Pour bon nombre des 30 000 Juifs de Belgique, 2019 pourrait être une année de restrictions dans leur pratique du judaïsme. En effet, une loi proposée en juin 2017, désormais mise en œuvre en Flandre depuis le 1 janvier, devrait interdire l’abattage rituel casher dans tout le pays en septembre 2019.

En 2017, les deux régions belges – la Flandre néerlandophone et la Wallonie francophone – ont voté pour que tous les animaux abattus soient assommés en premier, ce qui interdirait effectivement les méthodes d’abattage traditionnelles juives et musulmanes.

La loi sur l’abattage rituel en Flandre obligera la communauté juive d’Anvers, qui représente près des deux tiers de la population juive du pays, à trouver de nouvelles sources importées de viande et de volaille casher.

«La loi en Flandre (la région du nord de la Belgique, qui abrite la plupart des communautés juives du pays et ses dix-neuf Beth Habad) est née d’un débat public de 2014 sur l’abattage d’animaux par des musulmans dans des abattoirs non réglementés», rapporte Israel Hayom. Cela fait suite à une tendance récente en Europe occidentale, selon laquelle des militants du bien-être animal et de l’aide à l’enfance ont formé des alliances avec des individus et des politiciens critiques face à l’impact de l’immigration massive de musulmans en Europe.

La loi stipule que tous les animaux doivent être assommés avant l’abattage, une règle qui va  à l’encontre des lois de l’abattage casher et halal, qui exigent tous deux que l’animal soit en parfaite santé au moment de l’abattage. Les lois de l’abattage rituel juif sont fondées sur la conviction que tuer rapidement les bêtes avec une lame parfaitement aiguisée est le plus humain.

«Cette interdiction touche plus la communauté musulmane que nous, car nous importons déjà l’essentiel de notre viande», explique le Rav Yehouda Reichman du Beth Habad de Bruxelles. La communauté juive peut importer de la viande en franchise de douane en provenance des pays de l’UE, mais il est à craindre que cette nouvelle loi affecte l’offre et donc les prix de vente.

À Anvers, la communauté juive respecte scrupuleusement les normes de la cacheroute qui stipulent que toutes bête doit être tuée par un Chohet reconnu localement (ceux formés aux lois de la Chehita). Ils ont déménagé leur centre de transformation de poulets à 300 km de Strasbourg, en France, et la première semaine, il n’y avait toujours pas de volaille dans les supermarchés casher mercredi. « Les gens commençaient à s’inquiéter à l’approche du Chabbat, mais nous venons de recevoir des textos enthousiastes annonçant que  » les poulets étaient enfin arrivés « , a  déclaré le Rav  Yossi Slavaticki du Beth Habad d’Anvers.

Il a ajouté que certains membres de sa communauté qui avaient décidé que récemment de respecter les lois de la cacherout, avaient exprimé leur inquiétude face aux nouvelles difficultés. « Oui, c’est plus difficile », leur dit-il, « mais nous allons, avec l’aide de D.ieu trouver des solutions et surmonter cette nouvelle épreuve. »

Alors que les rabbins et les communautés belges semblent adopter une approche pragmatique, il y a ceux qui partagent l’inquiétude face à la situation dans son ensemble. Bien que, pour le moment, l’abattage rituel des animaux soit autorisé en France, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Ukraine et en Russie, où vit la grande majorité des Juifs d’Europe, la Belgique rejoint la Suisse et la Norvège, où cette pratique est désormais interdite. 

Pendant ce temps, les communautés juives de Belgique font ce qu’elles peuvent pour mettre fin à l’interdiction qui doit entrer en vigueur dans le reste du pays en septembre 2019. Ils travaillent également avec des organisations locales et européennes pour s’assurer que d’autres pratiques religieuses ne soient pas remises en question.

«Nous craignons que de l’interdiction de l’abattage rituel, ils ne passent à l’interdiction de la circoncision et de signes religieux», explique le Rav Reichman.

Lorsqu’on leur a demandé si ces craintes pouvaient inciter les Juifs à quitter la Belgique et à se joindre à la tendance croissante d’émigration de Juifs européens vers Israël, les deux rabbins ont reconnu cette éventualité tout en restant résolus dans leur mission. «Les juifs belges pourraient fuir la Belgique, bien que nous n’ayons pas encore constaté de grands mouvements dans ce sens. Notre mission ici est d’apporter le judaïsme à chaque Juif et nous serons là jusqu’à ce que cet objectif soit atteint», a déclaré le Rav Slavaticki.