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À l’issue d’une journée riche en rebondissements, la procédure de destitution a ultimement connu son dénouement prévu : un deuxième acquittement en à peine plus d’un an. Mais des défections dans les rangs républicains ont malgré tout fait du verdict un précédent bipartisan. Au terme d’un procès d’à peine cinq jours, le Sénat a jugé Donald Trump coupable à 57 voix contre 43.

La fin du scénario était écrite d’avance dans ce deuxième procès de l’ancienne vedette de téléréalité, qui a une fois de plus bénéficié de la clémence du Sénat et de la majeure partie du camp républicain, resté soudé derrière l’ancien président.

Le seul suspense qui subsistait résidait dans le nombre de républicains qui rompraient la ligne de parti – s’il y en avait – et, si oui, lesquels.

Les républicains Mitt Romney, seul élu de son parti à avoir voté pour destituer Donald Trump, l’an dernier, ainsi que Susan Collins, Lisa Murkowski, Ben Sasse et Pat Toomey étaient les plus susceptibles de le faire.

Mais Bill Cassidy et Richard Burr se sont joints à leur cinq collègues et aux 50 démocrates, qui, eux, ont tous jugé l’ancien occupant de la Maison-Blanche coupable.

C’était toutefois trop peu pour un verdict de culpabilité, qui aurait nécessité l’appui des deux tiers des 100 sénateurs, soit 67.

Malgré l’acquittement, le verdict constitue un précédent historique : jamais autant d’élus n’avaient condamné un président – ancien dans ce cas-ci – issu de leurs propres rangs.

L’an dernier, lors du procès lié au dossier ukrainien, Mitt Romney était devenu le tout premier élu de l’histoire américaine à voter pour destituer un président de sa formation.

Le nom du leader de la minorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell, a semblé un temps figurer sur la liste des sénateurs susceptibles de se retourner contre l’ex-président. S’il restait un doute, il a été dissipé en matinée, quand les médias ont fait état d’une lettre envoyée à son caucus annonçant sa décision d’acquitter Donald Trump.

Après le verdict, il a expliqué sa décision par le fait que l’ancien président républicain n’était plus en poste, tout en servant une condamnation sans appel de Donald Trump.

Il ne fait aucun doute – aucun – que le président Trump est concrètement et moralement responsable d’avoir provoqué les événements [du 6 janvier]. Il n’y a aucun doute à ce sujet. Les personnes qui ont pris d’assaut ce bâtiment pensaient qu’elles agissaient selon les souhaits et les instructions de leur président.

Mitch McConnell, leader de la minorité républicaine au Sénat

Il ne s’en est pas encore tiré. Pas encore, a-t-il soutenu. Nous avons un système de justice pénale dans ce pays. Nous avons des procès civils. Et les anciens présidents ne sont pas à l’abri d’une responsabilité de l’un ou l’autre.

Plusieurs républicains avaient indiqué que des témoignages n’infléchiraient pas leur position. À l’instar de Mitch McConnell, ils affirmaient que le procès était inconstitutionnel, puisque Donald Trump n’est plus président.

Un pavé dans la mare

Dans la foulée d’un reportage de CNN sur des propos de Donald Trump exprimés pendant l’assaut du Capitole, diffusé vendredi, les responsables de la mise en accusation avaient d’abord indiqué qu’ils voulaient entendre au moins un témoin, ce qui a entraîné un vote des sénateurs sur la question.

Leur requête a été acceptée à 55 voix contre 45.

Avant la suspension des travaux jusqu’à 12 h 30, une confusion est survenue au cours du vote. Un élu a demandé sur quels témoignages le Sénat votait exactement. Le président pro tempore du Sénat, c’est-à-dire le doyen des sénateurs de la majorité, le démocrate Patrick Leahy, qui préside le procès, n’a pas dissipé la confusion : les règles ne permettent pas de débattre à ce moment, a-t-il répondu.

Pendant le bref débat sur la déposition de témoins, Michael van der Veen, l’un des avocats de l’ex-président, a affirmé qu’une telle demande était injustifiée, parce que les propos attribués à Donald Trump ne sont pas liés à l’accusation d’incitation à la violence. Il a même menacé d’appeler à comparaître la présidente de la Chambre des représentants Nancy Pelosi et la vice-présidente Kamala Harris.

Lorsqu’il a lancé qu’il convoquerait les témoins en personne dans son bureau de Philadelphie, il a déclenché les rires de sénateurs. Je n’ai ri d’aucun de vous, a-t-il réagi.

Selon CNN, la défense a ensuite évoqué une liste de 300 témoins à convoquer.

Le nouveau développement risquait de bouleverser les plans des sénateurs, qui ne devaient pas siéger la semaine prochaine.

Derrière ce rebondissement, une républicaine : Jaime Herrera Beutler

Le développement inattendu survenu en début de journée est dû à la sortie publique d’une représentante républicaine, Jaime Herrera Beutler, qui a accordé la veille une entrevue au réseau CNN.

Elle a fait part d’un appel tendu fait à Donald Trump par le leader de la minorité républicaine à la Chambre des représentants, Kevin McCarthy, qui implorait son interlocuteur d’intervenir au moment de l’assaut du Capitole.

Eh bien, Kevin, je suppose que ces gens sont plus contrariés que toi par l’élection, aurait répondu l’ancien président.

Vendredi soir, Jaime Herrera Beutler, qui a appuyé la mise en accusation de Donald Trump il y a quelques semaines, a confirmé sur Twitter la véracité des faits avancés dans l’article et pressé les collaborateurs de l’ex-président de sortir de leur mutisme.

Aux patriotes qui étaient avec l’ancien président pendant ces appels, ou même avec l’ex-vice-président : si vous avez quelque chose à ajouter, il est temps de le faire.

Jaime Herrera Beutler, représentante de l’État de Washington