Le Dr. Its’hak Kulski est un Hassid Habad qui exerce en tant que radiologue à Paris. Il est également le Rav de la synagogue du Beth Loubavitch de la rue Lamartine. Il est l’un des trois frères, tous médecins hassidiques en France, et le fils du chirurgien urologue (par ailleurs, détenteur de nombreuses spécialités chirurgicales), le Dr Marcel Meir Elazar Kulski ע’ה, qui a bénéficié de nombreux contacts avec le Rabbi.

 

Je suis né en France et ai débuté mes études dans une école juive. Par la suite, j’ai intégré le Heder du Beth Loubavitch. Mon père souhaitait que je complète mes études séculaires que j’avais entamées ; ainsi, deux fois par semaine, je prenais des cours particuliers en français et en mathématiques. A 15 ans j’ai obtenu mon baccalauréat (série c) etudiant uniquement les matières à haut coefficient en diagonal. Après cela, j’ai poursuivi mes études à la Yéchiva Loubavitch de Brunoy, et également dans d’autres Yéchivot à Manchester, dans la vallée de Megiddo en israel a Migdalia Haemek et à « Ohalei Torah » à New York.

À la fin de mes années à la Yéchiva, je me trouvais dans une situation d’indécision : devais-je continuer mes études à la Yéchiva et ensuite partir en Chli’hout, ou m’orienter vers des études de médecine? Pour comprendre cette indécision, il faut que je parle d’abord un peu de mon père.

Plus Chaliah que médecin

Mon père, le Professeur Meir Eléazar Kulski a’h, était chirurgien. Il nous a quittés en 2016. Initialement spécialisé en chirurgie générale il a également pendant plus de 17 ans exercé dans le domaine des transplantations cardiaques et pulmonaires, il s’est par la suite orienté vers le traitement des affections rénales. Dans la chirurgie urologique


Le Professeur Meir Eléazar Kulski a’h, recevant une bouteille de bénédiction du Rabbi

Mon père était certes médecin de profession, mais il était aussi un Chalia’h du Rabbi en tous points. Il utilisait sa position et son influence pour encourager de nombreux Juifs à renforcer leur pratique de la Torah et leur observance des Mitsvot.

Permettez-moi de vous raconter quelques anecdotes qui illustrent bien le caractère de mon père :

Aider de nombreux Juifs à manger Cacher

un Juif, propriétaire d’un restaurant très réputé mais non-casher en France, est venu le consulter un vendredi matin pour un traitement médical. Mon père l’a soigné avec toute l’attention et le dévouement nécessaires, l’a rassuré et lui a prescrit les médicaments adéquats. Après le traitement, mon père s’est enquis de sa profession. Lorsqu’il a appris qu’il était restaurateur, mon père lui a demandé si son restaurant était Cacher. L’homme a répondu que non, ce à quoi mon père a répliqué : « Si ton restaurant était casher, tu aurais le mérite d’aider de nombreux Juifs à manger de la nourriture Casher. »

Cet homme nous a confié par la suite combien les paroles de mon père l’avaient touché. Il avait déjà été confronté à divers arguments visant à le convaincre de rendre son restaurant casher : « Tu feras plus de chiffre d’affaires car de nombreux Juifs fréquenteront ton établissement », ou « Tu conduis beaucoup de Juifs à pécher, et tu en subiras les conséquences dans l’au-delà », etc. Mon père, quant à lui, a su mettre en avant l’aspect positif de la chose, et ce, de façon très aimable. Cette approche a fait mouche. Suite à cette consultation médicale, l’homme s’est rendu immédiatement au Consistoire pour entamer le processus de certification casher de son restaurant.


Le Professeur Meir Eléazar Kulski a’h, recevant du Leka’h du Rabbi 

En échange de la circoncision

Il y avait un Juif vivant près de chez nous qui venait d’avoir un fils. Le mohel chargé de l’examen préalable à la circoncision du bébé avait identifié certaines complications et hésitait à effectuer l’opération. A la demande du mohel Ce Juif a contacté mon père pour lui demander son avis médical. Mon père a pris rendez-vous avec lui Le recu le soir même à 22h30 à la fin de ses consultations . Après avoir examiné le bébé, mon père a rassuré le père en lui disant qu’il n’y avait aucun obstacle à la circoncision . L’homme, soulagé, a demandé combien il devait à mon père pour la consultation.

