13 Nissan : Hilloula du Tsema’h Tsedek (29 Elloul 1789 – 13 Nissan 1866)

13 Nissan : Hilloula du Tsema’h Tsedek (29 Elloul 1789 – 13 Nissan 1866)

Rabbi Mena’hem Mendel Schneerson était le petit fils de Rabbi Schneor Zalman de Lady (fils de sa fille Devorah Léah) et le gendre de son fils l’Admour Haemtsaï, Rabbi Dov Ber.

Rabbi Mena’hem Mendel est né de Rabbi Chalom Schakhna le 29 Eloul 5549 (1789). A un très jeune âge, il commença à étudier chez le père de sa mère Rabbi Schneor Zalman, le premier Admour des ‘hassidim de Loubavitch. Ayant constaté que son petit-fils était destiné à la grandeur, le grand-père se consacra à lui et le surveillait comme la prunelle de son œil. Il était heureux du développement de son petit-fils, et lui enseigna le meilleur de sa Torah.

Un jour, le grand-père, auteur du Tanya, le vit jouer avec d’autres garçons. Ils avaient mis une planche en diagonale et jouaient à qui monterait sur la planche et arriverait au sommet. Tout le monde courait, montait sur la planche et avant d’arriver à la moitié, trébuchait et tombait. Le petit Mendele courut, monta sur la planche et arriva au sommet.

Le grand-père, qui était présent, lui demanda :
«Mendele, pourquoi as-tu mieux réussi que les autres ?»
«C’est très simple, répondit l’enfant. Ils sont montés sur la planche avec les yeux en bas, vers la terre, ils ont vu comme ils étaient haut, ils ont eu le vertige, ils ont trébuché et ils sont tombés. Moi je suis monté sur la planche avec les yeux tournés vers le haut, vers le ciel. J’ai vu comme j’étais petit, j’ai mis toutes mes forces et je suis monté jusqu’à arriver tout en haut de la planche.»

Jusqu’à l’âge de la bar mitsvah, il n’étudia que la Torah révélée, et ensuite, sur le conseil de son grand-père, il entreprit également l’étude de la Torah cachée.

A l’âge de quinze ans, son illustre grand-père le chargea de diverses tâches pour le bien de la communauté. Il lui enseigna à être ordonné dans son travail, et lui disait : 
«Mendele, il faut travailler pour être ordonné plus dur que pour être érudit, car l’ordre est l’un des principes de base de tout ce qui concerne le savoir et la qualité du caractère.»

Et le petit-fils ne déçut pas son grand-père. A un très jeune âge, il commença à écrire des commentaires, dont son grand-père lui faisait de grands compliments. Sur son conseil, il épousa la fille de Rabbi Dov Ber, le fils du Rabbi, connu parmi les ‘hassidim sous le nom de Admour Haemtsaï (« le Admour intermédiaire»).

 


Le Ohel du Tsemah Tsedek et du Rabbi Maharach

 

Après son mariage, il vécut chez son beau-père en étudiant la Torah et la ‘hassidout dans la sainteté et la pureté. C’est à cette époque-là, racontait Rabbi Mena’hem Mendel, que j’ai appris de mon grand-père à mettre toute ma confiance dans les tsaddikim. Voici ce qui s’était passé: Un jour, Rabbi Schneor Zalman, lui avait demandé : «Mendele, dis-moi de combien est ta dot ? – Deux mille roubles, répondit Rabbi Mena’hem Mendel. – Et que penses-tu faire avec cet argent? lui demanda de nouveau Rabbi Schneor Zalman. – Je vais le donner à un riche de confiance et je gagnerai un peu dessus, répondit le petit-fils. Le grand-père reprit : – Qu’est-ce que cela fait qu’il soit maintenant riche, il se peut qu’au bout de quelque temps il devienne pauvre. Je te conseille de mettre l’argent dans cette boite, la boite de tsedakah, le capital et les bénéfices seront tous en sécurité.»

Rabbi Mena’hem Mendel s’esquiva de la chambre de son grand-père et donna l’argent à un homme très riche et de grande confiance. Au bout de quelques mois, celui-ci perdit son argent et devint très pauvre.

Un jour, le grand-père lui demanda : «Mendele, dis-moi, combien as-tu gagné avec ton argent?» Le petit-fils lui raconta la vérité sur ce qui était arrivé. Alors le grand-père lui dit : «Pourquoi ne m’as-tu pas écouté, quand je t’ai conseillé de donner ton argent à la tsedakah? Pourquoi n’as-tu pas eu plus de confiance dans les paroles de ton Rav qu’un simple juif? Et le grand-père continua à raconter : Un jour, je suis parti de Mezritch et je me suis arrêté en route dans une auberge. Le propriétaire était un homme vieux, honnête et droit. Je lui ai demandé depuis quand il vivait dans cette auberge, et il m’a répondu : plus de cinquante ans. Je lui ai dit: Y a-t-il ici dix juifs pour prier avec un minyan? – Non, répondit-il. Je lui ai dit: «Comment un juif peut-il prier toute sa vie dans la solitude sans jamais entendre la kedouchah et barekhou? Pourquoi ne venez-vous pas vous installer en ville? Ce juif me répondit: Rabbi, ici j’ai ma subsistance, qu’est-ce que je ferais en ville? Je lui ai dit: Si le Saint béni soit-Il nourrit tous les juifs de la ville, il vous nourrira aussi. Et j’ai ajouté : « Sachez que je suis l’élève de notre grand maître Rabbi Dov de Mezritch.»

Au bout d’une demi-heure, j’ai vu des charrettes remplies de toutes sortes d’objets. J’ai demandé: Qu’est-ce que c’est? Le vieux m’a répondu: J’ai fait comme le Rav m’a dit.» Et le Rav ajouta à l’adresse de son petit-fils : «Considère qu’à ce moment-là j’étais jeune, mais quand il a entendu que j’étais l’élève du Rabbi de Mezritch, sans prendre le temps de réfléchir il est allé s’installer en ville. Et toi, tu as entendu de moi qu’il était possible que tu perdes ton argent, et tu ne m’as pas cru.»

Après la mort de son oncle et beau-père, l’Admour Haemtsaï , il refusa de prendre sur lui la direction des ‘hassidim de ‘Habad, car c’était une lourde tâche, et il voulait être un simple ‘hassid comme tous les autres. Voici ce que raconte sur lui son fils Rabbi Chemouël : «Un jour, Rabbi Chemouël est rentré chez son père le «Tsema’h Tsédek» et l’a trouvé en train de marcher dans sa chambre, une profonde douleur inscrite sur le visage. Il eut peur, croyant qu’un malheur s’approchait. A sa question, son père répondit :«Il y a aujourd’hui cinquante ans depuis ma dernière réunion de ‘hassidim. J’avais alors vingt ans, et le lendemain mon grand-père m’a appelé, il m’a parlé du verset «A partir de vingt ans», et il m’a donné sa bénédiction que je réussisse dans l’écriture de commentaires de la Torah, révélée et cachée. Depuis, à chaque réunion où j’étais présent, on m’a honoré d’abord en tant que petit-fils du Admour, puis comme gendre du Admour Haemtsahi. Et depuis que j’ai pris sur moi le joug de la direction des ‘hassidim, il y a une trentaine d’années, je n’ai plus connu le goût d’une réunion de ‘hassidim, c’est cela qui me donne beaucoup de peine.» Et des larmes roulaient de ses yeux.

Mais sous l’influence de ses proches, il assuma la responsabilité des ‘hassidim après la mort de son beau-père. De près et de loin, on venait le trouver pour boire avidement ses paroles. Rabbi Mena’hem Mendel se faisait beaucoup de souci pour ses ‘hassidim. Il acheta un terrain, fonda le village de Chtsedrin et y installa beaucoup de juifs. Son nom se répandit dans le monde entier, et de tous les coins de la diaspora on s’adressait à lui avec des questions. Bien qu’il ait été surchargé de travail, il ne cessa jamais d’y répondre. Il rassembla toutes ses explications halakhiques dans son livre de responsa «Tsema’h Tsédek», en quatre parties.

En 5608 (1848), il fut invité à Saint-Petersbourg à une réunion organisée par le ministre de l’éducation russe, le prince Obrov, qui voulait faire accepter aux rabbanim que les enfants d’Israël apprennent la langue russe et les matières générales. Rabbi Mena’hem Mendel était déterminé à s’opposer à ce que les enfants d’Israël fassent des études générales, et craignant que son attitude ne lui coûte la vie, il emporta avec lui son linceul. Mais son mérite le protégea, il rentra en paix et sortit en paix.

En 5615 (1855), des opposants le dénoncèrent, et sa maison fut placée sous surveillance des autorités. Il alla alors lui-même trouver le gouverneur de la région, qui lui promit de ne pas prêter attention aux délateurs.

En 5620 (1860), il tomba malade et ne guérit plus jusqu’au jour de sa mort le 13 Nissan 5626 (1866). Il avait soixante dix-sept ans quand son âme le quitta dans la ville de Loubavitch. Il ordonna de ne graver sur la tombe aucun titre de gloire, mais uniquement qu’il avait contribué au repentir de beaucoup de gens. Son fils, Rabbi Chemouël, le Maharach prit sa place.

Le Nassi du jour « Naphtali » : Chabbat 12 Nissan

Le Nassi du jour « Naphtali » : Chabbat 12 Nissan

בְּיוֹם שְׁנֵים עָשָׂר יוֹם, נָשִׂיא לִבְנֵי נַפְתָּלִי–אֲחִירַע, בֶּן-עֵינָן. קָרְבָּנוֹ קַעֲרַת-כֶּסֶף אַחַת, שְׁלֹשִׁים וּמֵאָה מִשְׁקָלָהּ, מִזְרָק אֶחָד כֶּסֶף, שִׁבְעִים שֶׁקֶל בְּשֶׁקֶל הַקֹּדֶשׁ; שְׁנֵיהֶם מְלֵאִים, סֹלֶת בְּלוּלָה בַשֶּׁמֶן–לְמִנְחָה. כַּף אַחַת עֲשָׂרָה זָהָב, מְלֵאָה קְטֹרֶת. פַּר אֶחָד בֶּן-בָּקָר, אַיִל אֶחָד כֶּבֶשׂ-אֶחָד בֶּן-שְׁנָתוֹ–לְעֹלָה. שְׂעִיר-עִזִּים אֶחָד, לְחַטָּאת. וּלְזֶבַח הַשְּׁלָמִים, בָּקָר שְׁנַיִם, אֵילִם חֲמִשָּׁה עַתֻּדִים חֲמִשָּׁה, כְּבָשִׂים בְּנֵי-שָׁנָה חֲמִשָּׁה: זֶה קָרְבַּן אֲחִירַע, בֶּן-עֵינָן.

