Par Gérard Touaty
L’ère messianique sera-t-elle marquée par une profusion de miracles ou, comme l’affirme le Talmud, ne sera que la suite naturelle de notre monde ? La réponse à cette question prend son point de départ au début de notre paracha.
C’est avec une promesse « conditionnelle » que s’ouvre la parachath Bé’houkotaï. « Si vous avancez dans Mes lois….vos pluies tomberont en leur temps, la terre donnera ses récoltes et la paix règnera etc. Parmi toutes ces promesses, nombreuses sont celles qui ne se sont pas encore réalisées mais qui connaîtront leur accomplissement lors de la venue du Machia’h. Ainsi quand le texte affirme que l’arbre du champ donnera son fruit, la Tradition comprend cette promesse comme l’assurance que l’arbre stérile donnera des fruits dans les temps futurs.
Une contradiction
On trouve dans plusieurs textes du Midrach ou du Talmud différentes promesses qui se produiront alors et qui verront un bouleversement de l’ordre naturel comme par exemple le fait que le loup vivra paisiblement avec l’agneau. De ce fait, il paraît difficile de comprendre les mots du Rambam qui déclare dans son Michné Thora (1) : « Qu’il ne te vienne pas à l’esprit qu’à l’époque de Machia’h, sera annulée quelque chose dans la marche du monde, ou que sera changée la nature de la création: le monde continuera selon sa nature…. ». Nous avons d’un côté des promesses qui dépassent l’ordre naturel alors que de l’autre, la loi stipule que le monde ne connaîtra aucun changement structurel ! Mais la contradiction prend de l’ampleur quand on prend connaissance des « Treize articles de Foi » du Rambam lui-même, qui déclare qu’un Juif a l’obligation de croire dans la résurrection des morts ! Ici, le Rambam n’est pas en contradiction avec une autre opinion : il semble se contredire lui-même !
Le joug des Nations
Pour comprendre cette opposition, il faut diviser l’époque messianique en deux périodes, explique le Rabbi, qui nous permettront de comprendre qu’il n’existe pas de contradiction. Dans un premier temps, le Machia’h se révèle dans le monde dans un but, nous dirions, élémentaire : permettre au peuple juif de se consacrer à l’étude de la Thora et à la pratique des commandements, sans subir le joug des Nations. Pour atteindre cette plénitude, il suffit seulement que les Juifs ne soient pas dérangés dans l’accomplissement de leur but sur terre. Comme le Rambam, lui-même le stipule : « ….Les Sages et les Prophètes n’ont désiré l’époque de Machia’h, ni pour dominer le monde, ni pour opprimer les Nations, ni pour être magnifiés par les peuples, ni pour manger, boire et se réjouir, mais pour être adonnés à la Torah et sa Sagesse, sans être opprimés ou perturbés, pour en avoir le mérite dans la vie future, comme nous l’avons expliqué dans les Lois de la Téchouva » (2). On comprend que pour vivre cette époque, les miracles ne sont pas nécessaires. Ce n’est qu’après cette époque que commencera alors une ère nouvelle où s’accompliront les évènements supra naturels annoncés par les prophètes. Toutefois, le déroulement de cette chronologie n’est pas irrémédiablement déterminé. Nous savons, d’après le Talmud (3) que ces évènements peuvent prendre une tournure différente : si le peuple juif n’est pas méritant la révélation messianique se déroulera d’après le temps fixé par D.ieu (en deux époques). Mais si au contraire il est méritant, D.ieu hâtera cette révélation et nous verrons alors de nombreux miracles dès les premiers instants de la délivrance. C’est ce qui se passera très prochainement puisque nous savons, selon les dires du Rabbi, qu’en ces derniers instants d’exil, le peuple juif est méritant.
Notes
(1) Lois des Rois, chap. 12, parag. 1
(2) Lois des Rois, chap. 12, parag. 4
(3) Traité Sanhédrine, p. 98a