant de la révélation de l’Infini absolu.

Tel est donc le lien entre la paracha et la haftara : ces deux textes évoquent la révélation de l’Infini absolu qui caractérisera la délivrance messianique.

C’est également une des raisons pour lesquelles ce n’est pas Moïse qui fit rentrer les Enfants d’Israël en Terre Sainte (malgré ses supplications). Ce scénario, en effet, aurait seulement été le fait d’un très haut dévoilement divin transcendant le monde. La rentrée avec Josué, qui s’étala sur de nombreuses années, ainsi que les différentes périodes qui ont jalonné notre histoire jusqu’à ce dernier exil, ont permis de raffiner et de purifier le monde en profondeur.

Ainsi, suivant ce qui a été dit plus haut, lorsque nous rentrerons à nouveau sur notre terre lors de la délivrance messianique, les deux qualités seront associées : le haut dévoilement divin (qui aurait accompagné la rentrée avec Moïse) et la pénétration dans le monde (grâce au travail de Josué), mais également leur conjonction en un seul mouvement du fait de la révélation de l’Infini absolu, comme nous l’avons expliqué précédemment.

En plus de cela, la révélation de l’Infini absolu lors de la délivrance apparaît dans la date de la veille de ce Chabbat (en 5751 – 1991, Ndt) : le 15 Av.

En effet, le quinzième jour de mois, la lune est pleine, évoquant la plénitude qui caractérisera le peuple juif à l’ère messianique.
Le 15 Av désigne la pleine lune du mois dans lequel est né le Machia’h et dans lequel son « mazal » est donc le plus fort, ce qui rappelle et exprime que la destruction du Temple dans ce mois eut lieu uniquement dans le but qu’il soit reconstruit dans ce mois.

La veille du Chabbat évoque la perfection de la préparation à la délivrance qui est appelée « Le jour qui sera entièrement Chabbat et repos pour une vie éternelle ».

Un tournant extrême

En relation avec le 15 Av, à partir duquel les nuits recommencent à s’allonger sensiblement, nos Sages ont donnée l’instruction suivante : « À partir du 15 Av, celui qui rajoute du temps de la nuit sur celui du jour dans l’étude de la Torah, rajoute du temps à sa vie » (fin du traité Taanit, voir Rachi).

Cet enseignement est a priori surprenant, car il est de toute façon du devoir d’un Juif d’exploiter tout le temps dont il dispose pour l’étude de la Torah dans la mesure de ses capacités. Ainsi, l’ajout dans l’étude auquel il est ici fait référence ne peut être qu’un ajout qui transcende toute limitation ! Comme le dit notre paracha : « Tu aimeras l’É-ternel ton D-ieu… ‘Bekhol méodékha’ – de tout ton pouvoir », littéralement « de toute ta profusion » (car « méod » signifie « beaucoup »), c’est-à-dire au-delà de tes limites (‘méodékha’ – ‘ce qui est pour toi beaucoup’), ce qui te lie avec l’Infini divin.

Il s’agit donc d’une préparation adéquate à l’ajout infini dans l’étude de la Torah qui aura lieu lors de la révélation messianique de la « nouvelle Torah (qui) sortira de Moi » (Isaïe 51, 4 ; Midrache Vayikra Rabbah 13, 3). Et, grâce à cela, on parviendra à la plénitude du « rajout du temps à la vie » au-delà de toute limite : la vie éternelle.

Tout ceci est d’autant plus accentué cette année (5751 – 1991, Ndt) qui est, d’après tous les signes, « l’année dans laquelle le roi Machia’h se dévoilera » (Midrache Yalkout Chimoni Isaïe § 499), (en plus du compte selon lequel nous sommes historiquement à « la veille de Chabbat après le milieu du jour » à partir de l’an 5751), et dont l’écriture en lettres hébraïques (ה’תשנ »א) forme l’acrostiche de « הי’ תהא שנת נפלאות אראנו – Ce sera une année de prodiges que Je lui montrerai ». Sachant en particulier que, tout au long de l’année, on a assisté (et on assistera encore) à des évènements de l’ordre du prodige, chacun plus « prodigieux » que le précédent, ce qui suscite à chaque fois une nouvelle émotion.

Ceci inclut le « prodige » qui se déroule ces jours-ci : le congrès des ‘hassidim et des émissaires (du Rabbi, Ndt) à Moscou, capitale de la Russie, pour débattre de la façon d’amplifier l’œuvre de renforcement du Judaïsme et de diffusion de la ‘Hassidout dans le monde entier. On voit de quelle façon ce pays qui avait, dans le passé, combattu l’œuvre de mon beau-père, le Rabbi précédent, accueille et honore ses disciples et ses émissaires qui perpétuent son action.

Ainsi, alors que nous nous trouvons à la fin de cette année, après le mois de Nissan, le mois de la délivrance, et les mois suivants et que nous commençons à nous préparer au mois de Eloul, il est évident que la délivrance messianique doit intervenir immédiatement.

Et, puisque nous nous trouvons au seuil de la délivrance lors de laquelle tout sera dévoilé de façon infinie, il convient que nous commencions à « goûter » à cet infini dès à présent (selon la coutume de goûter aux « plats » du Chabbat la veille du Chabbat) en rajoutant à l’étude de la Torah et à la pratique du Judaïsme d’une façon qui transcende toute limite, en particulier dans l’étude de la partie profonde de la Torah, la ‘Hassidout, et dans l’étude des sujets qui traitent de la délivrance messianique. Il est bon d’organiser en cela des cours collectifs rassemblant au moins dix hommes.

Trois choses

Dans le troisième chapitre des « Pirkei Avot » que nous lisons ce Chabbat, il est dit « Considère trois choses et tu n’en viendras pas à fauter » suite à quoi vient l’énumération de ces trois choses. Cependant, il est possible d’expliquer cette phrase de la Michna en elle-même :
« Considère » : réfléchis et médite profondément jusqu’à ce que la vérité de la chose t’apparaisse comme si tu la voyais de tes yeux.
« Trois choses » : c’est-à-dire le troisième Temple qui aura trois qualités : 1. la qualité du premier Temple, 2. la qualité du second Temple, 3. la réunion de ces deux qualités ensemble.

Et grâce à cela nous mériterons immédiatement de voir concrètement la troisième délivrance avec le troisième Temple et nous mériterons la « nouvelle Torah » qui sera alors révélée et à l’accomplissement de la prière de Moïse « Laisse-moi traverser que je voie ce bon pays… cette belle montagne (c’est Jérusalem. Rachi) et le Liban (c’est le Temple. Rachi) ».