 

Au onzième jour, le phylarque des enfants de Naphtali, A’hira, fils d’Einan. Son offrande : une écuelle d’argent, du poids de cent trente sicles ; un bassin d’argent de soixante-dix sicles, au poids du sanctuaire, tous deux remplis de fleur de farine pétrie à l’huile, pour une oblation ; une coupe de dix sicles, en or, pleine de parfum ; un jeune taureau, un bélier, un agneau d’un an, pour holocauste ; un jeune bouc, pour expiatoire ; et, pour le sacrifice de rémunération, deux taureaux, cinq béliers, cinq boucs, cinq agneaux d’un an. Telle fut l’offrande de A’hira, fils d’Einan.

יְהִי רָצוֹן מִלְפָנֶיךָ יְיָ אֳלֹהַי וֵאלהֵי אֲבוֹתַי שֶׁתָּאִיר הָיוֹם בְּחַסְדְּךָ הַגָּדוֹל עַל נִשְׁמַתִין קָדִּישִׁין דְּמִתְחַדְשִׁין כְּצִפָּרִים וּמְצַפְצְפִין וּמְשַׁבְּחִין וּמְצַלְּאִין עַל עַמָּא קַדִּישָׁא יִשְׂרָאֵל. רִבּוֹנוֹ שֶל עוֹלָם תַּכְנִיס וּתְעַיֵיל הַנַּךְ צִיפָרֵי קַדִּישֵׁי לַאֲתַר קַדִּישָׁא דְּאִיתְמַר עֲלֵייה עַיִן לֹא רָאֲתָה אֳלֹהִים זוּלָתֶךָ. יְהִי רָצוֹן מִלְּפָנֶיךָ יְיָ אֱלֹהַי וֵאלֹהֵי אֲבוֹתַי שֶׁבְּאִם אֲנִי עַבְדְּךָ מִשֵּׁבֶט נַפְתָּלִי שֶׁקָּרָאתִי בְּתוֹרָתֶךָ פַּרְשָׁה שֶׁל הַנָּשִׁיא הַיוֹם אֲזַי יָאִירוּ נָא עָלַי כָּל נִיצוֹצִין קַדִּישִׁין וְכָל הָאוֹרוֹת הַקְּדוֹשׁוֹת הַכְּלוּלוֹת בִּקְדוּשַׁת זֶה הַשֵּׁבֶט לְהָבִין וּלְהַשְׂכִּיל בְּתוֹרָתֶךָ וּבְיִרְאָתֶךָ לַעַשׂוֹת רֱצוֹנְךָ כָּל יְמֵי חַיַי אֲנִי וְזַרְעִי וְזֶרַע זַרְעִי מֵעַתָּה וְעַד עוֹלָם אָמֵן:

Puisse être Ta volonté, Éternel mon D.ieu et D.ieu de mes pères, que dans Ta grande bonté Tu éclaires les âmes saintes qui se renouvellent comme des « oiseaux » et chantent et disent des louanges et prient au nom du peuple saint d’Israël. Maître du monde, recueille et fait entrer ces « oiseaux » sacrés dans le lieu saint dont il est dit : « Aucun œil ne l’a vu, sauf toi, ô Dieu. » Puisse être Ta volonté, Éternel mon D.ieu et D.ieu de mes pères, que si moi, Ton serviteur, je suis de la tribu de Naphtali dont j’ai lu aujourd’hui dans Ta Torah la section du Nassi, que toutes les « étincelles » saintes et toutes les illuminations saintes qui sont incluses dans la sainteté de cette tribu brillent sur moi, pour me donner la compréhension et l’intelligence dans Ta Torah et la crainte de Toi, pour accomplir Ta volonté tous les jours de ma vie, moi et mes enfants et les enfants de mes enfants, de maintenant à jamais. Amen.

 

 

 

Grand Farbrenguen central célébrant le 11 Nissan 5784, 122e anniversaire du Rabbi au Beth Haya Mouchka

Grand Farbrenguen central célébrant le 11 Nissan 5784, 122e anniversaire du Rabbi au Beth Haya Mouchka

Le Beth Loubavitch a organisé un grand Farbrenguen, veille du 11 Nissan, pour célébrer le 122ème anniversaire du Rabbi. Des centaines de fidèles se sont rassemblés dans une ambiance à la fois solennelle et conviviale. Chants, discours et témoignages ont rythmé cette soirée hassidique.

Le 11 Nissan, le Beth Loubavitch a organisé un Farbrenguen des plus spéciaux pour marquer le 122ème anniversaire de naissance du Rabbi Menahem Mendel Schneerson, septième Rabbi de la dynastie Habad-Loubavitch. Cet événement majeur du calendrier hassidique a rassemblé des centaines de fidèles dans une ambiance à la fois solennelle et conviviale.

C’est dans les prestigieux salons « Haya Mouchka » au 49 rue Petit, dans le 19ème arrondissement de Paris, que s’est tenue cette célébration d’envergure. Dès 20h30, les participants ont pu se mettre dans l’ambiance grâce à la diffusion d’une vidéo retraçant le parcours et l’héritage exceptionnel du Rabbi.

Puis à 21h précises, le Farbrenguen proprement dit a débuté, animé par trois éminentes figures du mouvement Habad en Ile-de-France : le Rav Mendel Azimov, le Rav El’hanan Marozov et le Rav Moshé Vishedski. Tour à tour, ils ont pris la parole pour rappeler les enseignements fondamentaux et la vision du Rabbi, insistant sur des concepts clés comme l’amour du prochain, l’étude de la Torah ou encore la joie de vivre selon les préceptes.

Entre chants hassidiques entraînants, discours inspirants et service de rafraîchissements traditionnels, l’assistance n’a eu de cesse de réaffirmer son attachement indéfectible aux idéaux incarnés par le Rabbi durant ses décennies de mandat spirituel auprès de la communauté loubavitch mondiale.

Dans cette atmosphère empreinte de chaleur et de fraternité, les participants ont savouré chaque instant de ce Farbrenguen exceptionnel. Bien plus qu’une simple commémoration, c’était une véritable immersion dans l’héritage toujours vivace du Rabbi qui a consacré sa vie à l’éducation juive, à l’unité du peuple et au strict respect des mitsvot.

C’est ainsi que, par cette célébration solennelle et joyeuse à la fois, la flamme du Rabbi, allumée il y a plus d’un siècle, continue année après année de briller intensément, rappelant à toutes et à tous la voie à suivre vers un judaïsme épanoui, engagé et tourné vers la venue imminente du Machia’h.

Photos et vidéos : Mordehai Lubecki

 

 

 

 

11 Nissan et Chabbat Ha Gadol-Paracha Metsora à la lumière du Dvar Malhout’ par le Rav Y. Abergel

11 Nissan et Chabbat Ha Gadol-Paracha Metsora à la lumière du Dvar Malhout’ par le Rav Y. Abergel

 

L’Anniversaire du Rabbi 

‘Quand il naquit toute la maison s’est emplit de lumière (Sotah, 12a)’
Le jour d’un anniversaire est un jour de joie car il rappelle le jour de la naissance, lorsqu’ une nouvelle âme naît dans ce monde, et qu’alors peut commencer le début du service divin. De fait, chaque Juif, le jour de son anniversaire, se doit de méditer à la promesse qu’il fit à l’Eternel avant de descendre dans ce monde : ‘Sois un Juste et ne sois pas un méchant, et même si tout le monde te dit que tu es un Juste, tu seras à tes yeux comme un méchant’.
La ‘Hassidout souligne qu’au moment de cette promesse, l’Eternel rassasie l’âme des forces dont elle aura besoin pour assumer sa mission, mais il est évident que l’homme doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour ‘nourrir’ son âme tout au long de son existence. Aussi, l’étude de la ‘Hassidout est indispensable à chaque juif pour mener la mission qui lui est confiée de faire de ce monde matériel une demeure spirituelle pour D.ieu.
Il apparaît à l’évidence que le jour de l’anniversaire d’un Juste est un jour particulièrement lumineux, car le monde et l’Assemblée d’Israël reposent sur ce Juste, et ‘le Juste est le fondement du monde’.

Rachi écrit au sujet de la naissance de Moché (Chemoth 2, 2) que ‘quand il naquit toute la maison s’emplit de lumière’ (Sotah, 12a).

La ‘maison’ qui ‘s’emplit de lumière’ ne désigne pas seulement la maison où Moché naquit, mais elle représente aussi la ‘maison d’Israël’ car Moché éclaire tous les enfants d’Israël. Il est lui-même la ‘tête’ et les enfants d’Israël sont les ‘pieds’ de Moché. Comme la tête dirige et illumine chaque membre du corps, à chaque génération il y a un Moché qui guide et illumine l’âme du Peuple d’Israël. Aussi, le jour de la venue du Machia’h, très bientôt et de nos jours avec l’aide D.ieu, est une naissance, car en ce jour le monde entier s’emplira de lumière, ainsi qu’il est dit (Iguéreth HaKodech du Rabbi Yossef Itz’hak, lettre 274) :

‘Sais-tu qui est le Machia’h ? C’est celui qui révèlera l’enseignement caché de la Torah dans toute sa profondeur, de sorte que tous en ressentent la clarté.’
Par ailleurs, l’Admour Haemtsaeï écrit au sujet du Machia’h (Droucheï ‘Hatouna, Tome 2, page 522) :

‘Il agira pour celui qui l’attend’, c’est-à-dire que le Machia’h révèlera le plaisir infini à ceux qui l’attendent et souhaîtent sa venue, ainsi qu’il est dit : ‘S’il tarde, sois patient’. Cette attente doit s’emplir d’espoir en sa venue ainsi qu’il est écrit : ‘Voici, c’est notre D.ieu, nous avons placé notre espoir en Lui’ et ‘notre âme l’attend’. On évoque également ‘Ceux qui placent leur espoir en D.ieu’.

‘Machia’h agira pour celui qui l’attend’ ne signifie pas (seulement) que nous devons être patients. Bien au contraire, nous devons aussi être impatients. En effet, l’Admour-Haemtsaeï définit ici l’attente comme un désir. Certes, l’attente inclut en elle ‘l’espoir de sa venue’, mais ce qu’elle exprime par-dessus tout c’est le ‘désir de sa venue’, lequel est en fait l’expression du lien le plus profond de l’âme juive avec D.ieu : ‘Kécher atsmi’ : le niveau de Yé’hida.
A la lumière de ce qu’il vient d’être dit, le verset que rapporte Rachi au sujet de la naissance de Moché : (Chemoth 2, 2)’Quand il naquit toute la maison s’emplit de lumière’ (Sotah, 12a) peut être expliqué de la manière suivante.

‘Quand il naquit’, la naissance de Moché, peut tout aussi bien faire allusion à la naissance du Rabbi, qui est lui-même l’équivalent de Moché dans notre génération (‘Hitpachtouta dé Moché’).

Le Rabbi représente l’Essence de l’âme d’Israël, car son âme est une âme collective, et il possède de ce fait la force de révéler l’Essence de l’âme de chaque Juif. Or, du fait que l’âme est comparable à une maison (l’Eternel déclare en effet : ‘Faites-Moi un sanctuaire et Je résiderais parmi vous’, et la ‘Hassidout explique que le ‘sanctuaire’ n’est autre que notre âme), nous pouvons expliquer que ‘Quand il naquit toute la maison s’emplit de lumière’ est une allusion à la Lumière de l’Essence de l’âme qui se révèle dans le corps.