Mon père a refusé tout paiement monétaire, proposant plutôt un autre type de rétribution. Il s’est informé sur la profession de cet homme, qui s’est avéré être enseignant. Mon père lui a alors dit : « Avant chaque intervention médicale, je prie D.ieu de me donner la capacité de guérir un patient. Je suis pleinement conscient de la grande responsabilité qui est la mienne, car souvent sa vie est entre mes mains. C’est pourquoi je demande l’aide de D.ieu. Pour toi, » a poursuivi mon père, « tu as la charge de 25 ou 30 enfants. Chacun d’eux est un monde à part entière. Ainsi, à chaque fois que tu entreras dans ta classe et que tu toucheras la Mezouza, pense à ta mission et à ta responsabilité. Prie D.ieu de t’accorder la sagesse et la compétence pour l’accomplir de manière adéquate. Ce sera pour moi une rémunération suffisante pour l’examen que j’ai pratiqué sur ton fils. »

L’homme a été profondément impressionné par l’attitude de mon père et s’est engagé à suivre ses conseils. De telles anecdotes abondent, et, avec l’aide de D.ieu, un livre consacré à mon père et à son influence positive sur de nombreux Juifs est en cours de rédaction.

La réponse du Rabbi

Revenons à mon dilemme. Mon père incarnait pour moi l’idéal du Juif hassidique qui utilise son statut et son influence pour rapprocher de nombreux Juifs du judaïsme. En somme, un véritable Chalia’h du Rabbi. De ce fait, je me suis demandé si je ne devrais pas également suivre ses traces en étudiant la médecine, tout en utilisant ma profession pour œuvrer en faveur du judaïsme.

Mon père m’a suggéré d’écrire au Rabbi pour lui faire part de mes interrogations. C’était en 1992, après le 27 Adar. J’ai donc écrit une lettre au Rabbi dans laquelle j’ai exposé mon dilemme, en précisant que mon père était un médecin qui utilisait son influence pour rapprocher de nombreux Juifs du judaïsme. En fin de lettre, j’ai mentionné que je suivrais, bien entendu, les instructions du Rabbi.

Le secrétaire du Rabbi, Rav Binyamin Klein, a remis ma lettre au Rabbi et m’a ensuite rapporté sa réponse. À la question de savoir si je devais poursuivre mes études à la Yéchiva puis partir en Chli’hout, le Rabbi a répondu par la négative d’un signe de tête. À la question de savoir si je devais poursuivre des études profanes, le Rabbi a répondu par l’affirmative. Enfin, à la question de savoir si je devrais étudier la médecine et emprunter la voie de mon père, le Rabbi a de nouveau répondu par l’affirmative.

Fort de cette réponse du Rabbi, j’ai achevé mes études de « Semiha » (ordination rabbinique) et entamé ma formation en médecine.

« Mille fois plus »

En France, j’ai poursuivi mes études médicales dans une université qui comptait un grand nombre d’étudiants juifs. L’université nous avait alloué une grande salle où nous pouvions prier, manger de la nourriture Cacher.

Une anecdote intéressante s’est produite au début de mes études. La première année de médecine est particulièrement sélective ; seulement environ 10% des étudiants sont autorisés à continuer dans cette voie. Mon point de départ était loin d’être idéal. Le niveau de mon baccalauréat était très basique, et ce peu que j’avais appris, je l’avais en grande partie oublié depuis mes jours de Heder.

Je comptais passer le mois précédant le début des cours à rattraper mon retard. Cependant, le Rav Chmouel Azimov a’h, Chalia’h Harachi du Rabbi à Paris, m’a sollicité pour donner des cours de Guemara et de Hassidout dans la communauté. J’ai expliqué ma situation, et il a répondu qu’un enseignant voit ses propres capacités de compréhension et d’études multipliées « mille fois plus ». Je n’ai pas eu d’autre choix que d’accepter sa demande.

