par Menachem Posner-chabad.org

A l’écoute de tous, il était aussi « le meilleur ami » de chacun dans sa petite communauté située à l’autre bout de la France, à 900 km de Paris : Perpignan.

Avec seulement quelques centaines de Juifs, cette ville au prestigieux passé (aussi bien du temps du Méiri – commentateur médiéval du Talmud – qu’à l’époque de la résistance au nazisme) a mérité d’être servie pendant 16 ans par une personnalité d’une envergure spirituelle hors du commun : Rav ‘Haïm Morde’haï Pevzner.

On l’appelait affectueusement Mottel ; il était né à Paris en 1980 au foyer de Rav Yossef Yits’hak et Rivka Pevzner, émissaires de longue date du Rabbi.

A l’âge de trois ans, il contracta la méningite et resta deux semaines dans le coma. Pessimistes, les médecins qui s’occupaient de lui préférèrent prévenir les parents de ne pas prier pour sa guérison car, même s’il guérissait par miracle, les séquelles seraient si graves qu’il ne serait jamais indépendant et fonctionnel. Affolée, la famille téléphona au Rabbi qui accorda sa bénédiction et demanda qu’on imprime le livre du Tanya dans l’immeuble où habitait alors la famille. Miraculeusement, Mottel se réveilla et, au bout de quelques jours, récita par-cœur des versets de Torah.

 

Pevzner était un conseiller rabbinique de confiance et un guide pour les individus et les familles.
Le Rav Morde’haï Pevzner était un conseiller rabbinique de confiance et un guide pour les individus et les familles.

 

« Il boita toute sa vie à la suite de cela et devait suivre d’éprouvantes séances de thérapie mais jamais il ne se plaignit, explique son père, directeur de la Cité de l’Éducation Sinaï. Il était toujours joyeux et mettait tout en œuvre pour que les autres le soient aussi ».

Ses amis rappellent combien il chérissait l’étude de la Torah, depuis son plus jeune âge. Il lui arriva fréquemment de publier des articles dans les fascicules imprimés au sein de différentes Yechivot et il annotait des références érudites dans des douzaines de volumes de son abondante bibliothèque qu’il utilisait pleinement.

Il étudia dans les Yechivot de Brunoy, Brooklyn et Melbourne et, à chaque fois, laissa une profonde impression sur tous ceux qu’il croisait. Malgré la barrière évidente de la langue, ce jeune Mottel qui ne parlait alors que le français et le yiddish devint vite l’ami d’ados australiens ne parlant que l’anglais mais qui voyaient en lui un mentor qui les influençait positivement par sa foi simple et son humour communicatif.

 

Alors que ses défis physiques de toute une vie lui auraient donné toutes les excuses pour accepter un travail de bureau à Paris, lui et sa femme, Rochel, ont choisi de partir comme émissaires, et ils ont fondé Loubavitch à Perpignan dans une communauté juive si petite et si unique que beaucoup doutaient qu'ils seraient en mesure de "réussir".

En 2004, il épousa Ra’hel Itkin, issue d’une famille de Chlou’him d’Hamilton, Ontario (Canada). Alors qu’avec ses problèmes de santé il aurait facilement pu prétendre à un confortable travail de bureau à Paris, il choisit avec son épouse de partir en Chli’hout dans cette petite ville perdue du sud-ouest de la France.Les gens apprécièrent rapidement ce jeune rabbin toujours souriant qui irradiait un enthousiasme contagieux. D’une manière ou d’une autre, il savait découvrir des Juifs dans les coins les plus reculés de la campagne française – surtout ceux qui étaient persuadés d’être les seuls Juifs de leur ville ou village.Il sillonnait sans arrêt sa région, d’une Mitsva à une autre. Il refusait de se laisser entrainer dans les basses manœuvres politiciennes et, maintes fois, joua le rôle de médiateur dans des conflits locaux qu’il parvenait à résoudre et qui se terminaient invariablement par la phrase, sincère et spontanée : « Quoi que vous pensiez de moi, je vous aime ! ».

Sa chaleur et sa joie contagieuse étaient célèbres.
Sa chaleur et sa joie contagieuse étaient célèbres.

 

Il se sacrifiait à l’extrême pour les autres, remettant même une fois toutes les matsot qu’il possédait à la maison à de parfaits étrangers qui passaient Pessa’h dans un hôtel voisin. De nombreuses fois, on l’aperçut sortir rapidement de sa maison pour aller visiter, nourrir et réconforter ceux qui en avaient besoin- quelles que soient les conditions météorologiques ou son propre état de santé.