La ‘maison’ désigne en fait la partie de l’âme qui s’habille dans le corps, et ‘Quand il naquit’ est une allusion à la naissance du Rabbi, laquelle représente la révélation de l’Essence de l’âme de chaque Juif.

Dans son discours intitulé ‘Vé Ata Tétsavé’, le Rabbi explique que le niveau supérieur de la révélation de Yé’hida, l’Essence de l’âme, est atteint lorsque la Lumière de l’Essence divine s’unit véritablement aux forces de l’âme (l’intellect et les sentiments). Dans ce cas, le caractère divin et immuable qui ne change pas, ainsi que dit L’Eternel : ‘Je n’ai pas changé’, s’unit aux forces limitées de l’âme qui s’habillent dans le corps (l’intellect, les émotions, la vie du corps).

L’homme parvient alors à la perception véritable du divin. L’infini divin s’unit aux forces limitées de son âme. Telle est la mission du Rabbi. Il est celui qui permet l’union de l’infini avec le fini. Celui par l’intermédiaire de qui, l’âme d’un juif devient un feu perpétuel, car il unit l’Essence de l’âme avec l’âme qui s’habille dans le corps.

C’est cela ‘la maison qui s’emplit de lumière’, lorsque la Lumière de l’Essence divine éclaire l’âme et le corps d’un Juif.
Ainsi, c’est peut-être au sujet de cette union que l’Admour Haemtsaeï déclare que ‘le Machia’h révèlera le plaisir infini à ceux qui l’attendent et souhaitent sa venue’, car le plaisir dont il est ici question n’est autre que celui de la révélation de l’Essence de l’âme, ‘l’infini divin’, dans le corps (‘la maison’)
Dès-lors, il est aisé de réaliser l’importance de ce jour du 11 Nissan, lequel précède notre sortie de l’Egypte et de toutes les limites de ce monde matériel, le soir du Séder. Ce jour contient la force de l’Essence divine, le ‘plaisir infini’, qui est sur le point de se dévoiler, avec l’aide de D.ieu, de manière véritable avec la venue de notre Juste Machia’h, lors de la délivrance finale.

Le Maharal de Prague nous a enseigné que le Machia’h est appelé ‘le lépreux’, car de même que ceux qui sont atteints par la lèpre sont séparés du reste du monde, le Machia’h est lui-même séparé du monde matériel. Il est intéressant d’établir la comparaison avec le Rabbi qui d’un côté est séparé de ce monde matériel du fait qu’il étudie constamment la Torah, mais d’un autre côté il demeure proche de chaque Juif et agit constamment dans ce monde matériel. Cette qualité procède de l’Essence divine car elle-seule est capable d’unir deux choses opposées.

De fait, le Rabbi unit ‘Or ein-sof ‘avec les enfants d’Israël :
Dans le Séfer-ha-Si’hot (5752, ‘Hélek Alef, page 106), le Rabbi écrit que ‘le Machia’h représente l’union entre Ban et Mah car d’un côté il est un homme de chair et de sang (Ban) et d’un côté il est comme le Saint béni soit-Il (Mah) car il est l’envoyé du Saint-béni-soit-Il et ‘l’envoyé est vraiment considéré comme celui qui l’envoie ».

A l’évidence, l’exemple du Rabbi est l’expression du lien de l’esprit avec la matière. Il est celui qui enseigne la ‘Torah ‘Hadacha’, ‘l’Essence de la Torah », dont le pouvoir est d’apporter la plus grande chaleur à la froideur de l’intellect.

C’est grâce aux enseignements du Rabbi qu’un homme éveille sa perception du Divin et qu’il parvient à voir et à ressentir la spiritualité qui vit en lui-même et dans ce monde matériel. Le Rabbi parvient à unir l’âme de la Torah au corps des enfants d’Israël car il est celui qui élève nos perceptions et nos sensations, vers la sensibilité du Divin.

Aussi, du fait que le Rabbi est uni à chaque Juif, le jour de son anniversaire est du même coup l’anniversaire de chaque Juif, et chacun peut ressentir en ce jour la joie, unique, d’être lié au Rabbi, et par son intermédiaire d’être uni à D.ieu, comme un fils est uni à son père.

Chabbat Ha Gadol 

Dans le Dvar Mal’hout (Paracha Tsav), le Rabbi déclare que le contenu profond du mois de Nissan est celui de la Délivrance. Ce mois est le mois de la fête de Pessa’h ‘le temps de notre liberté’ et cela s’exprime plus particulièrement pendant le Chabbat avant Pessa’h, Chabbat Ha Gadol.
L’Admour Hazaken rapporte dans son Choul’hane Aroukh le miracle qui fut à l’origine de ce nom : le Grand Chabbat.

Les Egyptiens qui furent avertis par les Juifs que l’Eternel s’apprêtait à frapper l’Egypte de la plaie des premiers-nés allèrent se plaindre à Pharaon de son refus de laisser partir les enfants d’Israël. Pharaon demeura insensible à cette plainte et les premiers-nés d’Egypte entreprirent alors une guerre contre son armée. Parmi les nombreux égyptiens qui furent tués, il y avait ceux qui commirent des atrocités aux enfants d’Israël. Le Rabbi explique que la raison pour laquelle cette guerre fut appelée grand miracle et aussi le début des miracles de la Délivrance est qu’elle résulte d’un très haut dévoilement divin qui est lui-même allusionné par la lettre Kouf du mot Tsaddik.

Le pied de la lettre Kouf descend très bas et évoque donc de ce fait la force de l’Essence divine qui, Elle seule, a le pouvoir de descendre ici-bas pour transformer l’obscurité de l’exil en un réceptacle capable de recevoir les lumières les plus élevées. Plus encore, au sujet de la lettre Tsaddik, le Rabbi rapporte le Téhilim 90 (’90’ comme la valeur numérique de la lettre Tsaddik), dans lequel il est dit (90, 17) : ‘Que le plaisir de mon Maître notre D.ieu soit avec nous, établis pour nous l’action de nos mains, et que l’accomplissement de nos mains soit établi’.

Selon le Midrach les versets de ce Téhilim furent rédigés par Moché et le Roi David les intégra dans son livre. Après avoir édifié le Michkan (le Temple portatif), Moché pria afin que l’Eternel S’y révèle. Rachi explique que Moché dit deux fois ‘établis l’action de nos mains’ :
Une fois pour implorer D.ieu de Se révéler dans le Michkan, et une fois pour révéler Sa grande Lumière infinie dans les actes du Peuple d’Israël.
Le Rabbi souligne que l’action de Moché détient le pouvoir d’attirer la lumière d’Or-Sovev (la lumière qui entoure les mondes) afin que celle-ci Se dévoile et réside dans le Michkan.
C’est aussi l’action de Moché qui permet à la lumière d’Or-Sovev de se révéler dans le monde et dans les actions des enfants d’Israël.

De fait, Moché est l’intermédiaire qui unit les enfants d’Israël avec le Saint béni soit-il. D’un côté, il est celui qui reçoit les plus hauts Dévoilements divins et d’un autre côté il est celui qui transmet ces Dévoilements aux enfants d’Israël.

Il est essentiel de comprendre que tous les bienfaits matériels et spirituels nous parviennent de D.ieu par l’intermédiaire de Moché. Aussi, en ces derniers moments de l’exil, nous devons réaliser que la réussite de toutes nos actions dépend de la valeur que nous donnons à notre attachement au Moché de notre génération, le Rabbi.

Parachat Metsora

L’un des points essentiels de l’enseignement de la ‘Hassidout sur la lèpre, est que, bien qu’elle soit fixée par la Torah et par l’intermédiaire des Cohanim comme un signe d’impureté, la lèpre cache en réalité une très grande lumière. Le Rabbi rapporte à ce sujet l’enseignement de son père, Rabbi Lévi-Itz’hak, selon lequel la valeur numérique de l’expression Ha Metsora, le lépreux, est égale à 411, comme la valeur numérique du nom ‘Tohou’ dont les lumières sont d’une très grande puissance.
Dans le même ordre d’idée, la ‘Hassidout nous enseigne que les lettres de Néga, ‘la tache de lèpre’, sont les mêmes que celles de Oneg, ‘le plaisir’. De fait, la lumière spirituelle de la lèpre (‘Néga’) est liée au ‘plaisir supérieur’ de D’Hachem : ‘Oneg Ha Elion’.
Il nous est donné ici à comprendre que la lumière spirituelle de la lèpre est tellement élevée qu’elle ne peut trouver ici-bas un réceptacle capable de la contenir. De ce fait, lorsque cette lumière s’échappe du réceptacle au moment où il se brise, car il n’est pas assez solide pour supporter son intensité, la lumière est alors détournée vers l’autre côté de la Sainteté, et finalement utilisée par les forces du mal. Ainsi, ce que l’on appelle ‘l’obscurité’, ‘la lèpre’, résulte du fait qu’une lumière excessivement élevée n’a pas trouvé de réceptacle capable de la supporter de la contenir et de la garder.
Le Rabbi nous donne un exemple concret. Lorsqu’un Juif ressent durant sa prière un amour très fort pour D.ieu et que son âme est alors attirée vers sa source, à tel point qu’elle serait prête à quitter le corps, ‘Ratso’, il est alors essentiel de faire descendre, après la prière, la lumière de cet amour pour D.ieu dans le réceptacle de l’étude de la Torah, ou dans celui de l’accomplissement des Commandements divins, ‘Chov’. S’il n’agit pas ainsi, les signes de la lèpre apparaîtront alors sur sa peau. C’est-à-dire que si la lumière de cet amour pour D.ieu ne s’habille pas dans le réceptacle de l’étude, ou dans celui de l’action concrète, alors cette lumière ‘excessivement élevée qui n’a pas trouvé de réceptacle capable de contenir son intensité, sera finalement détournée vers l’autre côté de la Sainteté et finalement utilisée par les forces du mal’, ainsi qu’il a été expliqué précédemment. De fait, le Rabbi enseigne à ce sujet que celui qui n’étudie pas, ou qui n’accomplit pas une Mitsva après sa prière, ressentira une vive intolérance vis-à-vis de son prochain, et tombera facilement dans la colère, ce qu’à D.ieu ne plaise.
D’après l’enseignement du Rabbi, Chov, le retour de l’âme dans le corps, représente la solution, le remède et la guérison de la lèpre. Chov est lié à la faculté du Bitoul, c’est-à-dire à la soumission la plus totale vis-à-vis de D.ieu et de Sa Volonté bénie.

Par cette soumission, un Juif ajoutera dans son étude de la Torah, et dans son accomplissement des Commandements divins. Grâce à cela son action aura finalement pour effet d’unir les Lumières les plus élevées à des réceptacles capables de les contenir.

