Avec un certain recul je réalise pour l’avoir vécu l’enseignement du Rabbi selon lequel on doit « aimer un Juif que l’on ne connait pas ». C’était tard dans la nuit, je me levais pour ouvrir la porte à mon épouse qui revenait d’une Hitvaadout à Kfar ‘Habad. Son visage était lumineux et souriant, et lorsque je lui demandai des détails de cette soirée dont la douce lumière reflétait sur son visage elle me tendit son téléphone et me fit voir une vidéo qu’elle avait filmée. Je regardai quelques extraits et tomba en arrêt en écoutant parler Mme Haya Nisselevitch qui disait avec une détermination et une force peu commune que « les femmes françaises n’avaient pas fait l’Alya par peur de l’antisémitisme. Elles n’avaient pas fui la France par peur d’affronter tout ce qui peut être un obstacle à une vie basée sur la Torah et les Mitsvoth. Non, ce n’était pas pour cela, elles étaient venues en Israël pour insuffler à la Terre, l’esprit de la Révolution française dans le domaine de la sainteté selon les directives et les enseignements du Rabbi ».

Je fus impressionné par ces propos. Peut-être que pour certains ils se fondaient dans la richesse du discours de Mme Nisselevitch mais à mes yeux ils avaient quelque chose de nouveau. Ils exprimaient un attachement au Rabbi particulier. Les paroles du Rabbi suivaient un chemin qui les menait à des pensées des paroles et des actions concrètes. Ces paroles ne restaient pas enfouies dans les livres ni dans l’esprit de Mme Nisselevitch qui les avait entendues. Le Rabbi les avait exprimées et elle les exprimaient à son tour à toutes les femmes présentes en éveillant dans leurs cœurs le désir de la Délivrance et du dévoilement du Machia’h.

Aussi, quelle ne fut pas ma surprise en apprenant que le Rav Eliézer Nisselevitch et son épouse « Mora-‘Haya » se trouvaient à présent chez ma mère qui les recevait pour la nuit à Jérusalem. Le lendemain je me rendais avec mon épouse à leur rencontre. C’était la première fois que je rencontrai le Rav Eliézer.

Avec une certaine crainte de me trouver en présence de tels Chlou’him du Rabbi je dis timidement bonjour en entrant dans la pièce où se trouvaient le Rav Eliézer, son épouse et leur fils qui était venu leur rendre visite. Quand il me vit le Rav Eliezer s’approcha de moi, m’embrassa, me prit les mains et commença à chanter et à danser avec moi. Tout en dansant je regardai son visage et commençai à peindre mentalement son portrait. Le portrait d’un ‘Hassid du Rabbi qui chante et qui danse au petit matin avec un juif qu’il voit pour la première fois. Difficile de ne pas penser au Baal Chem Tov qui nous enseigne « d’aimer un Juif que l’on ne connait pas » ou de ne pas penser au chapitre 32 du Livre du Tanya de l’Admour Hazaken dans lequel il est dit que du fait que l’Essence de l’âme de chaque Juif est enracinée dans l’Essence divine nous sommes tous des frères. En fait, qu’il s’agisse d’un Niggun ou d’une danse, ou des deux à la fois, ils vous emportent vers la Délivrance, vers la vie véritable.

L’Admour Hazaken définit le chant comme la plume du cœur et le Rabbi Rachab écrit que « chaque serrure a une clé qui lui est propre, mais un serrurier possède un passe-partout qui lui permet d’ouvrir toutes les portes, le chant est ce passe-partout ».

Le Rav Eliézer possédait ce passe-partout qui ouvre les portes. Toutes les portes. Il doit certainement tenir cela de ses parents, de son attachement au Rabbi et à l’évidence de son étude de la ‘Hassidout et de la tradition des ‘Hassidim ‘Habad.

Peu après, j’exprimais à son épouse ma surprise et ma satisfaction pour avoir entendu les propos qu’elle avait tenu la veille et à cela elle me répondit : « évidemment ! »

Insuffler l’esprit de la Révolution française dans le domaine de la sainteté en Israël était pour elle une évidence, une réalité que l’on devait faire exister à tout moment de notre vie. Quand il entendit la réponse de son épouse le Rav Eliézer éclata d’un rire que je n’oublierais jamais. C’était un rire qui était rempli de toute la reconnaissance et de toute l’admiration qu’il avait pour son épouse.

En une seule rencontre le Rav Eliézer m’ouvrit de nouvelles portes, et quelques années plus tard lors du Kinous-ha-Chlou’him, lorsque je le rencontrais une seconde fois, il m’en ouvrit d’autres encore. Pendant la nuit de Chabbat je me trouvais attablé parmi tous les Chlou’him dans une immense salle. Lorsque je le vis s’approcher de moi vers la fin du repas. Il me proposa de l’accompagner à un Farbrenguen avec son fils qui était avec lui.

