La nouvelle, tombée à l’issue du Chabbat, a aussitôt fait l’effet d’un séisme au sein de la communauté Habad de Paris, et bien au delà.
Hospitalisé le jeudi matin, et placé sous assistance respiratoire, le Rav André Touboul a succombé à une crise cardiaque, 48 heures plus tard, Chabbat 21 Mars, au matin.
Père de neuf enfants, il se savait touché par le virus depuis une dizaine de jours et avait été diagnostiqué positif au Covid-19 une semaine auparavant. Un décès foudroyant qui laisse la communauté dans le plus grand désarroi.
A 64 ans, le Rav André Touboul, né à Marseille, professeur de Mathématiques, était le directeur estimé et respecté de tous, depuis plus de 35 ans, des Institutions scolaires Beth Haya Mouchka, situées dans le 19ème arrondissement de Paris.
Réputé pour son excellence, l’établissement comprend 2600 élèves, de la crèche à la terminale, ce qui en fait l’école juive la plus grande d’Europe. Or, tous les élèves étaient en quelque sorte les enfants du Rav Touboul, dont il connaissait non seulement le prénom, mais aussi le parcours, les progrès effectués, tant sur le plan scolaire qu’au niveau spirituel, avec l’amélioration des traits de caractère, ce travail des Middot, si précieux aux yeux des éducateurs, enseignants et parents. Un modèle pour tous.
« Je pense à sa gentillesse et à son professionnalisme » écrit Anne Hidalgo, Maire de Paris, « tout mon soutien et mon affection
à sa famille, à ses amis et à toute la communauté scolaire de Beth Hanna. »
D’autant que sa disparition brutale en pleine crise de coronavirus a catalysé d’un coup toutes les craintes et angoisses liées à cette épidémie mondiale. Beaucoup croyaient que seules les personnes très âgées ou fragilisées pouvaient en mourir. Ce qui est en partie vrai, d’un point de vue statistique. Hélas, le coronavirus peut frapper tout un chacun. Pour l’heure, on le sait, seul un confinement total et des mesures sanitaires très strictes peuvent enrayer l’épidémie, au niveau mondial.
La contagion est telle, qu’en cas d’hospitalisation d’un proche malade, ou pire du décès, la famille ne peut en aucune façon se rendre à son chevet, ni même pour la veillée. De plus en raison des mesures de confinement national, les obsèques se déroulent en présence de dix personnes seulement. « Sinon, nous serions au moins 20 000 personnes à nous rendre à l’enterrement », déclare le Rav Léon Madar de Marseille, un ami personnel du Rav Touboul, et directeur d’une école Habad dans la cité phocéenne. « C’était un homme exceptionnel. D’une grande intelligence. Il nous a inculqué la passion de l’enseignement. Je l’ai eu au téléphone le mercredi soir, il allait bien malgré le virus. Ses conseils en matière d’éducation étaient de véritables remèdes. Il était tant attaché au Rav Azimov et au Rabbi. Il nous donnait des conseils judicieux. Pour lui, aucune situation n’était perdue, chaque enfant était important. Il nous laisse un vide énorme ».
Même détresse chez le président du Consistoire régional Alpes Provence, Zvi Ammar : « C’était un homme d’un dévouement exceptionnel. Il est brutalement mort de ce maudit coronavirus. Je suis extrêmement peiné. Que D.ieu repose son âme ». Et d’insister à l’attention de tous : « S’il vous plait, faites attention à vous, la situation est grave, appliquez à la lettre les consignes. La vie c’est la chose la plus sacrée selon notre sainte Torah ». Le dernier enseignement que Rav André Touboul, zal, semble nous léguer.
ISABELLE AZRIEL