‘Machia’h s’asseoit parmi les pauvres’ :
Cette déclaration des Sages n’exprime pas seulement le fait que le Machia’h est capable de se mettre à la portée de chaque Juif, même du moins érudit, mais plus encore, cette déclaration reflète aussi l’enseignement du Rabbi du Dvar Mal’hout sur notre Paracha.
En effet, Machia’h représente la lumière de la Délivrance, laquelle ‘s’asseoit’, c’est à dire ‘descend’ des cimes les plus élevées pour finalement s’habiller de manière profonde en nous-même et dans ce monde matériel.
La Séfira de Mal’hout est définie par l’Admour Hazaken comme étant ‘la bouche de L’Eternel’, au moyen de laquelle Hachem insuffle la vitalité aux mondes et à tout ce qu’ils contiennent. Or, du fait que Mal’hout reçoit toute sa lumière des Séfiroth qui sont au-dessus d’elle et qu’elle-même ne possède pas sa propre lumière, elle est appelée ‘pauvre’.
‘Machia’h s’asseoit parmi les pauvres’ signifie alors que la plus haute lumière, la lumière du Machia’h, descend de manière profonde, ‘s’asseoit’, dans la Séfira de Mal’hout, pour insuffler au monde la vitalité nouvelle de l’Essence divine, la vitalité de la Délivrance finale.
Par ailleurs, les Sages ont comparé Machia’h au léopard. La peau du léopard est recouverte de tâches, et la peau du Machia’h est aussi recouverte de tâches, des tâches de lèpre. Cette comparaison, physique, possède aussi un contenu spirituel qui est lié à leurs forces respectives.
En effet, il est dit que le léopard attaque sa proie de manière foudroyante et n’abandonne jamais. A l’évidence, chaque Juif qui possède une étincelle du Machia’h, a la capacité de poursuivre sa proie : la Délivrance finale sans jamais renoncer, et en investissant toujours ses forces les plus profondes.
A l’image du léopard qui mange sa proie, perché sur la branche d’un arbre pour ne rien laisser aux autres prédateurs, un Juif ‘mange sa proie’ sans rien laisser aux forces du mal, ainsi qu’il a été expliqué au nom du Rabbi. Il fait descendre les plus hautes lumières qu’il a obtenu pendant la prière dans le réceptacle de l’étude de la Torah. Dans ce cas, la lumière s’habille dans le réceptacle de manière profonde car l’homme et le monde deviennent des réceptacles capables de contenir les plus hautes lumières sans jamais rien laisser aux ‘prédateurs’. Des réceptacles capables de recevoir le dévoilement de l’Essence divine, lors de la venue du Machia’h, très bientôt et de nos jours, avec l’aide de D.ieu.

 

Le Nassi du jour « Naphtali » : Chabbat 12 Nissan

Le Nassi du jour « Asher » : Vendredi 11 Nissan

בְּיוֹם עַשְׁתֵּי עָשָׂר יוֹם, נָשִׂיא לִבְנֵי אָשֵׁר–פַּגְעִיאֵל, בֶּן-עָכְרָן. קָרְבָּנוֹ קַעֲרַת-כֶּסֶף אַחַת, שְׁלֹשִׁים וּמֵאָה מִשְׁקָלָהּ, מִזְרָק אֶחָד כֶּסֶף, שִׁבְעִים שֶׁקֶל בְּשֶׁקֶל הַקֹּדֶשׁ; שְׁנֵיהֶם מְלֵאִים, סֹלֶת בְּלוּלָה בַשֶּׁמֶן–לְמִנְחָה. כַּף אַחַת עֲשָׂרָה זָהָב, מְלֵאָה קְטֹרֶת. פַּר אֶחָד בֶּן-בָּקָר, אַיִל אֶחָד כֶּבֶשׂ-אֶחָד בֶּן-שְׁנָתוֹ–לְעֹלָה. שְׂעִיר-עִזִּים אֶחָד, לְחַטָּאת. וּלְזֶבַח הַשְּׁלָמִים, בָּקָר שְׁנַיִם, אֵילִם חֲמִשָּׁה עַתֻּדִים חֲמִשָּׁה, כְּבָשִׂים בְּנֵי-שָׁנָה חֲמִשָּׁה: זֶה קָרְבַּן פַּגְעִיאֵל, בֶּן-עָכְרָן.

Au onzième jour, le phylarque des enfants d’Asher, Paghiel, fils d’Okhran. Son offrande : une écuelle d’argent, du poids de cent trente sicles ; un bassin d’argent de soixante-dix sicles, au poids du sanctuaire, tous deux remplis de fleur de farine pétrie à l’huile, pour une oblation ; une coupe de dix sicles, en or, pleine de parfum ; un jeune taureau, un bélier, un agneau d’un an, pour holocauste ; un jeune bouc, pour expiatoire ; et, pour le sacrifice de rémunération, deux taureaux, cinq béliers, cinq boucs, cinq agneaux d’un an. Telle fut l’offrande de Paghïel, fils d’Okhran.

יְהִי רָצוֹן מִלְפָנֶיךָ יְיָ אֳלֹהַי וֵאלהֵי אֲבוֹתַי שֶׁתָּאִיר הָיוֹם בְּחַסְדְּךָ הַגָּדוֹל עַל נִשְׁמַתִין קָדִּישִׁין דְּמִתְחַדְשִׁין כְּצִפָּרִים וּמְצַפְצְפִין וּמְשַׁבְּחִין וּמְצַלְּאִין עַל עַמָּא קַדִּישָׁא יִשְׂרָאֵל. רִבּוֹנוֹ שֶל עוֹלָם תַּכְנִיס וּתְעַיֵיל הַנַּךְ צִיפָרֵי קַדִּישֵׁי לַאֲתַר קַדִּישָׁא דְּאִיתְמַר עֲלֵייה עַיִן לֹא רָאֲתָה אֳלֹהִים זוּלָתֶךָ. יְהִי רָצוֹן מִלְּפָנֶיךָ יְיָ אֱלֹהַי וֵאלֹהֵי אֲבוֹתַי שֶׁבְּאִם אֲנִי עַבְדְּךָ מִשֵּׁבֶט אָשֵׁר שֶׁקָּרָאתִי בְּתוֹרָתֶךָ פַּרְשָׁה שֶׁל הַנָּשִׁיא הַיוֹם אֲזַי יָאִירוּ נָא עָלַי כָּל נִיצוֹצִין קַדִּישִׁין וְכָל הָאוֹרוֹת הַקְּדוֹשׁוֹת הַכְּלוּלוֹת בִּקְדוּשַׁת זֶה הַשֵּׁבֶט לְהָבִין וּלְהַשְׂכִּיל בְּתוֹרָתֶךָ וּבְיִרְאָתֶךָ לַעַשׂוֹת רֱצוֹנְךָ כָּל יְמֵי חַיַי אֲנִי וְזַרְעִי וְזֶרַע זַרְעִי מֵעַתָּה וְעַד עוֹלָם אָמֵן:

Puisse être Ta volonté, Éternel mon D.ieu et D.ieu de mes pères, que dans Ta grande bonté Tu éclaires les âmes saintes qui se renouvellent comme des « oiseaux » et chantent et disent des louanges et prient au nom du peuple saint d’Israël. Maître du monde, recueille et fait entrer ces « oiseaux » sacrés dans le lieu saint dont il est dit : « Aucun œil ne l’a vu, sauf toi, ô Dieu. » Puisse être Ta volonté, Éternel mon D.ieu et D.ieu de mes pères, que si moi, Ton serviteur, je suis de la tribu d’Asher dont j’ai lu aujourd’hui dans Ta Torah la section du Nassi, que toutes les « étincelles » saintes et toutes les illuminations saintes qui sont incluses dans la sainteté de cette tribu brillent sur moi, pour me donner la compréhension et l’intelligence dans Ta Torah et la crainte de Toi, pour accomplir Ta volonté tous les jours de ma vie, moi et mes enfants et les enfants de mes enfants, de maintenant à jamais. Amen.

 

 

 

Hayom Yom du 11 Nissan : Durant le jour de son anniversaire, un homme doit s’isoler et faire Techouva

Hayom Yom du 11 Nissan : Durant le jour de son anniversaire, un homme doit s’isoler et faire Techouva

 

ביום ההולדת על האדם להתבודד, ולהעלות זכרונויתיו ולהתבונן בהם, והצריכים תיקון ותשובה – ישוב ויתקנם.

Durant le jour de son anniversaire, un homme doit s’isoler, évoquer ses souvenirs et y méditer, réparer tout ce qui doit l’être et faire Techouva.
11 Nissan 5784 – 122ème anniversaire du Rabbi de Loubavitch

11 Nissan 5784 – 122ème anniversaire du Rabbi de Loubavitch

Un anniversaire est toujours une occasion solennelle. Mais il est d’abord le repère qui permet de mesurer les progrès réalisés pendant la période écoulée. C’est ainsi que sa célébration fait sens : elle permet de prendre conscience et, ainsi, de rassembler ses forces pour un départ recommencé.

Cette semaine, le 11 Nissan est l’anniversaire de la naissance de Rabbi Menahem Mendel Schneerson, celui qui, pour tant de Juifs autour du monde, reste, tout simplement, « le Rabbi ». Un tel jour est, en soi, significatif. Par tout ce qui souligne l’importance de l’idée d’anniversaire, il porte clairement à conséquences. Nos Sages nous l’enseignent : c’est le moment où « sa puissance spirituelle est dominante ». C’est dire qu’il convient de s’y arrêter et d’y réfléchir un instant. De fait, que d’actions entreprises, que d’accomplissements nouveaux, que de lien avec D.ieu renforcé par l’étude de la Torah et la pratique de ses commandements en cette année ! A toute réussite, il existe une source et à toute œuvre une âme. Sans se tromper, chacun sait profondément que c’est dans le Rabbi et son enseignement qu’ici on les trouve.

Il est vrai que, au fil des décennies écoulées, le monde a changé. Alors que les frontières se sont souvent peu à peu effacées, que les moyens de communication ont réduit les distances d’une façon inimaginable il y a peu, que l’homme, ivre de puissance, a tendance à oublier ses faiblesses, voici que le peuple juif revient, avec obstination, à l’héritage millénaire transmis par ses ancêtres. Ouvert au monde, voici qu’il retrouve ces chemins-là qui, venus du passé, garantissent pourtant l’avenir. Et chacun de s’interroger : comment a commencé cette renaissance ? Où en a été le moteur ? Qui en préserve la puissance ? Alors que le 11 Nissan éclaire l’horizon de cette force particulière qu’a l’anniversaire du Rabbi, nous percevons la réponse. Une sagesse, un souci de chaque instant n’ont pas cessé de porter ce ressourcement. C’est à cette cause libératrice que le Rabbi s’est consacré.