Sans hésitations je me levai et nous nous rendîmes au Farbrenguen. Après avoir quitté le Farbrenguen, nous avons marché assez longtemps ensemble dans les rues de Crown-Heights. Je ne me souviens plus à présent de tout ce qu’il m’a dit. Je ne me souviens que de l’impression qu’il me faisait. Je garde l’image de son bras qui prit le mien et le garda tout en marchant et tout en me parlant.

Il y a une seule chose dont je me souviens, une chose qu’il m’a dite peu avant de me quitter. Il m’a dit que je devais toujours m’asseoir au Farbrenguen et que de cette façon mes enfants se marieraient sans difficultés aucune. C’est la dernière chose que j’ai entendu de lui. Mais je suis certain que toutes les paroles qu’il m’a dites, toutes ces paroles que je suis incapable de retransmettre à présent vivent en moi et m’influencent jusqu’à aujourd’hui, car comme l’a dit le Rabbi : ‘les paroles dites avec le cœur pénètrent dans le cœur et y font leur effet’.

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Paracha Nasso

La réalisation d’un tableau commence par des croquis rapides, des études préparatoires, des ébauches qu’il dessine et réunit dans un carnet de croquis. C’est par rapport à cela que la ‘Hassidout compare la Torah au ‘carnet de croquis’ d’un Artiste, car de la même façon que l’Artiste regarde dans son carnet les premiers jets de son œuvre future, ‘D.ieu a regardé dans la Torah avant de créer le monde’.

Ainsi, la Torah a précédé le monde car c’est à partir d’Elle que D.ieu a créé le monde, et dans le Dvar Mal’hout sur la Paracha Nasso le Rabbi met l’accent sur la déclaration de la Torah selon laquelle’L’Eternel a regardé dans la Torah avant de créer le monde’ car il est écrit que dans les temps messianiques le Saint béni soit-Il dévoilera la Torah ‘Hadacha (la Torah nouvelle) ainsi qu’il est dit : ‘Une Torah nouvelle sortira de Moi’.

A la lumière de ce qui vient d’être dit, il apparaît que du fait que le Saint béni soit-Il a regardé dans la Torah pour créer le monde, le dévoilement de la Torah ‘Hadacha s’accorde au dévoilement d’un monde nouveau, ainsi que la déclaré Lui-même L’Eternel : ‘Comme ces cieux nouveaux et comme cette terre nouvelle que Je ferai naître dureront devant Moi, ainsi subsisteront votre descendance et votre nom’ (Ychaya, 66, 22).

Le Rabbi explique que les ‘cieux nouveaux’ et la ‘terre nouvelle’ que L’Eternel fera naître lors de la Délivrance représentent le dévoilement de la Parole divine qui est à l’origine même de la Création du ciel, de la terre, et de tout ce qu’ils contiennent.

Car à présent, durant l’exil, nous ne voyons pas la Parole divine et c’est à ce sujet que l’Admour Hazaken écrit dans le Livre du Tanya :

‘S’il était permis à l’œil de voir et de se rendre compte de la force vitale (la Parole divine) et de la spiritualité contenue dans toute chose créée, et qui prenant leur source dans ‘ce qui émane de la bouche de D.ieu’ et de ‘Son souffle’, y coulent constamment, alors la matérialité de la créature cesserait d’être perçue par nos yeux, celle-ci étant complètement annulée par rapport à la force vitale et la spiritualité qui sont en elle’ (Tanya, Chaar Ha Y’houde vé Ha Emounah, chapitre 3).

Le dévoilement de la Torah ‘Hadacha représente le dévoilement de l’Essence divine, comme ce fut le cas lors du Don de la Torah sur le Mont-Sinaï au sujet duquel il est dit : ‘Et tout le peuple vit les Voix’ (Yitro, 20, 15).

Lors de la Délivrance ‘La Voix de l’Eternel’ (‘la force vitale et la spiritualité’) qui est pour l’instant cachée nous apparaîtra. Un peu comme si nous disions que le monde tel qu’il est à présent est comme un tableau qui n’est pas signé, alors que dans les temps messianiques l’œuvre divine portera La signature du Saint béni soit-Il, c’est-à-dire qu’il apparaîtra à nos yeux que ‘toute la Création vient du souffle de Sa bouche’.

Dès-lors, nous pouvons comprendre la déclaration des Sages selon laquelle ‘la Torah que l’homme étudie à l’heure actuelle n’est rien (‘hével’) en comparaison à la Torah que nous enseignera le Machia’h’.
Le mot hébreu ‘hével’ exprime le néant, et l’emploi de ce mot par les Sages met l’accent sur la grandeur de la Torah qui sera dévoilée par le Machia’h, et au sujet de laquelle l’Eternel déclare : ‘Une Torah nouvelle sortira de Moi’, avec l’aide de D.ieu très bientôt et de nos jours.