Lors des obsèques du Ramak (Rabbi Moché Kordovero), le Arizal lui rendit un hommage qui fut retranscrit par différents maîtres et notamment Rabbi Yehonatan Aybéchitz, le ‘Hida et le Chlah Hakadoch.

En 1981 Chabbat Paracha Matot le Rabbi prononça un discours durant lequel il commenta cet hommage rendu par le Arizal. Ce discours fut corrigé par le Rabbi en 1983 (Likoutei Si’hot Vol 24 page 132) ; en voici quelques extraits :

 

L’hommage rendu par le Arizal est partie intégrante de la Torah orale, laquelle est un enseignement pour chacun d’entre nous. Même celui qui n’a pas atteint le niveau spirituel du Arizal et du Ramak peut en tirer une leçon dans le service Divin.

Voici les paroles que prononça le Arizal (relaté dans le Yéarot Hadevach de Rabbi Yehonatan Aybéchitz) : «Quand un homme fautif sera coupable de la peine capitale». Ce verset peut se traduire différemment : quand on ne peut pas condamner un homme (‘Hèt qui signifie la faute a également pour sens le manque) à la mort, car il n’a point de fautes, «et que tu l’auras attaché au gibet» – c’est-à dire qu’il mourra à cause du pêché de l’arbre de la connaissance avec Adam et Eve. La mort fut alors décrétée par D.ieu de Son initiative et selon la raison pour laquelle Il créa le monde.

Selon le Rabbi, l’enseignement du Arizal reprend celui de nos Sages (traité Chabbat 52b, Baba Batra 17a) : «quatre personnes sont décédées à cause du serpent ». Ces quatre personnes n’ont pas commis de pêchés et ne sont mortes qu’à cause du serpent et la faute de l’arbre de la connaissance (qui se déroula par le conseil du serpent) : alors «la mort fut décrété sur tous les descendants d’Adam Harichone ». Il en est de même pour Rabbi Moché Kordovero dont la mort fut rendue possible uniquement à cause de l’arbre de la connaissance.

Il faut distinguer les deux expressions :

  1. «le conseil du serpent»
  2.  «l’arbre de la connaissance».

«Le conseil du serpent» est une incitation à commettre la faute.

«L’arbre de la connaissance » est un arbre dans lequel il n’y point de manquement. Bien au contraire, selon le sens littéral du verset – comme l’explique Rachi, il s’agit du figuier qui est une des espèces par lesquelles la terre d’Israël est louée ; quant à l’arbre lui-même, il permet d’atteindre la sagesse (sauf si on le consomme avant l’heure).

Cela signifie que « le conseil du serpent » tel que la Guémara (la partie révélé de la Torah) le relate, traite de la mort concrète.

Par contre la mort qui survient par « l’arbre de la connaissance », tel que le Arizal l’enseigna à propos du Ramak, est différente. Ces deux sommités eurent tous deux un rôle majeur dans le développement des secrets de la Torah.

En effet, selon les explications profondes de la Torah, il s’agit ici de l’épreuve de l’arbre de la connaissance devant laquelle D.ieu place l’homme, de Son initiative et pour qu’il accomplisse sa mission, c’est-à-dire le but pour lequel D.ieu créa le monde.

Bien que nous puissions nous demander : « Qui sommes-nous pour prétendre être en mesure d’évaluer les niveaux sublimes de Rabbi Moché Kordovero et du Arizal ? », malgré tout, chacun est capable d’en comprendre et d’en saisir ne serait-ce qu’« un petit bout ».

Le pêché originel n’a pas entaché l’essence de l’âme !

Le Rabbi tire de cela un enseignement extraordinaire : « Par le conseil du serpent » : lorsqu’un homme ne possède pas de défaut hormis le fait qu’il ne s’est pas encore entièrement défait de la « souillure du serpent ». Cette poussière ne peut en réalité salir que le niveau inférieur de l’âme, relatif à l’homme et à ses capacités externes, dans lesquelles la perfection n’est possible que chez certains individus particuliers.

Par contre : « La faute qui porte préjudice pour la peine capitale… (en réalité) il est impossible de rendre l’homme coupable », puisque la faute ne peut atteindre les profondeurs de l’âme du Juif. En chacun – peu importe son niveau et sa situation – l’âme ne saurait être atteinte par aucune souillure. Ce phénomène se traduit même dans le domaine de la Halakha en ce qui concerne la volonté de l’homme.

De plus, le Rabbi ajoute : « Le conseil du serpent » a pu entraîner chez le Juste un certain manque, qui cause par la suite la mort. Celle-ci n’est en aucun cas la conséquence des actes du Tsadik mais uniquement le résultat de la faute du serpent.

Certes, cette tache atteint la partie inférieure du Juif mais certainement pas son intégrité. C’est la raison pour laquelle, lorsque l’âme rayonne en lui et l’éclaire totalement, il ne connaît pas le conseil du serpent.

C’est en cela que consiste l’enseignement du Arizal : « Tu le feras dépendre de l’arbre » signifie que la mort survient seulement par la volonté du Tout-Puissant (par l’arbre de la connaissance).

À présent, la notion de la mort prend une toute autre dimension chez le Tsadik. Lorsqu’elle est causée par le serpent, elle n’est pas positive. Par contre, lorsqu’elle survient uniquement par la volonté Divine, elle apporte au Tsadik une élévation incomparable par rapport à son propre niveau.

Tout ceci est en lien avec Rabbi Moché Kordovero et le Arizal qui ont révélé les profondeurs de la Torah, lesquelles sont étroitement liées aux tréfonds de l’âme, nettement supérieurs au conseil du serpent, puisqu’il est bien connu que la partie ésotérique de la Torah représente l’arbre de vie, supérieur à l’arbre de la connaissance. Le Arizal a ainsi tranché pour lui-même.

Edition : Meïr lubecki – Beth Habad Paris 3eme
Traduction : Feiga Lubecki Adaptation : Levi Benech