Et ce n’est pas un hasard – mais quand l’est-ce ? – si ce jour tombe naturellement à proximité de la fête de Pessah. Pourrait-il y avoir meilleure préparation au « temps de notre liberté » que ce jour qui nous rappelle que la liberté est, à la fois, un don et une conquête, comme une force en mouvement dont l’effet ne s’arrêtera qu’avec la Libération majeure, celle qu’apportera Machiakh.

Rabbi Menahem Mendel Schneerson est né le 18 avril 1902 (11 Nissan 5662) à Nicolaïev, en Ukraine, au foyer de Rav Levi Yits’hak et de la Rebbetzin Chana Schneerson. Son grand-père maternel est le Rav Meïr Chlomo Yanovsky, le rabbin de Nicolaïev.

Egalement connu par ses fidèles comme le Rebbe ou le Rabbi de Loubavitch, est le septième héritier de la dynastie du Hassidisme HaBaD fondée en 1797 par Rabbi Schnéour Zalman de Lyadi. Il fut un des leaders spirituels du judaïsme mondial et notamment de la mouvance loubavitch depuis 1950 à la suite du décès de son beau-père Rabbi Joseph Isaac Schneersohn. Il a notamment encouragé et agi pour la diffusion du judaïsme et la fondation d’un réseau d’institutions d’études juives et de l’enseignement de la Torah. Le Rabbi de Loubavitch n’a pas eu d’enfants mais a légué depuis son décès en 1994, plus de 5000 institutions à travers le monde.

Il porte le même patronyme que Rabbi Yossef Its’hak Schneersohn, son futur beau-père auquel il succèdera du fait que tous deux descendent, à travers deux lignées différentes, de Rabbi Menahem Mendel, troisième de la lignée, le célèbre Tsemah Tsedek.

Il passe sa jeunesse à Iékatérinoslav (rebaptisée Dniepropetrovsk par les Bolchéviks) dont son père, Rav Levi Yits’hak, est le rabbin.

Rav Levi Yits’hak est un maître inspiré de la Kabbale, qui explore le Zohar et le Talmud. Contre toute attente, le futur Rabbi de Loubavitch ne fréquente pas de yéshiva (école talmudique). En dehors d’un premier maître avec lequel il fait ses premiers pas dans les textes — et auquel il voue une éternelle déférence —, son père est son unique précepteur.

Rav Levi Yits’hak prescrit à son fils un cursus drastique d’études quotidiennes allouées à la Torah et lui accorde les heures qui restent pour s’alimenter, dormir et pour les études profanes avec différents professeurs de la ville. L’enfant accumule les lectures, dévore des dictionnaires de langues, tout en passant le plus clair de son temps à étudier les ouvrages dont il devra un jour assurer l’héritage. Sa mère se plaît à vanter ses capacités d’absorption — celles qui lui permettront, le moment venu, de dicter la réponse à une lettre en en lisant trois autres. On sait également qu’il ne prise guère les distractions de son âge et que les livres sont déjà sa patrie.

Pour les qualités humaines, sa mère relate tardivement qu’il sauta à l’âge de dix ans dans le Dniepr gelé pour sauver un enfant qui se noyait et qu’il manque d’être emporté par le typhus, contracté lors d’une épidémie après s’être porté secouriste volontaire. Le jeune homme s’intéresse à tout, c’est-à-dire à tous les déploiements intellectuels dont il fera plus tard usage pour « valoriser le Créateur et la profession de foi rédemptrice de la Torah ». Il s’inscrit en candidat libre dans divers établissements et y obtient des diplômes.

Au moment où il rencontre Rabbi Yossef Yits’hak en 1923, à Rostov, il est quasiment inconnu de la communauté hassidique qui campe autour du maître. Elle est même un peu surprise par ce jeune homme de vingt et un ans, impeccablement mis et aux manières raffinées, d’autant plus que l’on saura vite que le sémillant jeune homme est destiné à épouser la dernière des filles du Rabbi : Chaya Mushka Schneerson. Le Rabbi rassure ses disciples en attestant que ce jeune homme un peu suspect sait mot à mot les deux Talmud et les grands décisionnaires, et que les larmes qu’il verse lors du Tikoun ‘hatsot — ces lamentations que les très pieux récitent quotidiennement à minuit — sont indicibles.

En 1927, le régime de Staline commence à réprimer les institutions religieuses et Rabbi Yossef Yits’hak, qui ne laisse planer nulle équivoque sur le mépris qu’il voue à ce régime et du peu de cas qu’il fait de son règlement, est arrêté. La sentence de mort prononcée contre lui est commuée en exil et durant l’été suivant, il doit quitter la patrie du ‘hassidisme pour Riga où il établira six ans durant son « gouvernement en exil». Il emmène sa famille, ses proches disciples et son futur gendre.

Le 27 novembre 1928 à Varsovie, Rabbi Menahem Mendel épouse la fille de Rabbi Yossef Yits’hak, la Rebbetzin Chaya Mushka Schneerson. Ce mariage est célébré dans la capitale polonaise, haut lieu du judaïsme d’Europe centrale. Des sommités rabbiniques, dont le lieu foisonnait à l’époque, eurent alors l’occasion de mesurer la texture intellectuelle de cet homme apparu ganté de blanc qui leur fournit une matière édifiante.

Le nouveau couple part ensuite s’installer à Berlin où le futur Rabbi fréquentera l’université, et un grand nombre d’intellectuels juifs (il se souviendra par la suite d’y avoir vu Albert Einstein jouer du violon).

En 1933, la montée au pouvoir du nazisme les fait quitter Berlin pour Paris. Là, il fréquentera la Sorbonne et d’autres établissements de l’enseignement supérieur tout en revivifiant l’esprit des nombreux réfugiés que la tourmente commence à déverser dans la ville des lumières. Il assure aussi un cours quotidien à l’oratoire du 17 rue des Rosiers.

Ceux qui fréquentent le couple, qui habite à quelques pas de la station Mouton-Duvernet, attesteront que l’ouverture de cet homme aux êtres et aux idées cohabite avec une piété méticuleuse. De son séjour dans la capitale française, le Rabbi gardera toute sa vie un attachement particulier au judaïsme français, dont l’histoire par la suite le lui rendra bien. Au point même que lors d’un mémorable Sim’hat Torah en 1974 à New York, auquel assistaient quelque cinq cents Français, il fit danser les Français sur l’air de la Marseillaise qu’il entonna sur les paroles d’un cantique à la gloire de Dieu, récité le Chabbath et les jours de fêtes à la synagogue.

Suite à l’invasion de la France en 1940, il quitte Paris pour la zone libre. Son périple le conduit à Vichy puis à Nice. Certains témoignages attestent qu’il y aura des liens avec la résistance locale, et qu’il emmènera même des jeunes en montagne la nuit pour confectionner des Matsot à l’approche de Pessa’h.

Entretemps, en Russie, son père exaspère les Bolcheviks en refusant de jouer leur jeu. Une nuit précédant la fête de Pessa’h 1939, le NKVD fait irruption chez lui et l’emmène. Après avoir transité de prison en prison, il est envoyé en exil dans un cloaque du Kazakhstan où il décède le 9 août (20 Av) 1944 dans un état de déchéance physique. C’est là-bas qu’avec de l’encre confectionnée par son épouse – laquelle l’aura rejoint entre temps – il écrira ses commentaires kabbalistiques du Zohar, sur les marges des quelques livres qu’il aura pu emporter. Son fils les publiera par la suite et les commentera abondamment.

En mai 1941, le Rabbi et son épouse embarquent à Marseille pour Barcelone. Peu après, ils embarqueront à Lisbonne pour accoster à New York le 23 juin 1941. Son beau-père s’y trouve depuis mars 1940 après avoir échappé d’une façon aussi rocambolesque que miraculeuse à l’anéantissement des Juifs de Varsovie.

Rabbi Menahem Schneerson, qui arrive à New York, est aussi méconnu de la colonie Loubavitch américaine qu’il l’était de l’entourage de son beau-père en Russie. Dans un premier temps, il se consacre exclusivement à la maison d’édition fondée par son beau-père et qui s’est donné pour tâche de publier l’immense patrimoine accumulé depuis deux siècles.

Mais la santé de son beau-père décline et il est appelé à le remplacer pour célébrer les Farbrenguen, ces réunions ‘hassidiques au cours desquelles les interventions du Rabbi alternent avec les chants. C’est ici que l’on va découvrir la trempe de cet intellectuel que son beau-père appelle « mon ministre de la culture ». Dans ses interventions, il fait sauter les clivages qui cloisonnent apparemment les diverses disciplines du savoir accumulé par la tradition juive. Le pilpoul talmudique est soudain chamarré de Kabbale, le sens littéral devient écarlate quand la sève du Hassidisme HaBaD les irrigue et les irradie. Cet homme qui n’a pas cinquante ans fait boire, danser, exulter et réfléchir des doctes qui ont parfois deux fois son âge et qui n’aperçoivent rien de semblable dans leur expérience passée.

Au printemps 1947, il fait son ultime voyage à l’étranger en revenant à Paris accueillir sa mère qui à réussi à quitter l’Union soviétique. Il ne quittera plus jamais son fief de Crown Heights à Brooklyn.

Le 17 janvier 1951, Rabbi Menahem Mendel Schneerson reprend le siège laissé vacant par la Histalkout (décès) de son beau-père un an auparavant et devient le septième Rabbi de Loubavitch. Il abat très vite ses cartes et sa profession de foi se résume en un mot : « Oufaratsta » (voir verset biblique Genèse 28,14 : « Ta descendance sera (innombrable) comme la poussière de la terre; Et tu t’étendras (« oufaratsta ») à l’ouest, à l’est, au nord et au sud » ), la « diffusion de la Torah et de ses valeurs vers tous les horizons juifs qu’elles n’ont pas encore atteints ». C’est le saut à corps perdu dans cette entreprise qui attestera du véritable attachement de ses hassidim à son enseignement. Les farbrenguen qu’il célèbre – lesquels peuvent parfois durer huit heures et plus, et durant lesquels il discourt sans notes – exaltent jusqu’à ceux qui n’entendent pas un mot à son yiddish talmudique et didactique.

Dans ce foisonnement d’enseignements, une profession de foi générique : le refus de relativiser le moindre aspect d’une Torah divine, servi par un désir effréné d’asseoir chaque enseignement dans le monde du concret. Le déploiement in extenso de toutes ses interventions approche la centaine de volumes. Il discourt et chante, mais écrit aussi, et à tous. Aux rabbins, aux hommes d’État, à des artistes, des écrivains – Élie Wiesel compte parmi ceux dont il a marqué l’esprit – à des enfants et à tous ceux qui recherchent son conseil. Quelque trente volumes de sa correspondance ont été publiés.

Il reçoit aussi beaucoup. Pendant plus de trois décennies, il donnera à raison de deux nuits par semaine des audiences privées lors desquelles, durant parfois un tour de cadran, il écoute et conseille ceux qui auront sollicité une entrevue. Il intercède aussi pour ceux qui lui en font la demande. II passe régulièrement des heures, à jeûn, et parfois sous un soleil de plomb à lire, sur la sépulture de son beau-père, les demandes de bénédictions qui affluent tous les jours à son secrétariat.

