Ki-Tètsé à la lumière du Dvar Mal’hout – Rav Yaacov Abergel

 

Le Tséma’h Tsédek cite un verset du ‘Cantique des Cantiques’ (2, 14) pour nous expliquer la mission de l’âme divine dans le corps (voir le ‘Séfer ha Likoutim’ à la Lettre ‘Youde’-‘Yonah’) :

‘Ma colombe, nichée dans les fentes du rocher’, explique que le nom du prophète ‘Yonah’, qui fut jeté à la mer et englouti par un énorme poisson, est une allusion à l’âme divine. La signification de l’image de Yonah, qui adressa à l’Eternel une prière du fond des entrailles de cet énorme poisson (comparable à un ‘étui’) évoque donc l’âme divine prisonnière du corps et de l’âme animale, contre lesquels elle doit mener un combat incessant pour imposer sa volonté.

Par ailleurs, la Paracha ‘Ki Tètsé’ fait aussi allusion à la descente de l’âme dans le corps, et le verset ‘Quand tu sortiras en guerre contre ton ennemi’ met l’accent sur le fait qu’un juif doit mener une véritable guerre face au mauvais penchant.

Cependant le Rabbi donne une explication beaucoup plus profonde de ce verset : ‘Quand tu sortiras en guerre contre ton ennemi’ :

Les termes ‘tu sortiras’ évoquent l’endroit d’où provient l’âme, sa source première. Cet ‘endroit’ désigne en fait l’essence divine qui ne fait qu’un avec l’âme, ainsi qu’il est dit dans le saint Zohar : ‘D.ieu Israël et la Torah ne font qu’un’.

De fait, l’âme d’Israël précède toute la Création, ainsi qu’il est dit dans le Midrache : avant la Création du monde, D.ieu S’adressa aux âmes des Justes d’Israël, et leur demanda si oui ou non il devait créer le monde. Le Rabbi nous enseigne donc que du fait que l’âme d’un Juif a précédé le monde, il ne doit nullement être impressionné par lui, et bien au contraire sa mission consiste à mener le combat de D.ieu, en faisant apparaître aux yeux de l’ennemi la lumière de l’endroit divin d’où provient son âme.

En d’autres termes, sa mission consiste à révéler la lumière de l’Essence divine, et peu importe l’endroit où la situation dans lesquels il se trouve, car c’est précisément dans les profondeurs de l’abîme de ce monde, qu’un juif doit faire une demeure pour D.ieu.

Révéler l’endroit d’où provient son âme s’accorde donc à notre mission de ‘faire de ce monde une demeure pour l’Essence de D.ieu’. De fait, même l’âme animale doit devenir une demeure pour l’Essence de D.ieu, pas moins que cela.

Dans les temps futurs l’âme, qui est pour l’instant comme une colombe ‘nichée dans les fentes du rocher’ sortira finalement de son étui, de son exil.

C’est peut-être pour cela qu’il est dit que ‘le Machia’h voit entre les fentes des murs’ du fait qu’il est lui-même l’Essence de l’âme d’Israël, laquelle se trouve en exil, ‘cachée entre les fentes’, confinée dans un ‘étui’. Ainsi, ‘Machia’h voit entre les fentes des murs’ signifie qu’il observe la profondeur de l’âme de chaque enfant d’Israël et il s’attache à la dévoiler.

Aussi, c’est par notre attachement au Rabbi que l’on peut délivrer l’essence de notre âme afin que celle-ci ‘sorte en guerre contre l’ennemi’, c’est à dire afin que celle-ci transforme totalement l’âme animale et le corps, c’est à dire tout ce qui s’oppose à la révélation de l’Essence divine et au dévoilement du Machia’h.

Par ailleurs il est intéressant de remarquer que juste après le verset ‘Ma colombe, nichée dans les fentes du rocher’, il est écrit (verset 16) :

‘Je suis à mon bien-aimé, et mon bien-aimé est à moi’.