Il y a six ans, on découvrit une tumeur dans sa colonne vertébrale ; celle-ci se métastasa de façon agressive il y a trois ans au point de paralyser le bas de son corps. Il décida de « cracher sur l’Ange de la Mort » et d’intensifier encore ses actions, vitales pour sa communauté comme pour sa famille. Aucune distance ne le dissuadait, aucune personne n’était insignifiante, estimait Rav Morde’haï qu’on voyait franchir des kilomètres sur sa chaise roulante motorisée afin de rencontrer des Juifs auxquels il pouvait faire découvrir la beauté de leur judaïsme.

 

Le rabbin organise une célébration de 'Hanoucca dans ses premières années à Perpignan.
Le Rav Morde’haï organise une célébration de ‘Hanoucca dans ses premières années à Perpignan.

 

Son épouse raconte que, dernièrement, il reçut un appel d’un Juif hospitalisé qui demandait qu’on lui apporte à manger. Bien que souffrant terriblement lui-même, Mottel se déplaça sous la pluie et se retrouva face à un homme apparemment en bien meilleure santé que lui ! L’homme, abasourdi par ce dévouement hors du commun, raconta qu’il avait contacté plusieurs organisations de bienfaisance et des services sociaux mais en vain.

Béni par une formidable mémoire et un amour du prochain inconcevable, il se souvenait des dates d’anniversaire de ses amis et proches ainsi que des dates de décès des parents de ses connaissances et s’empressait d’être le premier à adresser ses pensées affectueuses.

« Il se dévouait pour ses enfants, précise son père et, même dans ses moments les plus difficiles, veillait à réserver des moments pour étudier avec chacun d’entre eux ».

Comme ils habitaient loin des grandes communautés juives organisées, les sept enfants Pevzner (la plus jeune n’a que deux ans) étaient éduqués à la maison ; les plus grands étaient scolarisés sur ordinateur avec le système international mis en place pour les enfants de Chlou’him : Shluchim Online School.

 

Des amis se souviennent qu'il aimait l'étude de la Torah, consacrant des jours et des nuits à l'apprentissage.

Réalisant que sa fin était proche, le jeune rabbin précisa lucidement qu’il souhaitait être enterré dans sa ville d’adoption, Perpignan, plutôt qu’à Jérusalem avec les autres membres de sa famille – y compris son jeune frère bien-aimé Schnéour Zalman décédé en 2015 à l’âge de 22 ans.

Il veilla aussi à trouver un remplaçant : le vendredi avant son décès, il fut soulagé de finaliser l’arrivée de Rav Chmouël Bensoussan et son épouse qui sont devenus le second couple de Chlou’him Loubavitch dans la ville.Ce n’est qu’après avoir été rassuré sur ce point qu’il décéda, le mardi matin veille de Kipour 5783. Comme il l’avait demandé, l’enterrement eut lieu le même jour dans sa ville de Perpignan, en présence d’une foule nombreuse – chacun réalisant qu’il avait perdu son meilleur ami – ce qui était effectivement le cas.

Il laisse derrière lui ses parents et ses grand-mères, son épouse et ses sept enfants :
Mendel, Minda, ‘Haya-Mouchka, Perel, Dina, Léah et Néchi.
Ses frères et sœurs :
Ne’hama-Dina Bluming, Mena’hem-Mendel Pevzner, Avraham Barou’h Pevzner, Alti Majesky, ‘Haya Mouchka Piekarski, ‘Hannie Silver et Aryé Pevzner.

Puissent ses mérites rejaillir sur toute sa famille, sa communauté et tout le peuple juif !

Pour soutenir sa famille : https://www.allodons.fr/Haim-mordehai-pevzner

 

 

Peu de choses donnaient plus de joie au rabbin que d'aider un autre Juif à accomplir une mitsva ; il empruntait les autobus, les trains et tout autre itinéraire accessible aux fauteuils roulants vers les personnes et les familles qu'il avait découvertes au fil des ans.
Peu de choses donnaient plus de joie au Rav Mottel que d’aider un autre Juif à accomplir une mitsva ; il empruntait les autobus, les trains et tout autre itinéraire accessible aux fauteuils roulants vers les personnes et les familles qu’il avait découvertes au fil des ans.