À l’âge de 76 ans, après un accident cardiaque au beau milieu de la joie des danses de la Fête de Sim’hat Torah en 1978, il récupère difficilement mais continue en refusant de prendre du repos malgré les inquiétudes de son entourage. Il célèbre un farbrenguen toutes les semaines, sans compter des interventions publiques inopinées à l’issue des offices du soir. Les audiences particulières interrompues après son incident cardiaque reprennent en la matière du « dollar » qu’il distribue chaque dimanche matin à des centaines de personnes (religieux, non religieux, hommes, femmes et enfants, célébrités de toutes sphères) qui passent devant lui – parfois pendant huit heures d’affilée – et demandent sa bénédiction et son conseil (pour des questions sur la Torah, mais aussi dans leur travail, leurs relations personnelles ou leurs études).

Au début des années 1980, le Rabbi passe l’ultime et incontournable vitesse. Il annonce que les pas du Messie résonnent déjà et engage tous ceux qui aspirent à eux à les hâter en s’en faisant l’écho par l’étude des enseignements et lois liés à l’époque messianique en s’attachant à convaincre tous ceux qu’ils peuvent atteindre que la venue du Messie est une réalité qui n’attend que notre foi en elle pour prendre corps. Dès lors, à chacune de ses interventions, il accentuera encore l’urgence de l’effort à déployer pour faire aboutir l’ultime parachèvement de la Création. Parallèlement, il encourage avec force et vigueur, dans de nombreuses allocutions, le peuple juif à exhorter tous les peuples de la planète a accomplir leurs part dans la création, but de leur venue sur terre, en respectant le 7 Lois de Noé, tout en continuant leurs activités habituelles, en effet Dieu n’a pas uniquement donné à Moïse sur le Mont Sinaï les décrets a respecter concernant le peuple d’Israël, mais aussi les lois concernant tous les peuples de la terre.

Au début des années 1990, il déclare que les bouleversements politiques intervenus en Europe et qui mettent fin à la Guerre froide sont un signe caractéristique du prochain avènement messianique. Il relie le fait que ces mutations se soient effectuées sans effusion de sang aux prémices d’une ère de paix universelle.

Lorsque éclate la première Guerre du Golfe, il déclare qu’il s’agit de la réalisation des termes du Midrash Yalkout Chimoni annonçant, pour « l’année où le Machia’h se dévoilera », la guerre du dirigeant de la Perse (qui avait dans l’antiquité sa capitale à Bagdad) contre un pays arabe et le désarroi mondial qui en résultera. Suivant l’agencement du récit du Midrash qui relate la façon dont Machia’h rassurera le peuple juif et annoncera la délivrance, en se tenant sur le « toit du Temple » (lieu profane qui, selon le Rabbi, fait allusion à une terre extérieure à Israël), le Rabbi ne cesse d’encourager la population d’« Erets Israël » et annonce prophétiquement qu’il n’y aura à craindre aucune attaque non conventionnelle et que la guerre se terminera à Pourim, contrairement aux prévisions de tous les experts stratégiques. Dans la confusion régnante, il est une des voix qui rassérène et donne espoir aux Juifs du monde entier.

Le soir du 12 avril (28 Nissan) 1991, il admoneste ses hassidim en disant tout l’effort qu’il sollicitait. Il affirme avoir accompli le travail qui relevait de sa tâche et que le reste appartient désormais à ceux qui l’écoutent.

Il passera l’année qui suivra à commenter la section hebdomadaire de la Torah en s’attachant particulièrement à montrer comment le monde dans sa finitude aussi bien que l’homme, tout humain qu’il soit, sont des vecteurs de l’Infini. Engageant chacun à révéler cette dimension dans sa vie quotidienne, il ne cesse d’annoncer qu’il suffit « d’ouvrir les yeux » pour prendre conscience que le seuil de la Rédemption est accessible. Plusieurs de ces éminents hassidim aperçoivent dans un nombre considérable de ces discours la proclamation indirecte de par le Rabbi lui-même d’être le Machiah.

Le 2 mars 1992, alors qu’il se trouve sur le Ohel de son beau-père, une violente attaque cérébrale le soustrait aux yeux d’une communauté juive suspendue à ses lèvres. Après des mois d’une convalescence lors de laquelle il n’a cessé de répondre aux demandes de bénédictions et désormais atteint d’hémiplégie, il réapparaît dans sa synagogue le jour de Rosh Hashana de l’année hébraïque 5753, à l’automne 1992. Trois semaines plus tard, le jour de Sim’hat Torah, il réapparaît aux yeux des hassidim dans sa synagogue…

Le 12 juin 1994, le Rabbi quitte ce monde. Que ce soit en priant dans sa maison d’étude du 770, ou sur le Ohel (tombe du Rabbi et de son beau-père), laquelle est visitée par des centaines, voire parfois des milliers de personnes chaque jour, énormément de Juifs et non Juifs de par le monde déclarent continuer de recevoir miraculeusement conseils et bénédictions de sa part.

le Rav Soloveitchik et le Rabbi de Loubavitch

le Rav Soloveitchik et le Rabbi de Loubavitch

Couverture : Le Rabbi saluant chaleureusement le Rav lors d’un Farbrenguen auquel ce dernier a assisté en l’honneur du trentième anniversaire de la Nessiout du Rabbi en tant que Rabbi de Loubavitch, le 10 Chevat 5740, 28 janvier 1980. 

À première vue, on aurait pu penser que le Rav Yossef Ber Soloveitchik, largement connu sous le nom de « le Rav », et le Rav Menachem Mendel Schneerson, mieux connu sous le nom de « le Rabbi », n’avaient pas beaucoup en commun. Ces deux grands hommes étaient les représentants de deux écoles opposées au sein du judaïsme.

 

Le Rav était un descendant de la septième génération du Rav ‘Haïm Volozhiner, le fondateur de la Volozhin Yeshiva, le modèle de toutes les Yéchivot lituaniennes. Le Rav ‘Haïm Volozhiner était aussi le disciple éminent du Gaon de Vilna, le chef de l’opposition au hassidisme. Le père, le grand-père et l’arrière-grand-père du Rav étaient tous des rabbins de premier plan dans le moule lituanien, sans une once de hassidisme.entre eux. Le Rav Haïm Soloveitchik (Reb Haïm Brisker), le grand-père du Rav, était l’innovateur du « Brisker Dereh « , une méthode d’étude talmudique qui cherche à découvrir les concepts sous-jacents à la Halaha, mais qui ne s’aventure jamais au-delà de la Halaha dans le domaine du mysticisme ou philosophie. Le talmudisme intellectuel et parfois austère des ancêtres du Rav est dépeint dans son ouvrage Halahic Man,

L’approche de la réalité de l’homme alahique est, au départ, dépourvue de tout élément de transcendance…. A qui peut-il être comparé ? A un mathématicien qui façonne un monde idéal et l’utilise ensuite dans le but d’établir une relation entre celui-ci et le monde réel…. Lorsque l’homme halahique rencontre une source qui bouillonne tranquillement, il possède déjà une relation fixe, a priori, avec ce phénomène réel, l’ensemble des lois concernant la construction halahique d’une source…. Lorsque l’homme halahique regarde vers l’horizon occidental et voit les rayons déclinants du soleil couchant ou vers l’horizon oriental et voit les premières lueurs de l’aube et les rayons rougeoyants du soleil levant, il sait que ce coucher ou ce lever de soleil lui impose de nouvelles obligations et commandements.

En revanche, le Rabbi de Loubavitch était le chef de la septième génération de la dynastie ‘Habad ‘hassidique. Le fondateur de la dynastie, le Rav Shneour Zalman de Liadi, connu sous le nom de Baal HaTanya, a porté le poids de l’opposition au hassidisme par les adeptes du Gaon de Vilna. Alors que la dynastie Soloveitchik s’est concentrée sur l’étude de la halaha, en particulier telle que formulée par le rationaliste Maïmonide, les hassidim, et en particulier ‘Habad, ont mis l’accent sur l’étude des textes mystiques et les dimensions spirituelles et émotionnelles du judaïsme. En fait, le Baal HaTanya était également un halahiste. Son Choulhan Arouh HaRav reste à ce jour une source importante de halaha pour les non-hassidim ainsi que pour les hassidim. Mais pour Brisk, le point culminant de l’étude de la Torah consistait à plonger dans les subtilités de la loi, expliquant un différend entre Maïmonide et son principal critique Ravad au sujet de la catégorisation des disqualifications des sacrifices ou de l’impureté des cadavres. Pour Habad, le royaume mystique était à la fois le summum et la condition sine qua non de l’étude de la Torah.

Pourtant, le Rav avait une forte affinité pour Habad, et s’est même qualifié à une occasion de « Habadnik clandestin ». Qu’est-ce qui explique cette affinité pour ‘Habad ? Le Rav a été élevé à Chaslavitch, une ville à forte présence Habad, comme l’a immortalisé la chanson « Fun Chaslavitch biz Loubavitch – De Chaslavitch à Loubavitch », sur le pèlerinage des Hassidim faisaient pour voir leur Rabbi à Loubavitch. Le père du Rav, le Rav Moshe Soloveichik, était le Rav de la ville. Comment une ville ‘Habad en est-elle arrivée à avoir un Soloveitchik et descendant du Rav ‘Haïm Volozhiner comme Rav ?

Le Rav a raconté l’histoire suivante : lorsque Napoléon a envahi la Russie, le Baal Hatanya s’est rangé du côté du tsar. (Il craignait que la politique d’émancipation de Napoléon ne conduise à l’assimilation). Le Baal HaTanya reçut des informations du cartographe de Napoléon, Moshe Meizlish, qu’il transmit aux Russes. L’armée de Napoléon avait fait une recherche maison par maison à Chaslavitch, pour savoir où se cachait le Baal HaTanya. Lorsqu’ils atteignirent la maison du Rav de la ville, le Rav Israël, qui était un étudiant du Gaon de Vilna, le Rav Israël dit aux soldats français que si le Baal HaTanya était caché dans sa maison, il le retournerait volontiers. Le français, apparemment conscient de l’inimitié entre les deux groupes, ,ne fouilla pas la maison où le Baal Hatanya se cachait en fait. Par conséquent, le Baal Hatanya a déclaré que Chaslavitch devrait désormais toujours avoir un Misnaged comme rabbin.


