Le Mikvé, bain rituel juif, est une institution millénaire dont l’importance a été renouvelée et approfondie par le mouvement hassidique. Ce texte explore les origines bibliques du Mikvé, son rôle dans la purification spirituelle, et sa signification particulière dans la pratique quotidienne. Il aborde notamment les raisons de son utilisation fréquente, son lien avec la prière et l’étude, ainsi que sa dimension mystique telle qu’enseignée par les maîtres hassidiques. À travers cet examen, nous découvrons comment une pratique ancienne continue d’être un pilier central de la vie spirituelle juive, en particulier dans la tradition hassidique.

 

Le Mikvé n’est pas quelque chose de nouveau, quelque chose institué au siècle dernier. C’est un concept très ancien dans le judaïsme. Des découvertes récentes ont révélé de nombreux Mikvés datant de la période du Second Temple, dispersés dans les régions d’Eretz Israël qui étaient habitées à cette époque. Le Mikvé n’est pas non plus utilisé exclusivement par les hassidim ; dans chaque communauté juive, il y a un certain nombre de Mikvés. Pourtant, l’expression « Aller au Mikvé » a une connotation définitivement hassidique. Pourquoi en est-il ainsi ?

La raison d’être du Mikvé est d’éliminer la touma (impureté). La première fois qu’un Mikvé a été utilisé, c’était à l’époque de Noé. Hashem a décidé qu’il était temps de nettoyer un monde éthiquement et moralement corrompu. Alors il a fait appel à l’équipe de nettoyage.

Quel était le but de provoquer une telle destruction chaotique en provoquant un déluge ? Sans parler des difficultés imposées à Noé pour construire une arche et rassembler des paires de chaque espèce animale ! Quel en était le but ?

Dans la Hassidout, il est expliqué que le monde avait besoin d’être spirituellement purifié et Hashem l’a fait en plaçant le monde dans un Mikvé. Hashem a « immergé » le monde dans un Déluge de quarante jours et quarante nuits, le rendant ainsi tahor (pur). En fait, ces quarante jours et nuits du Déluge sont analogues à la mesure de quarante séah requise pour un Mikvé.

Évidemment, la raison pour laquelle nous allons au Mikvé est de devenir tahor, mais pourquoi faut-il le faire chaque matin ?

Ezra a institué une takana (ordonnance) selon laquelle, puisqu’un baal keri (homme ayant eu une émission séminale) est tamé (impur), il ne peut pas prier ou étudier jusqu’à ce qu’il soit allé au Mikvé. Bien que cette takana ait été plus tard supprimée. [Il y a une discussion à ce sujet, il y a de bonnes raisons de dire que cette suppression ne s’applique qu’à l’étude et non à la prière].

Le Shoulhan Aroukh dit que la veille de Yom Kippour, tout le monde est tenu d’utiliser un Mikvé afin d’entrer dans Yom Kippour en état de tahara (pureté). Cela se fait en raison de Tevilat Ezra.

Nous pouvons maintenant expliquer pourquoi nous nous immergeons dans un Mikvé chaque jour avant la prière. Il y a deux raisons :

1) Dans le Likoutei Torah, l’Alter Rebbe spécifie trois étapes de préparation nécessaires pour une prière appropriée. Ce sont : aller au Mikvé, donner la tsedaka et étudier la Hassidout. L’Alter Rebbe mentionne que l’utilisation du Mikvé n’est pas nécessairement liée à la Takanat Ezra, mais plutôt simplement comme une méthode pour apporter une mesure supplémentaire de kedousha (sainteté) sur soi-même avant la prière.

2) Le Rabbi explique à divers endroits que nous y allons aussi à cause de la takana d’Ezra.

Qu’est-ce qui rend l’utilisation du Mikvé si spéciale ?

Dans la Hassidout, il est expliqué que le mot Tevila (immersion) a les mêmes lettres que le mot Bitoul (annulation). Quand on se submerge sous l’eau, tout ce qu’on peut voir est l’eau, rien de l’individu ne semble indépendant. Sous l’eau, chaque être individuel et séparé est totalement couvert, formant ainsi un tout unifié. En nous immergeant dans le Mikvé, nous nous annulons nous-mêmes en préparation à la prière.

De plus, le Mikvé ne se contente pas d’éliminer la touma et d’apporter la tahara, il élève aussi celui qui s’y immerge d’un niveau à l’autre dans la kedousha elle-même. Un exemple de cela serait les multiples (cinq) immersions du Cohen Gadol à Yom Kippour. Son utilisation du Mikvé ne pouvait pas être due à son impureté, si cela avait été le cas, le Cohen Gadol substitut aurait pris le relais. Plutôt, chaque fois qu’il s’immergeait dans le Mikvé, c’était pour l’élever à un niveau supérieur de kedousha.

Le Rabbi écrit que le Mikvé non seulement purifie le corps et l’âme, mais renforce aussi la foi et provoque le repos de la divinité sur la personne (Hashraat Elokout).

Que doit-on faire s’il n’y a aucun moyen d’aller au Mikvé ?

En cas de force majeure, on devrait étudier quelques mishnayot de l’ordre de Taharot, de préférence du traité Mikvaot. Cela ne sert que de substitut à l’aspect de la tevila qui ajoute de la kedousha (réponse #1 ci-dessus) ; cependant, il n’y a pas de substitut à l’aspect de la tevila qui élimine la touma et apporte la tahara (réponse #2 ci-dessus).

On dit du Baal Shem Tov qu’il a mérité toutes les grandes révélations et atteint de très hauts niveaux de kedousha parce qu’il allait très fréquemment au Mikvé.

Le Maggid de Mezeritch ne pouvait pas utiliser le Mikvé parce qu’il était très malade et avait des problèmes avec ses jambes. Les hassidim disent que si le Maggid était allé au Mikvé, le Machia’h serait venu.

Les hassidim vont aussi au Mikvé avant d’aller en yehidout (audience privée) avec le Rabbi ou visiter l’Ohel.

– Il est intéressant de noter : il y a une lettre du Rabbi où il explique la raison pour laquelle ce n’est pas la coutume de Habad de visiter l’Ohel le 9 Av, contrairement à ce qui est indiqué dans diverses sources et fait dans de nombreux autres cercles. Le Rabbi dit que c’est probablement parce que nous ne pouvons pas utiliser le Mikvé ce jour-là. De plus, nous ne visitons pas le cimetière même sans nous arrêter à l’Ohel, car rien qu’en voyant l’Ohel de l’extérieur, on se connecte à un certain niveau avec le Rabbi, et nous devons donc nous abstenir même de regarder l’Ohel avant d’utiliser le Mikvé ! –

Certains se souviennent que pendant les années où le Rabbi recevait des gens en yehidout, le Mikvé sur Kingston était ouvert vers cinq heures de l’après-midi pour permettre aux personnes qui n’avaient pas encore utilisé le Mikvé ce jour-là d’avoir une chance de le faire avant d’aller en yehidout.

La même chose se produisait lorsque le Rabbi tenait un farbrengen surprise.