Les débuts ont été difficiles, mais, Barou’h Hachem, j’ai réussi à la fin de l’année à être accepté pour poursuivre mes études médicales. La seule explication que je vois à cela est que la bénédiction du Rabbi s’est concrétisée…

Médecins juifs en France

Lors de ma Bar Mitsvah en 1986, j’ai reçu une lettre de bénédiction de la part du Rabbi. Dans la même enveloppe, il y avait également une lettre adressée à mon père. Mon père avait émis le souhait de créer une organisation de médecins juifs religieux en France, et dans sa réponse, le Rabbi a écrit à la main, après le mot « avec bénédiction » et avant sa signature, « Avec bénédiction pour le succès, en particulier dans la création de l’organisation de médecins religieux dont vous avez parlé. »


Le Dr Itshak Kulski, monte à la Torah chez le Rabbi lors de sa Bar Mitsva

Mon père était un orateur très compétent et utilisait son talent lors de divers congrès à travers la France, inspirant les auditeurs à renforcer leur observance de la Torah et des Mitsvot. Toutefois, la création de l’organisation était un défi pour lui. Après son décès, j’ai discuté avec mes frères et leur ai proposé de réaliser ce projet qui avait été encouragé et béni par le Rabbi. Je ressentais que c’était un devoir particulier pour moi, car cette lettre était arrivée en même temps que celle pour ma Bar Mitsvah.

Nous avons donc créé ensemble cette organisation de médecins juifs en France. À travers cette structure, nous organisons chaque année une conférence abordant les questions liées à la Hala’ha et à la médecine, tout en renforçant l’identité juive des médecins. Lors de la dernière conférence, plus de 100 médecins juifs venus de toute la France ont participé. À la fin de cet événement, nous avons distribué le livre des Mitsvot du Rambam, traduit en français, ainsi que des lettres du Rabbi portant sur des sujets médicaux.


Un Congrès des médecins juifs

Providence divine

A l’hôpital, je tenais un poste de garde, de façon régulière, chaque jeudi soir jusqu’au vendredi matin. Un jour, je n’ai pas pu assurer ce poste, alors j’ai échangé avec un autre médecin. Quand je suis arrivé pour prendre le poste du deuxième médecin, il n’y avait qu’un seul patient en attente pour son examen. Il s’agissait d’un homme âgé d’environ 90 ans, et je me suis demandé s’il était juif. Après lui avoir brièvement expliqué l’examen à venir, je lui ai dit en yiddish : « Aby gezunt » (« L’essentiel est d’être en bonne santé »).

Ses yeux se sont soudain illuminés, et il m’a demandé : « Redst yiddish? » (« Parles-tu yiddish? »). J’ai répondu : « Zikher! » (« Bien sûr ! »). Il m’a dit qu’il n’avait pas parlé yiddish depuis de nombreuses années. J’étais très touché par cette providence divine qui m’avait amené à rencontrer ce Juif.

Le lendemain matin, je suis retourné dans sa chambre pour lui mettre des Téfilines. Il a d’abord refusé, mais après quelques explications sur la Providence divine qui nous avait réunis, il a accepté. Pendant ce temps, un patient dans le lit voisin a commencé à bouger ses mains et ses pieds de manière agitée. Soudain, un autre homme est entré dans la chambre et, voyant que je mettais les Téfilines au vieux Juif, il m’a dit : « C’est mon père là-bas. Il a eu un accident vasculaire cérébral et ne peut pas parler. J’étais censé lui apporter ses Téfilines aujourd’hui, mais j’ai complètement oublié. Quand il vous a entendu, il essayait en fait de vous dire qu’il voulait aussi les mettre. » Bien sûr, j’ai aussi mis les Téfilines à ce Juif.

Le Saint Béni Soit-Il dirige le monde, et parfois nous avons le privilège de voir des signes manifestes de cette providence divine.