Le Rav et le Rabbi lors d’un dîner pour la Loubavitch Yeshiva en 1942. De gauche à droite : Le Rav, qui a prononcé le discours d’ouverture ce soir-là ; Rabbi Shmaryahu Gurary, beau-frère du Rabbi; Rabbi Yosef Its’hak Schneersohn, beau-père du Rabbi et sixième Rabbi de Loubavitch; et le Rabbi. Avec l’aimable autorisation de JEM

 

Le professeur de ‘Heder du Rav était un Hassid ‘Habad ‘, qui mettait l’accent sur l’étude du Tanya au détriment du Talmud. Une fois, après que le Rav Haïm ait testé son jeune petit-fils Yoshe Ber, il a demandé que le Rav Moshe soit le tuteur de son fils, ce qu’il fit à partir de ce moment. Néanmoins, le Mélamed ‘Habad du Rav a eu un impact profond sur son élève précoce. Le Rav a évoqué l’influence de son Mélamed sur sa trajectoire de vie dans une lettre qu’il a écrite à son ami et collègue le Rav Moshe Dov-Ber Rivkin, un distingué Loubavitch Talmid ‘Ha’ham et Rosh Yechiva de Torah Vedaat.

Pendant que je parle, je me souviens d’une vision de ma jeunesse, enveloppée d’une innocence enfantine, vêtue d’une splendeur nostalgique…. L’image de mon professeur, le Rav Barouh Yaakov Reisberg, se dresse devant moi. Je vois encore son visage, dégageant calme et sagesse, imagination et ingéniosité. À ce jour, j’entends sa voix dans le silence du crépuscule, empreinte de chagrin et de nostalgie. Ses mots franchissent le gouffre, des mots pleins de passion et d’interrogation sur le temps de sa jeunesse passée à Loubavitch. Je porte encore au plus profond de mon âme l’image du Alter Rebbe qui nous regardait de haut depuis les murs du ‘Heder, ce front large et cette intelligence autoritaire, ces grands yeux qui scrutaient les infinis divins, éternellement captivés par l’émerveillement…. Je vois encore l’image du Tsemah Tsedek, vêtu de blanc, qui, dans notre fantasme d’enfance, s’est métamorphosé en Kohen Gadol, sortant du Saint des Saints…. Je rêve encore des hassidim âgés dansant rapidement autour de mon père la nuit de Chemini Atseret. Ces impressions ne s’effaceront jamais de mon cœur, ils sont profondément enracinés dans les replis de mon être.

Après le décès du Rav Rivkin en 1976, le Rav lui fit un éloge pendant une heure entière après l’un de ses Chiourim réguliers de Gemara dans la synagogue Moriah :

Que sais-je sur Habad ? J’en sais pas mal, puisque enfant j’avais un Mélamed qui était hassid Habad. Au lieu de m’enseigner la Guemara, il m’a appris le Hassidout. Aujourd’hui encore, je connais encore par cœur des sections du Tanya, en particulier le Sha’ar ha-Yihud ve-ha-Emunah, traitant de la foi et des attributs du Tout-Puissant. C’est mon père qui m’a enseigné la Guemara et m’a permis de maîtriser l’idiome rabbinique. Néanmoins, sans mon Mélamed Habad, il me manquerait aujourd’hui toute une dimension du savoir. Beaucoup de mes ébauches sont basées sur les connaissances qui m’ont été transmises par ce Mélamed. Ceux qui aiment mon brouillon lui doivent un merci. Il s’appelait Reb Barouh Yaakov Reisberg, et je me souviens qu’il m’a dit qu’il était un descendant de l’auteur du Tanya, le fondateur de Habad.

Je me souviens très bien comment Reb Barouh enseignait le Tanya. Pendant cette période, mon père visitait les Hadarim à Khaslavitche le jeudi ou le vendredi. Le Mélamed avait des guetteurs qui l’informaient lorsque le Rav était en route. Immédiatement, les volumes de Tanya étaient cachés. Le Tanya était un petit livre et il était facile de le cacher. Nous sortions rapidement les grand Gemarot et criions comme si nous étions profondément impliqués dans l’étude talmudique. D’une manière ou d’une autre, nous avons toujours crié lorsque nous avons étudié la Guemara. Mon père regardait autour de lui et ne remarquait rien d’anormal.

Une fois, cependant, alors que j’accompagnais mon père à un mariage à Brisk, mon grand-père Reb ‘Haïm m’a testé. Au lieu de réciter des portions de Merubah [le septième chapitre de Baba Kama ] que nous étions censés étudier, j’ai récité des sections du Tanya par cœur. Mon père et mon grand-père étaient peut-être en colère, mais j’ai une dette envers le Mélamed. Ses enseignements ont élargi mes horizons dans le judaïsme. Le Mélamed m’a inspiré avec ses descriptions de la Royauté de Dieu et des Sefirot, ou émanations, de la Présence Divine. Le Mélamed avait étudié à la Yechiva de Loubavitch, et sa façon de parler m’a élevé et transformé. À l’époque, j’étais trop jeune pour vraiment comprendre bon nombre de ses enseignements. Ce n’est que plus tard que j’ai compris et apprécié les leçons dans toute leur profondeur. Il m’a appris à prier avec émotion et extase, et m’a donné une appréciation pour les prières du Grand Jour Saint. Je pense souvent à lui à Roch Hachana et à Yom Kippour.

« Faites quelque chose de simple », disait-il, « mais faites-le avec émotion et sentiment. » C’est le message fondamental de Habad. Faites quelque chose de banal et de simple, mais faites-le avec une inspiration et une signification divines ! C’est le message général de la Hassidout et certainement la pierre de touche de Habad.

Le Rav portait une forte affinité pour ‘Habad, et s’est même qualifié à une occasion de « Clandestin « Habadnik ».

Je me souviens quand mon ami, Menahem Kasdan, un camarade de classe du Rav, a visité l’Union soviétique en 1968 et a rencontré le professeur du Rav, le Rav Reisberg. Lorsque Kasdan a rapporté sa rencontre au Rav, le Rav a été sidéré de découvrir que son professeur était toujours en vie. Kasdan a décrit ce qui s’est passé :

Alors que nous marchions dans le couloir, un homme est sorti du Beit Midrach et nous a dit que quelqu’un désirait nous rencontrer. J’étais émerveillé. Je ne connaissais personne en Russie. Qui veut me rencontrer ? Un homme grand et mince est sorti et nous a dit en Yiddish : « J’ai entendu dire que vous avez étudié avec un de mes étudiants ». Je n’avais pas la moindre idée de ce dont parlait cet homme. Il a poursuivi : « Hier, vous avez dit que vous aviez étudié avec le Rav Soloveitchik. » Je me souviens clairement de sa phrase suivante, même si mon Yiddish n’était pas le meilleur. « Er iz geven meiner ah talmid » (C’était mon élève)…. J’ai demandé à l’homme : « Voulez-vous que j’envoie un message au Rav » ? Il a dit : « Envoyez-lui les salutations de Reb Barouh. » « Reb Barouh qui » ? ai-je demandé. Il a dit : « Reb Barouh de Khaslavitchy. Cela suffira ». Bien que j’aie entendu le Rav parler de ce Mélamed à plusieurs reprises, je n’ai jamais entendu mentionner son vrai nom. Maintenant, pour la première fois, j’ai appris qu’il s’appelait Barouh.

De retour à New York, je suis allé voir le Rav après son Chiour pour lui raconter cette expérience. Le Rav était très fatigué après sa conférence. J’ai dit au Rav que j’avais de l’estime pour lui.

« De qui » ? demanda le Rav.

J’ai répondu : « Il ne m’a pas dit son nom complet. Il a juste dit de dire au Rav qu’il a les salutations de Reb Barouh de Khaslavitche ».

En entendant ce nom, il y eut une réponse électrisante de la part du Rav. Son corps tout entier s’anima lorsqu’il s’exclama : « C’est impossible. Ça ne peut pas être. Reb Barouh Reisberg ne peut pas être en vie. Il doit être mort ! »

« Mais, Rav, » dis-je, « vous n’avez jamais mentionné son nom. Je n’aurais pas pu vous dire son nom sans l’entendre de Reb Barouh ».

« D’accord », dit le Rav. « Alors il doit être un très vieil homme ». Par la suite, j’ai entendu dire qu’au cours des années suivantes, lorsque le Rav racontait des histoires sur son Melamed, il mentionnait qu’un de ses élèves avait rencontré le Mélamed en Russie.

Fait intéressant, le Rav aimait citer un enseignement de son Mélamed sur Yossef et ses frères lorsque Yossef a demandé à ses frères s’ils avaient un père (comme indiqué dans Houmach Mesoras HaRav, pp. 328-29):

Je me souviens d’un incident de mon enfance. J’avais sept ou huit ans dans une petite ville de la Russie blanche et, comme tous les garçons juifs, j’ai fréquenté la petite école de ‘Heder. Je me souviens encore de cette morne journée d’hiver de janvier, c’était nuageux et couvert. La portion Torah de la semaine était Vayigash, et Hanoucca venait de se terminer, emportant avec elle l’esprit joyeux des fêtes de notre petite ville. Un hiver long et sombre nous attendait, garçons du Heder. Il fallait se lever quand il faisait encore noir et rentrer à la maison avec une lanterne, car la nuit tombait si tôt. Ce jour-là, nous, les garçons du Heder, étions déprimés, paresseux et apathiques. Nous avons chanté machinalement les premiers versets de Vayigash d’un ton monocorde terne, bourdonnant les mots en hébreu et les traduisant en Yiddish. Un garçon finit de réciter la question de Yossef : « Hayech lahem av, as-tu un père » ? et la réponse : « Yesh lanou av zaken : Oui, nous avons un vieux père.

Puis quelque chose d’inhabituel s’est produit. Notre professeur, un ‘Habadnik, a soudainement sauté sur ses pieds et, avec une lueur dans les yeux, a fait signe au lecteur de s’arrêter. Il se tourna vers moi et m’adressa le mot russe podrabin, signifiant assistant du rabbin. Le professeur m’a demandé : « Quel genre de question Yossef a-t-il posée à ses frères : ‘Hayesh lahem av, avez-vous un père ?’ Bien sûr qu’ils avaient un père, tout le monde a un père ! La seule personne qui n’avait pas de père était Adam, créé par D.ieu. Mais tous les autres nés dans ce monde ont un père. Quel genre de question était-ce ? J’ai essayé d’offrir la réponse : « Yossef voulait simplement savoir si le père était toujours en vie ». « Avez-vous un père ? signifie en réalité : Est-il vivant ou est-il mort » ?