Ce verset contient en effet les initiales du mot : ‘Elloul’, lequel est le mois de la Téchouva, du retour vers D.ieu. De fait, l’âme est comparable au vol de cet oiseau qui était au départ ‘niché dans les fentes du rocher’, et qui s’élève ensuite dans le ciel, à l’exemple de l’âme qui retourne vers sa source divine.

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Durant le Farbrenguen qui eut lieu à Jérusalem à l’occasion du quatrième Yortzeit de son fils Chnéor Zalman (‘Zalmi’), le 10 Elloul 5779, le Rav Yossef Itzhak Pevzner a rapporté une déclaration du Rabbi, au sujet d’un enseignement de son beau-père, le Rabbi précédent :

Pour illustrer et pour ajouter à l’enseignement du ‘Zohar’ selon lequel les 13 attributs divins éclairent le monde durant le mois d’Elloul, l’Admour Hazaken nous a donné l’exemple du ‘Roi qui est dans les champs’. Tous les Maîtres de ‘Habad ont commenté cet exemple, en disant que chaque Juif, durant tout le mois d’Elloul, ‘a le droit’ de s’approcher du ‘Roi’. Cependant, le Rabbi Rayats qui emploie une autre expression déclare lui-même que chaque Juif ‘peut’ s’approcher du ‘Roi’.

Pendant le Farbrenguen, le Rav Yossef Itzhak Pevzner exprima le fait que le Rabbi souligne cette différence de langage. En effet, le Rabbi vit dans les mots du Rabbi Rayats l’expression d’un ‘grand ‘Hidouch’… Etonné, le Rav Pevzner questionna : ‘Pourtant, nous pouvons nous demander, qui a-t-il donc de si différent entre le fait ‘d’avoir l’autorisation’ de s’approcher du Roi, et le fait ‘de pouvoir s’en approcher ? ‘.

Les élèves de la Yéchiva, qui étaient présents au Farbrenguen, répondirent avec justesse ‘qu’avoir l’autorisation de s’approcher du Roi’ exprime le fait que chaque Juif reçoit ‘d’en-haut’ l’autorisation’ de s’approcher du ‘Roi’. A l’opposé, ‘ils peuvent s’approcher du Roi’ exprime le fait que la chose vient ‘d’en-bas’, c’est-à-dire que le désir de s’approcher du Roi vient d’eux-mêmes.

Il est possible ici de répondre à la question du Rav en se rapportant à un enseignement du Rabbi du Dvar Mal’hout sur notre Paracha, la Paracha ‘Ki Tetse’.

Dans ce Dvar Mal’hout, le Rabbi commente le premier verset de la Paracha (Ki Tetse, 21, 10) : ‘Quand tu sortiras en guerre contre tes ennemis…’

Rachi écrit que ‘c’est de la guerre optionnelle, non obligatoire, dont parle le verset’.

De manière profonde, la ‘guerre’ représente, aussi, le combat qu’un Juif mène chaque jour face à son mauvais penchant. Or, ce combat n’a rien ‘d’optionnel’, car il est une obligation. Dans ce cas, comment peut-on désigner cette guerre contre le mauvais penchant comme une guerre ‘optionnelle’ ?

A cette question, le Rabbi répond de la manière suivante :

‘Effectiverment, du point de vue de l’âme, telle que celle-ci s’habille dans le corps, notre combat face au mauvais penchant n’est pas une guerre optionnelle, mais une véritable obligation. De fait, chaque jour nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour que notre âme divine impose sa volonté à notre âme animale, afin d’avoir le contrôle de nos pensées, de nos paroles, et de nos actes. Cependant, du point de vue de l’âme, telle que celle-ci est enracinée dans L’Essence divine, il s’agit d’une guerre ‘optionnelle’ car l’essence de l’âme Juive se situe à un niveau qui est au-delà de ce monde’.

