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Chabad.org, traduit par Hassidout.org
Johnny Jablon a commencé à préparer sa Bar-Mitsva en Pologne à l’été 1939. Un mois plus tard, les allemands ont envahi le pays. Maintenant âgé de 92 ans, Jablon est retourné en Pologne pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale pour célébrer sa Bar- Mitsva.
Né le deuxième des trois fils d’une famille juive assimilée à Cracovie, Johnny Jablon a passé les 11 premières années de sa vie pleinement intégré dans la société polonaise. Alors que beaucoup de juifs plus traditionnels vivaient dans le quartier de Kazimierz, les Jablons vivaient dans une petite rue de banlieue, à côté de Planty Park, le grand jardin qui entoure la vieille ville de Cracovie, où se dressaient autrefois les murs de la ville.
« Jusqu’à l’age de six ans, je ne parlais que le polonais », se souvient Jablon. « J’étais le seul juif de ma classe. Pendant six ans, les élèves de ma classe ne m’ont rien appelé d’autre que «sale juif». »
Malgré cela, les Jablons se considéraient comme des Polonais juifs. Ils se considéraient comme des citoyens polonais à part entière.
À l’été 1939, Jablon apprenait à nager dans la nouvelle piscine publique de Cracovie et à passer du temps avec sa tante et ses cousins dans un camp d’été à Rytro, une station balnéaire nichée dans les montagnes de Tatras en Pologne. Ses parents ont embauché un rabbin pour le preparer à sa Bar-Mitsva. Quand la guerre éclata en septembre, ses études s’arrêtèrent et le cours de sa vie fut changé pour toujours. « En un jour, j’ai tout perdu », dit-il.
Jablon passa les années de guerre du ghetto de Cracovie aux camps de concentration de Płaszów, Auschwitz et Mauthausen. Quand la guerre a finalement pris fin, il avait perdu sa mère, son père et ses frères, ainsi que 16 tantes et oncles, et de nombreux cousins et cousines.
Arrivé à Montréal, Jablon s’est marié, a ouvert un commerce d’électronique et a commencé une nouvelle vie. Il n’a jamais prévu de retourner en Pologne. « Comment pouvais-je y retourner? » dit-il. « Je n’avais plus personne. Je ne voulais pas retourner voir les cendres de ma famille. »
En mai dernier, lorsque sa femme, Sally, est décédée, Jablon a commencé à réfléchir sur sa vie avant la guerre. Sur l’insistance de ses amis, il a décidé qu’il était peut-être temps de retourner en Pologne en participant à la « Marche des Vivants ».
La Marche des Vivants, ou Marche de souvenir et d’espoir, est un programme éducatif dynamique qui convie les étudiants du monde entier en Pologne, où ils explorent les lieux-souvenirs de la Shoah. Le Jour du souvenir de la Shoah (Yom HaShoah), les participants effectuent la marche d’Auschwitz à Birkenau, le plus grand complexe concentrationnaire construit durant la Seconde Guerre mondiale.
C’est à ce moment-là que Jablon rencontra un émissaire Habad à Montréal, le Rav Pinny Gniwisch. Le Rav Pinny Gniwisch est directeur de «Chabad Living Legacy», un organisme affilié au mouvement Loubavitch qui organise depuis 13 ans la «Marche des Vivants» en Pologne. Cette année, il a été le rabbin officiel de la délégation montréalaise.
Lors d’un déjeuner avec le Rav Pinny Gniwisch, avant le voyage, Jablon a mentionné sa Bar-Mitsva interrompue à cause de la guerre.
« Il était catégorique. Au début, il ne voulait pas mettre les Tefilines« , note le Rav Gniwisch. « La conversation s’est torientée vers le sujet de sa révolte. »
« Ce sera votre revanche », lui dit le Rav Gniwisch. « Vous vous devez de récupérer ce qui vous a été volé. » Jablon a finalement accepté l’idée. « Il était maintenant d’accord de mettre les Tefilines, mais en Pologne. »
Sa Ber-Mitsva a eu lieu à Rosh Hodech (le premier jour du mois juif) du mois d’Iyar, dans la fameuse synagogue de Tykocin, l’une des rares synagogues historiques en Pologne.
« C’était complètement surréaliste », dit le Rav Gniwisch. « Nous étions dans une synagogue qui avait autrefois 4000 membres – tous assassinés en une journée. Pourtant, 79 ans plus tard, c’est dans cette synagogue qu’un survivant « à récupéré » ce qui lui avait été volé. »
Pour Jablon, le Bar Mitsva était le point culminant de son voyage. « J’ai ressenti tellement d’émotions. Tout le monde autour de moi pleurait. Je me sentais tellement excité par ce qui m’arrivait, et triste aussi que personne de ma famille ne puisse le voir. »
Après que Jablon ait mis les Tefilines pour la première fois et ait été appelé à la Torah , tout le monde dans la synagogue a commencé à danser.
« C’était autre chose », dit-il. « Voir tous ces jeunes autour de moi danser. C’est ainsi que l’on lutte contre l’antisémitisme. C’est en montrant notre fierté juive. »