Les trois frères Meile’h, Yossel et Menahem Gurevitz, sont venus des États-Unis pour organiser avec le Beth Habad se Sderot et R. Eliyahou Gutman une opération de soutien aux soldats de Tsahal qui ont risqué leur vie pour récupérer et sauver les corps des 21 soldats tués dans l’effondrement du bâtiment lors de la guerre à Gaza. Ils ont également visité les sites du massacre qui a eu lieu à Simhat Torah, dans les localités du sud et sur le site de Nova. Yossel Gurevitz décrit le journal d’un voyage bouleversant, publié ici pour la première fois.

 

« La première chose qui frappe lors de la rencontre avec les soldats blessés, ainsi que les civils amputés que nous avons rencontrés hier à l’hôpital Sheba, c’est leur esprit de combat, leur foi et leur courage.

Le cliché « Nous sommes venus les renforcer et nous sommes repartis renforcés » devient là-bas, dans les couloirs et les chambres qui abritent ces jeunes soldats, une réalité saisissante.

Tous les soldats que nous avons rencontrés , bien que leurs vies aient radicalement changé, dont certains attendent une prothèse et que d’autres doivent subir une longue réadaptation, ont exprimé le désir de revenir auprès de leurs camarades et de se battre jusqu’à la victoire totale.

Ces jeunes gens, dont certains ont été blessés une deuxième fois alors qu’ils auraient pu tranquillement éviter de retourner sur le champ de bataille et d’être à nouveau blessés sans que personne ne leur en fasse le reproche. Mais ils ont insisté pour revenir au champ de bataille afin de défendre la patrie et le peuple et remporter une écrasante victoire contre l’ennemi.

Nous avons rencontré non seulement des soldats mais aussi des civils qui nous ont raconté ce qui leur était arrivé le matin de Simhat Torah. L’un d’eux, amputé d’un bras et de deux jambes, a perdu sa femme et son fils par un missile RPG que les terroristes ont tiré à travers la porte du mamad alors qu’il la tenait fermement pour tenter de les empêcher de l’ouvrir. Il nous a dit avec un courage inconcevable qu’au lieu de plonger dans le désespoir, il remercie D.ieu, bien qu’il ne se définissant pas comme pratiquant, pour les 32 ans de vie commune avec sa merveilleuse épouse et pour le cadeau qu’il a eu pendant 15 ans d’avoir eu un fils talentueux et aimé.

Après avoir mis les Tefilines avec plusieurs autres soldats, des cadeaux leur ont été offerts par les émissaires Rav Levi Gupin et Rav Levi Mendelsohn, qui font un travail sacré. Il était impossible de ne pas être impressionné par le lien personnel et chaleureux tissé entre les émissaire et chacun des blessés.

Puis, nous avons continué vers le sud. Les pluies qui sont tombées ces deux dernières semaines ont coloré les champs. Bien que le ciel était gris, à travers les nuages, le soleil scintillait sur les champs et les arbres, les bas-côtés de la route étaient couverts de tapis de fleurs et tout semblait calme et pastoral.

Puis nous sommes arrivés à Sderot. Nous avons traversé la place et l’arrêt de bus où le massacre de femmes et d’hommes qui se rendaient à la Mer Morte a eu lieu. L’endroit où le Bédouin noble a essayé d’aider la mère et les petites filles effrayées dont le père venait d’être assassiné et quand il est arrivé au poste de police, les terroristes l’ont également assassiné ainsi que la mère.

Là où se trouvait le poste de police fortifié, il y a maintenant un terrain vague. À la gare, comme on s’en souvient, une bataille terrible a duré plus d’une journée jusqu’à ce que les obus de char fassent tomber ceux qui étaient piégés et ceux qui piégeaient. Et pourtant, la ville a subi plus de cent quatre-vingts victimes, que leur souvenir soit une bénédiction.

Nous sommes allés avec l’émissaire Rav Asher Pizem au Beth Habad dont la façade est une copie du 770, qui tout au long de cette période a fonctionné sans relâche et sans personnel pour fournir des colis alimentaires aux assiégés. Pour le moment, la ville elle-même est encore en grande partie vidée de la plupart de ses habitants mais mon frère, qui y est également allé il y a quelques semaines, pense qu’il distingue pourtant plus de circulation automobile, voit quelques personnes dans les rues, quelques magasins déjà ouverts dans l’ancien centre commercial, avec un trafic clairsemé il est vrai. Tout est fermé dès 17 heures.

Dans la cour du Beth Habad, on voit un cratère causé une roquette qui est tombée, qui a heurté les barres d’acier de la clôture, et les clous et les balles qu’elle contenait ont causé des éclats sur le mur de façade.

De là, nous avons continué vers Nova. Les photos des personnes assassinées sont accrochées là-bas sur les arbres de la forêt. Une volée d’oiseaux plane au-dessus des arbres comme si cet endroit était ce qu’il est censé être; beau, paisible, reposant et non pas une vallée de mort dont le sol est imprégné de sang, de douleur et d’humiliation.

Des gens racontent des témoignages de ce qu’ils ont vu ou fait. Nous y avons rencontré Haim Zaka un secouriste de qui est venu spécialement pour nous rencontrer après une réunion avec des enquêteurs de l’ONU à Jérusalem. Il nous a décri les événements de cette horrible journée et des jours qui l’ont suivi, les camions qui se remplissaient de corps, des centaines de corps, et leur apparence, le travail fastidieux d’identification, alors que la zone environnante grouillait encore de terroristes qui se cachaient sous le remblai et entre les arbres.

Haim Zaka et son frère Shimon nous ont aussi accompagnés à Berry fermée normalement aux visiteurs mais il s’était arrangé pour que les gardes nous laissent entrer.