Aussi, le Rabbi rapporte le Midrache d’après lequel, avant la Création du monde, L’Eternel s’adressa aux âmes des Tsaddikim, et leur demanda s’il fallait, oui ou non, créer le monde, et à travers ce Midrache, le Rabbi nous enseigne que l’âme d’Israël est ‘une parcelle véritable de divinité d’En-haut’, laquelle est bien au-delà de ce monde.

Ici-même, nous pouvons rapporter la différence qui existe entre le fait ‘d’avoir l’autorisation de s’approcher du Roi’, et celui de ‘pouvoir s’approcher du ‘Roi ».

Il a été expliqué ‘qu’avoir l’autorisation de s’approcher du Roi’ exprime le fait que la chose vient ‘d’En-haut’, et dans ce cas le sens de cette ‘autorisation’ est proche de celui d’une ‘Mitsvah’, c’est-à-dire d’un ‘Ordre’ que l’on reçoit ‘d’En-haut’. Ainsi, il est possible de dire, sous la forme d’un ‘Hidouch, que lorsque les Maîtres de ‘Habad expliquent que pendant le mois d’Elloul chaque Juif a ‘l’autorisation’ de ‘s’approcher du Roi’, ils font référence au niveau de l’âme qui s’habille dans le corps, à ‘la guerre obligatoire’ que nous nous devons mener chaque jour de notre vie.

Par ailleurs, lorsque le Rabbi Rayats déclare que pendant le mois d’Elloul chaque Juif ‘peut’ se rapprocher du ‘Roi’, il fait référence au niveau de l’âme qui est au-delà de ce monde. C’est le niveau de ‘l’âme Juive qui est enracinée dans L’Essence divine’, ce niveau qui exprime le fait que ‘chaque Juif fait Un avec D.ieu’.

Dans ce cas, quand un Juif fait Un avec D.ieu, il n’a pas besoin de recevoir d’ordre de D.ieu, car à ce niveau, la volonté de l’homme se fond dans celle du Saint béni soit-Il. Dès-lors on ne parle plus de ‘guerre obligatoire’ mais de ‘guerre optionnelle’, et c’est donc pour cela que le Rabbi a déclaré que le Rabbi Rayats fit un grand ‘Hidouch quand il employa l’expression : ‘ils peuvent s’approcher du Roi’, car le Rabbi Rayats faisait allusion au lien essentiel qui unit chaque Juif à D.ieu, ce lien au sujet duquel le livre du Zohar déclare : ‘D.ieu Israël et la Torah ne font qu’Un’.

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Ainsi, à la lumière de ce qu’il vient d’être dit nous devons prendre conscience que lorsque ‘nous sortons en guerre contre notre ennemi’, comme il est mentionné dans notre Paracha, nous devons affronter toutes sortes de difficultés, mais nous devons toujours avoir conscience du fait que nous possédons les moyens de soumettre ce monde à notre volonté car celle-ci se fond en celle de D.ieu.

En effet, il est dit (Tanya) : ‘D.ieu se trouve à la droite du pauvre’, c’est-à-dire qu’Il a donné à notre âme divine (‘le pauvre’), tous les pouvoirs pour vaincre le mal qui se trouve de ‘l’autre côté de la Sainteté’ dans ce monde et en nous-mêmes.

En fait, le Rabbi nous enseigne ici qu’un Juif détient le moyen de dominer ce monde, et de dominer sa nature qui le pousse vers le mal, en éveillant la force de l’Essence divine afin que celle-ci se révèle dans les forces de son âme, et en particulier dans ses actes. De fait, comme le Rabbi l’a enseigné, à de nombreuses reprises ‘l’Essence de l’âme d’un Juif est enracinée dans l’Essence divine’, et dans ce cas, si ce Juif parvient à dévoiler ce niveau supérieur, rien ne pourra alors s’opposer à lui, de la même façon que rien ne peut s’opposer à D.ieu, et à Son désir de demeurer dans ce monde, avec le dévoilement de notre Juste Machia’h, dès-à-présent, avec l’aide de D.ieu.