« Si c’est le cas », me tonna notre professeur, « Yossef aurait dû formuler la question différemment : Votre père est-il toujours en vie »? Il était inutile de discuter avec notre professeur. Il ne s’adressait plus seulement à nous, petits garçons. Il se mit à parler de manière rhétorique comme si un mystérieux invité venait d’entrer dans cette chambre froide. « Yossef, disait notre professeur comme du haut d’une chaire, voulait savoir si ses frères étaient encore attachés à leurs racines et à leurs origines. « Êtes-vous, demandait Yossef, enraciné dans votre père ? Le regardez-vous comme les branches ou les fleurs regardent leurs racines ? Considérez-vous votre père comme le fondement de votre existence ? Le voyez-vous comme votre pourvoyeur et votre soutien ? Ou êtes-vous comme des bergers déracinés errant d’un endroit à l’autre, d’un pâturage à l’autre, qui oublient leur origine »? Notre professeur cessa soudain de s’adresser au visiteur invisible et se concentra directement sur nous. Élevant la voix, il nous demanda : « Êtes-vous vraiment humbles ? Regardez-vous avec condescendance votre vieux père comme représentant une tradition archaïque ? Pensez-vous que votre vieux père est également capable de vous dire quelque chose de nouveau ? Quelque chose de difficile? Quelque chose que vous ne saviez pas avant ? Ou êtes vous si arrogants et vaniteux que vous refusez de dépendre de votre père, de sa source ? Notre professeur s’est exclamé : « Hayesh lahem av, As-tu un père » ? désignant mon camarade d’étude Isaac, qui était considéré comme le prodige de la ville. Le professeur s’est tourné vers lui et lui a dit: « Qui en sait plus selon toi ? En sais tu plus parce que tu es versé dans le Talmud, ou ton père, Jacob le forgeron, en sait-il plus, même s’il peut à peine lire l’hébreu ? Es-tu fier de ton père ? Lorsque nous reconnaissons la suprématie de notre père, alors, ipso facto, nous acceptons la suprématie de notre Père Céleste.

Je n’oublierai jamais la nouvelle interprétation de l’histoire de Yossef par notre professeur.

L’attachement du Rav aux enseignements du Baal HaTanya s’est poursuivi tout au long de sa vie. Un été, alors que j’étudiais avec le Rav et un petit groupe d’étudiants à Boston, le Rav nous a dit : « Min ken nisht farshteyn Elul ohn Likkutei Torah – Vous ne pouvez pas comprendre le mois d’Elloul sans étudier l’œuvre du Baal HaTanya, Likkutei Torah ». Il a obtenu des exemplaires du Likoutei Torah pour nous tous, mais il ne l’a enseigné qu’une seule fois. Il pensait que nous, les étudiants, surtout moi, n’étions pas si intéressés, mais en vérité, nous étions complètement innocents de son accusation. A l’époque, il nous racontait l’histoire (fictive) de YL Peretz sur le Beth HaLevi, arrivé au Beth midrash d’un ancien élève devenu ‘Hassid et était maintenant le Bialer Rebbe. Selon l’histoire, alors que le Bialer Rebbe parlait, l’après-midi hivernal s’est transformé, le soleil a émergé, la neige a fondu et les arbres ont commencé à fleurir. Alors le Beth HaLevi regarda sa montre et dit : « C’est presque le coucher du soleil. Nous devons prier Min’ha », et l’hiver glacial est revenu. Le Rav m’a regardé et m’a dit : « Genack, c’est toi ! (bien qu’encore une fois, j’insiste sur le fait que je n’avais aucune objection à ce qu’il enseigne le Baal HaTanya).

Parmi les camarades étudiants du Maguid de Mezritch, le Baal HaTanya était connu sous le nom de « Der Litvak ». Peut-être que le Rav ressentait une parenté avec son compagnon Litvak. Même si le Rav n’a pas réussi à nous le transmettre, il pensait que le Baal HaTanya était un penseur profond et que ses Sefarim étaient essentiels pour comprendre l’expérience religieuse d’Eloul et de la Yahadout en général.

Le Rav Yehouda Krinsky, qui était alors le secrétaire particulier du Rabbi, écrivit une lettre au Rabbi pour l’informer que le Rav enseignait le Likoutei Torah à ses élèves. Le Rabbi a répondu qu’il serait intéressant de montrer au Rav – en soulignant les mots  « pas en mon nom », les commentaires du Tsemah Tsedek sur ces passages du Likoutei Torah.

Après le décès du Rav Moshe Soloveichik, le sixième Rabbi de Loubavitch, le Rav Yosef Its’hak Schneersohn (connu sous le nom de Rabbi Rayats), a écrit une lettre de soutien au Rav assumant le poste de son père à la Yeshiva University. Après que le Rav ait pris le poste, le Rayatz a écrit une lettre de félicitations au Rav, décrivant l’amitié entre son père, le cinquième Rabbi (connu sous le nom de Rashab), et Reb ‘Haïm Brisker, y compris comment ils ont passé la Fête de Chavouot ensemble à Saint-Pétersbourg après la conférence rabbinique de la ville.

Lorsque le Rav était dans l’année de deuil de son père, il visita ‘Habad, où il monta au Amoud comme Chalia’h Tsibour. Le Rayatz lui a rappelé qu’en tant que Chalia’h Tsibour dans un Minyan ‘Habad, il devrait prier le Noussa’h Ari comme la coutume Habad, et ce, même dans la Amida silencieuse. Le Rav a répondu : « Bien sûr. C’est ce que dit le Pe’at Hachoulhan », citant un ouvrage du Rav Israël de Shklov, l’un des principaux étudiants du Gaon de Vilna.

Lorsque la mère du Rav, la Rabbanit Pesia Soloveichik, est décédée, le Rav a appelé le Rav Krinsky, et lui a demandé de trouver des étudiants Loubavitch pour creuser la tombe. Seuls les élèves de Loubavitch étaient admis car ils portaient la barbe et ressemblaient donc à des rabbins, alors que les élèves du Rav eux-mêmes n’avaient pas de barbe.

Voici quelques anecdotes sur les interactions entre le Rav et le Rabbi que je connais soit directement du Rav, soit de seconde main.

Le Rav ‘Haïm Ciment, qui était le Rav Habad de Brookline, dans le Massachusetts, a demandé un jour au Rav de lui parler de son séjour à Berlin avec le Rabbi. Le Rav a dit au Rav Ciment qu’une fois à Pourim à Berlin, le Rabbi a été arrêté après avoir accompli la mitsva de « ad d’lo yada » (que le Rabbi a accomplie par l’ébriété). Le Rav s’est porté garant du Rabbi et l’a fait sortir de prison. A sa libération, le Rav, faisant allusion aux difficultés que les illustres prédécesseurs du Rabbi avaient rencontrées avec les autorités tsaristes, lui dit : « Maintenant que tu as été arrêté, tu es qualifié pour devenir Rabbi ».

Le Rav m’a dit un jour que Yaakov Herzog, le diplomate israélien, lui avait dit au nom d’un haut fonctionnaire du Département d’État que le seul qui savait ce qui se passait en Union soviétique était « un vieux Rav vivant à Brooklyn » c’est-à-dire le Rabbi.

Le Rabbi a également partagé avec le Rav un amour pour le Rambam. Il a institué un programme d’étude quotidienne Michné Torah du Rambam pour ses disciples. Dans les Si’hot du Rabbi, le Rambam est souvent au centre de ses interprétations, d’une manière que même un non- Hassid peut apprécier. En particulier, le Rabbi aimait le Tsofnat Pane’ach du Rav Yossef Rosen, le Gaon Rogatchover, dont le Rabbi avait également reçu sa Smi’ha, ordination rabbinique. Selon la tradition, le Rogatchover et Reb ‘Haïm alors jeunes, ont étudié ensemble avec le père de Reb ‘Haïm, le Beth HaLevi. Bien que l’approche de Rogatchover soit différente de celle de Brisk, les deux considèrent le Rambam comme la principale autorité avec laquelle il faut compter, et les deux cherchent à trouver les fondements conceptuels sous la surface des lois.

Le Rabbi a écrit que sa relation avec le Rav était « beaucoup plus grande que ce que les gens savaient ».

Le Rav a effectué une visite aux Chiva du Rabbi lorsque la mère du Rabbi est décédée en 1964. Au cours de la visite, le Rabbi a fait référence au point de vue du Rambam selon lequel « Aninout », le statut de deuil immédiatement après la mort d’un parent, ne persiste que jusqu’à l’enterrement. Le Rav a répondu que ce n’était pas le point de vue du Rambam. Alors que le Rabbi commençait à se lever de son siège pour prendre un livre du Rambam, le Rav lui assura respectueusement qu’il n’avait pas besoin de s’en soucier car il n’y avait pas un tel enseignement dans le Rambam. Dans une lettre ultérieure au Rav écrite la veille de Souccot, le Rabbi a souligné le commentaire du Rambam sur la Mishna ( Demaï 1: 2) comme source de cette vision du Rambam, mais il note que dans la traduction du commentaire du Rav Kapach, la vision du Rambam est différente, conformément à sa vision ailleurs. (En fait, même dans l’édition standard du commentaire, le Rambam ne dit pas que l’Aninout ne persiste que jusqu’à l’enterrement, et on ne sait pas ce que le Rabbi a vu dans les paroles du Rambam ici.) Le Rabbi a alors écrit au Rabbi Shlomo Yossef Zevin, l’éditeur fondateur de l’Encyclopédie Talmudit et Hassid ‘Habad, demandant pourquoi le point de vue du Rambam dans son commentaire sur Demaï n’est pas mentionné dans l’Encyclopédie.

Lorsque le Rav se rendit au Farbrenguen du Rabbi, le 10 Chevat 5740 (28 janvier 1980), en l’honneur du trentième anniversaire de la direction du Rabbi, le Rabbi montra au Rav un immense respect. Lorsque le Rav s’est levé pour partir, le Rabbi s’est levé et est resté debout jusqu’à ce que le Rav quitte la synagogue. J’ai demandé au Rav, le lendemain si la raison pour laquelle il avait assisté au Farbrenguen du Rabbi était parce que le Rabbi avait accès aux écrits perdus de Reb Haïm. Le Rav a dit que cette rumeur était absolument fausse. Les raisons pour lesquelles il était venu étaient : « C’est mon ami, je l’admire, et ils m’ont demandé d’y aller ».

Le Rav et le Rabbi avaient certains points communs profonds qui l’emportaient sur leurs différences ancestrales. Ces deux descendants de la septième génération de leurs dynasties rabbiniques respectives ont quitté le chemin de leurs ancêtres en se rendant à Berlin pour obtenir une éducation laïque. Par la suite, cette éducation occidentale a permis au Rav et au Rabbi de se connecter aux Juifs du « Nouveau Monde » d’Amérique d’une manière que d’autres ne pouvaient pas. Les sentiments du Rav envers le Rabbi étaient pleinement réciproques. Le Rabbi a écrit que sa relation avec le Rav était « beaucoup plus grande que ce que les gens savaient ». Cela ne veut pas dire qu’ils étaient en contact fréquent — je ne pense pas qu’ils l’étaient, mais ils ressentaient une profonde proximité et un respect mutuel. Le Rav a parlé de la « solitude » de l’homme de foi, et le Rabbi de Loubavitch l’a incarnée dans sa propre vie. Ils étaient tous les deux des individus très privés, des introvertis qui révélaient néanmoins leur moi intérieur devant de grandes foules. Tous deux ont consacré leur vie à transplanter le judaïsme sur un continent étranger, à une époque où la Torah était loin d’être florissante. Et tous deux ont obtenu un grand succès dans leurs missions.

Rav Menahem Genack – PDG de OU Kosher.

 

Une vidéo du Rav Ciment racontant cette histoire et d’autres sur le Rav et le Rabbi à Berlin