Le point névralgique de la parachath Vaychla’h est la rencontre entre deux mondes radicalement opposés. Celui de Yaakov qui symbolise le peuple juif et celui de son frère Essav qui représente le monde des nations. Mais alors que l’on se serait attendu à avoir le nom d’une paracha rappelant cette rencontre, nous avons le nom de Vaychla’h qui signifie « Il envoya ». A quelle mission, la Thora fait-elle allusion avec ce titre ?
Si l’on se situe sur un plan strictement historique, la Thora nous décrit la rencontre de deux frères qui se retrouvent après plus de trente cinq ans d’absence. Yaakov se doute qu’il va revoir son frère dans des conditions menaçantes : Essav veut le tuer ! Et c’est en tenant compte de ces menaces que Yaakov se prépare à affronter ce danger. Mais les commentateurs du sens profond de la Thora envisagent une autre perspective. Pour la comprendre, il faut se rappeler que cette rencontre est précédée d’une mission. Avant qu’il ne retrouve son frère, Yaakov envoie des émissaires vers lui, pour préparer ces « retrouvailles ».
En deux temps
Nos Maîtres expliquent que nous sommes tous des émissaires de D.ieu, quand l’âme d’un Juif descend sur terre, revêtue d’un corps pour accomplir une sainte mission : celle d’éclairer le monde par la lumière de la Thora ou, en d’autres termes, affronter le monde de Essav, l’affaiblir pour, au final, l’imprégner de la lumière divine. Mais le texte de la paracha vient nous apporter une précision dans le déroulement de cette mission qui se produit en deux étapes. La première s’incarne dans la parachath de la semaine dernière qui porte le nom de Vayétsé (il sortit) alors que la seconde se retrouve dans notre paracha (Vaychla’h-Il envoya).
Une proximité nouvelle
Dans la parachath Vayétsé, c’est Its’hak qui envoie son fils Yaakov dans le monde de Lavane. Et effectivement, Yaakov sera l’émissaire de son père pour apporter de la lumière dans le monde idolâtre de Lavane. Là, Yaakov agit seul, délégué par son père. Mais Vaychla’h introduit une dimension radicalement nouvelle. Yaakov est toujours émissaire mais il va former d’autres émissaires. Il va certes affronter le monde obscur d’Essav mais au préalable, il envoie lui aussi d’autres émissaires. Nous avons là un enseignement extraordinaire qui dépasse l’instant de la paracha. La rencontre de Yaakov et Essav préfigure les temps messianiques qui verront une proximité nouvelle entre Juifs et non Juifs. Durant des siècles ce contact étroit entre eux fut difficile du fait du cloisonnement d’Israël dans le ghetto ou le mella’h. Mais à l’approche de la délivrance messianique (époque dans laquelle nous nous trouvons et dans laquelle les cloisons entre Juifs et non Juifs seront tombées) nous aurons comme tâche, entre autres, d’apporter de la lumière autour de nous, jusqu’au monde non Juif. Pour cela, le travail personnel sera insuffisant. Chacun, conscient de l’urgence du travail devra former d’autres Juifs pour qu’à leur tour, ils influencent leur environnement dans le droit chemin.