Ce kibboutz est également encore en grande partie abandonné, les maisons souillées et les ruines qui y sont debout contrastent totalement avec les beaux paysages, les vergers et les collines. Haim nous a dit qu’il ne pourra jamais oublier les scènes qu’il a vues là-bas mais tout ce qu’il a vu de ses propres yeux, il ne l’a pas raconté aux membres de la famille des victimes.

Et pour lui, au-delà de la tristesse et du chagrin naturels que nous ressentons tous, le message doit être que cet endroit redeviendra plein de vie.

Yarden, fils du kibboutz, nous a parlé des événements de ce Chabbat. Les combats qui ont duré de longues heures. Son frère Shahar qui a été tué avec son ami dans un combat héroïque et obstiné dans la clinique dentaire où les terroristes s’étaient retranchés, sachant à l’avance que ce bâtiment était plus résistant.

Il a parlé de la trahison des Gazaouis employés par les membres pacifistes du kibboutz, et a parlé des frères Klemenson de la colonie d’Itamar près de Hébron qui ont entendu le matin sz Simhat Torah qu’il y avait une infiltration dans la région et sont venus de leur propre initiative dès l’après-midi pour se battre dans des combats corps à corps de maison en maison et de cour en cour sauvant ainsi plus d’une centaine de membres du kibboutz. À un certain moment dans la matinée, le plus jeune frère a dit à son frère qu’il ne pouvait plus continuer et devait se reposer un quart d’heure ou une demi-heure mais son frère lui dit : allons dans une autre maison. Et quand il est entré dans la maison, il a été touché par une roquette tirée par un terroriste et a été tué.

Le bruit des explosions de l’autre côté de la clôture et le bourdonnement des moteurs des drones ont perturbé le silence strident dans les allées du kibboutz avec le silence de la mort qui en émane de chaque maison et recoin. Nous sommes entrés dans la synagogue, où a récemment eu lieu l’inauguration d’un rouleau de Torah à la mémoire du héros Klemenson et nous sommes partis pour quelques bases militaires le long de la ligne de démarcation.

Nous sommes entrés dans un Achzarit boueux, nous avons observé des meutes de chiens errants sur les levées de terre et les collines de la bande de Gaza, nous avons distribué des paquets de cigarettes et de la soupe chaude aux soldats qui s’apprêtaient à entrer à l’intérieur, mes frères ont mis les Tefilines aux soldats qui le voulaient, puis nous sommes allés dans une autre base près de Nahal Oz où nous avons rencontré la compagnie qui avait perdu cinq de ses membres dans la terrible catastrophe où 21 soldats sont tombés.

Le commandant nous a expliqué qu’il ne les avait pas immédiatement libérés pour rentrer chez eux après cette catastrophe parce que cela aurait provoqué chez au moins certains d’entre eux un syndrome de stress post-traumatique avec tout ce que cela implique. Au lieu de cela, en notre présence, il leur a adressé un discours enflammé sur leur bravoure et leur excellence et certains d’entre eux ont même reçu à cette occasion une promotion militaire avec épaulettes.

Un jeune homme du nom de Mordehai est également arrivé sur les lieux, que j’avais rencontré il y a deux semaines chez mon frère. Son père est le directeur d’un lycée religieux militaire, et il a perdu connaissance le premier jour des combats lorsque le démarreur de son char n’a pas fonctionné et qu’un groupe d’environ 30 terroristes du Hamas qui émergeaient d’un tunnel tentaient de leur tirer dessus. Il avait déjà sorti la goupille d’une grenade, avec l’intention de se suicider plutôt que de tomber entre leurs mains, mais alors, grâce à D.ieu, l’allumeur s’est enflammé et des soldats ont éliminé les terroristes. Pour lui, c’était juste trop tard et tout son corps a été criblé d’éclats. Les médecins étaient convaincus qu’il ne survivrait pas à ses blessures. Il a subi plusieurs opérations mais, grâce à D.ieu, il s’est réveillé et est en rééducation. Que D.ieu envoie un rétablissement complet et rapide.

En tout cas, à la base, il a ému les soldats en racontant ce qu’il avait vécu, a sorti son violon et a joué, entre autres, la mélodie des « Quatre  Bavot » du Admour Hazaken, qui les a fait s’émouvoir.

Les soldats ont également apprécié les tables chargées de salades, de pains et de viandes grillées. Ils ont dansé et chanté et ont sorti leurs cigarettes, et dans le ciel étoilé et une nuit sombre est tombée sur nous et sur les véhicules, les chars, les véhicules blindés.

Nous avons parlé avec les commandants, nous avons vu en temps réel ce qui se passait sur le front sur les écrans du quartier général, le commandant de brigade et son adjoint m’ont dit explicitement, en réponse à mes questions, que le temps nécessaire pour détruire le réseau de tunnels du Hamas prendrait de nombreux mois, voire plus d’un an, et ils ne savent pas s’ils ont la capacité politique de tenir aussi longtemps.

Nous avons fait un bref tour à l’extérieur de la base dans un des Hammers, nous sommes entrés et avons constaté de visu la différence de conditions entre le vieil Achzarit et les Tigers de Givati plus spacieux, qui roulent sur roues et non sur chenilles et chaînes qui ont tendance à tomber en panne et surtout comprennent le système de protection NBC qui protège relativement, mais avec certaines limites.

Nous leur avons souhaité à tous de rentrer chez eux en bonne santé après une victoire éclatante qui amènera le dernier des Gazaouis à réaliser l’erreur amère que Sinwar a commise en décidant de perpétrer le massacre.

Je me suis souvenu de toutes les fois où j’ai souhaité que nous méritions tous très bientôt, avec l’aide de D.ieu, la venue du Machia’h. Serait-ce trop demander ?