Les chapitres 13 à 17 de la Paracha de Bechala’h retracent une période charnière de l’histoire du peuple hébreu, depuis sa sortie physique d’Égypte jusqu’à ses premières épreuves en tant que nation libre. Ce récit fondateur dépeint la transition dramatique d’un peuple d’esclaves vers une nation guidée par D.ieu, à travers des événements miraculeux et des défis qui façonneront son identité. De la traversée spectaculaire de la Mer des Joncs à la première bataille contre Amalek, en passant par l’institution de lois fondamentales comme le Chabbat, ces chapitres illustrent la mise en place progressive d’une relation unique entre D.ieu et son peuple, marquée par des interventions divines directes et l’apprentissage parfois difficile de la confiance et de la foi.

 

1. LA SORTIE D’ÉGYPTE ET LE CHEMIN DU DÉSERT

Dans sa sagesse divine, l’Éternel choisit un itinéraire détourné pour le peuple d’Israël, évitant délibérément le chemin direct par le pays des Philistins. Cette décision stratégique visait à protéger un peuple nouvellement libéré des épreuves d’une guerre prématurée qui aurait pu le décourager et le pousser à retourner en Égypte. La présence divine se manifeste de manière tangible à travers une colonne de nuée le jour et une colonne de feu la nuit, guides constants du peuple. Ce départ est également marqué par un acte de fidélité historique : Moïse emporte les ossements de Joseph, accomplissant ainsi le serment fait aux ancêtres. La première étape de ce voyage s’achève à Étam, aux confins du désert, marquant symboliquement le passage de la civilisation au désert.

2. LA POURSUITE DE PHARAON

Le drame se noue lorsque Pharaon, regrettant la perte de ses esclaves, décide de poursuivre les Israélites. Sa réaction illustre le combat entre la volonté divine et le pouvoir humain. La mobilisation égyptienne est impressionnante : 600 chars d’élite, accompagnés de l’ensemble de l’armée, témoignent de la détermination de Pharaon à reprendre le contrôle de son ancien peuple d’esclaves. Les Israélites se retrouvent dans une situation apparemment désespérée, pris en étau entre l’armée égyptienne et la mer. Leur réaction de peur et leurs reproches à Moïse révèlent la fragilité de leur foi naissante et les séquelles de siècles d’esclavage.

3. LE MIRACLE DE LA MER DES JONCS

Le passage de la Mer des Joncs représente le point culminant de la libération d’Égypte. Face à la panique du peuple, D.ieu ordonne à Moïse d’étendre son bâton sur la mer. Le miracle qui s’ensuit est double : d’abord, la séparation surnaturelle des eaux créant un passage à sec, puis l’intervention de la colonne de nuée qui s’interpose entre les Israélites et les Égyptiens, protégeant les premiers tout en désorientant les seconds. La traversée elle-même est décrite avec des détails saisissants : les eaux dressées « comme une muraille à leur droite et à leur gauche », soulignant le caractère extraordinaire de l’événement. L’anéantissement final de l’armée égyptienne, lorsque les eaux reprennent leur place, marque la rupture définitive avec l’esclavage.

4. LE CANTIQUE DE LA MER

Cette victoire miraculeuse inspire un chant qui deviendra l’un des textes poétiques les plus célèbres de la Bible. Le Cantique de la Mer, composé par Moïse, est à la fois une célébration de la victoire et une profession de foi. Les images poétiques qu’il emploie – « Il a jeté dans la mer cheval et cavalier » – sont devenues emblématiques. Le chant ne se contente pas de décrire le miracle passé, il projette également ses conséquences futures sur les nations environnantes. La participation spéciale des femmes, menées par Myriam, avec danses et tambourins, souligne le caractère collectif et joyeux de cette célébration, marquant la naissance d’une tradition de louange qui perdure.

5. LES PREMIÈRES ÉPREUVES DU DÉSERT : L’EAU

Le périple dans le désert commence par une série d’épreuves liées à l’eau, élément vital. À Marah, les eaux amères deviennent potables grâce à l’intervention divine à travers un morceau de bois, miracle qui s’accompagne de l’établissement des premières lois. Ce moment marque le début de l’apprentissage de la confiance en D.ieu. L’arrivée à l’oasis d’Élim, avec ses douze sources et soixante-dix palmiers, offre un répit symbolique, les nombres évoquant les douze tribus et les soixante-dix anciens d’Israël. La nouvelle crise de l’eau à Refidim, résolue par le miracle du rocher frappé, confirme le motif récurrent de l’épreuve suivie de la délivrance divine.

6. LA MANNE ET LES CAILLES

L’épreuve de la faim dans le désert révèle à nouveau la fragilité de la confiance du peuple, qui regrette les « marmites de viande » d’Égypte. La réponse divine est double : des cailles le soir et la manne le matin, instaurant un nouveau régime alimentaire miraculeux. La manne, décrite comme « fine comme le givre », devient le symbole de la providence divine quotidienne. Son mode de collecte établit des principes fondamentaux : la confiance quotidienne en D.ieu, l’égalité devant la subsistance (chacun recevant un omer), et surtout l’institution du Chabbat. La double portion du sixième jour et l’absence de manne le septième jour constituent la première expérience concrète du repos hebdomadaire. La conservation d’un omer de manne dans un flacon, devant l’arche, servira de témoignage pour les générations futures.

7. L’ATTAQUE D’AMALEK

L’affrontement avec Amalek à Refidim marque la première bataille militaire des Israélites en tant que peuple libre. Cette guerre révèle une nouvelle dimension de leur relation avec D.ieu : la nécessité de combiner action humaine et intervention divine. Josué mène le combat physique tandis que Moïse, sur la colline, maintient ses mains levées vers le ciel avec l’aide d’Aaron et Hour. Cette scène illustre l’interdépendance entre l’effort terrestre et le soutien céleste. La victoire n’est obtenue que par la conjugaison de ces deux dimensions, établissant un modèle pour les futures batailles d’Israël.

8. LES CONSÉQUENCES SPIRITUELLES

L’ensemble de ces événements établit des fondements durables pour l’identité d’Israël. La guerre contre Amalek devient paradigmatique : le décret divin d’une guerre perpétuelle contre ce peuple symbolise la lutte éternelle contre les forces qui s’opposent au plan divin. La construction d’un autel commémoratif, nommé « L’Éternel est mon miracle », et l’ordre d’écrire ces événements instituent une mémoire active de ces expériences fondatrices. Plus profondément, ces chapitres établissent le modèle d’une relation unique entre D.ieu et Israël, caractérisée par des cycles d’épreuve, de doute, d’intervention divine et de renouvellement de la foi. Cette période initiale du désert pose ainsi les bases spirituelles et pratiques de l’alliance qui sera formellement conclue au Sinaï.